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Rejet du projet de loi sur les réformes : larmes de crocodile ou naïveté politique?
Publié le vendredi 1 aout 2014  |  icilome


© aLome.com par Parfait
Me Dodji APEVON , député du CAR , votant sur le projet de loi sur les réformes politiques


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Togo - E. GU-KONU


Si la masse des opposants veut réellement le changement démocratique pour mettre les Togolaises et les Togolais en mesure de changer durablement leurs conditions de vie, il faut qu’elle accepte de se donner une nouvelle politique d’opposition. La politique d’opposition dans laquelle les chefs des partis du courant majoritaire ont entretenu la population depuis des années n’est pas la seule possible.

L’affaire du siècle?

La question du rejet par l’assemblée du projet de loi introduit par le gouvernement au sujet des réformes est devenue le problème du siècle pour les représentants du courant majoritaire de l’opposition. Le microcosme politique et les milieux de la presse locale lui ont donné tant d’importance qu’elle a fini par occulter tous les autres problèmes de notre combat pour la démocratie, y compris le problème des « réformes » lui-même.


Ils ont tous donné le sentiment d’avoir cru en toute sincérité que la majorité parlementaire allait joyeusement voter la proposition de loi. On a parlé de déception face à l’attitude de la majorité vis-à-vis du projet de loi. Certains chefs de partis de l’opposition parlementaire sont même allés au-delà de la déception, pour étaler leur état d’âme sur la place publique.

Déception, semble-t-il également, dans les milieux diplomatiques. L’ambassadeur de France se dit «frustré», comme s’il croyait sérieusement, après trois ans de séjour dans le pays, que cette majorité parlementaire allait voter ce projet de loi qui, semble-t-il, reprend les conclusions du pseudo dialogue ostensiblement couvert de mépris par les représentants du parti du pouvoir.

De toute évidence, tout cela ressemble fort bien à un jeu de mauvais goût monté pour abuser une fois de plus la masse des opposants. Il convient de repasser le film de la question des réformes depuis 1993 pour s’en rendre compte.

A partir de 1993, le régime a clairement affiché sa volonté de se maintenir au pouvoir, y compris au prix du sang. Il met alors en place des institutions dont la fonction politique réelle est de lui permettre de détourner à chaque fois les scrutins à son profit pour réaliser cet objectif. Les plus remarquables de ces institutions sont la Cour constitutionnelle (1996), la Commission électorale nationale (CEN), puis la Commission électorale nationale indépendante (CENI) qui est en réalité un instrument électoral du régime. La HAAC suivra peu de temps après.

Personne ne met plus en doute aujourd’hui le fait que l’histoire des « 22 engagements » n’est qu’un bluff pour abuser les partis d’opposition qui y avaient cru ou avaient fait semblant d’y croire, juste pour ne pas « se faire marginaliser ». On ne demandait à Eyadèma rien de plus que de faire semblant de faire des réformes pour liquider cette histoire des sanctions pour «déficit de démocratique ». De ce point de vue, le régime avait en réalité l’appui de la Commission européenne chargée du développement.


Le dialogue tenu en 2004 à l’issue de l’élection présidentielle de 2003 avait buté sur la question de la réforme de la Constitution réécrite en 2002 par les tenants du régime pour permettre à Eyadema de se présenter autant de fois qu’il le voudra. Eyadema ne voulait à aucun prix que l’on touche à cette constitution ; et il l’a clairement signifié à Louis Michel lors du passage de ce dernier à Kara en décembre 2004. Louis Michel transmettra fidèlement le message aux partis du courant majoritaire impliqués dans le dialogue, en leur martelant qu’il s’agit d’une question de rapport de force.

Le 12e dialogue ou organiser des élections pour débloquer la situation

Après le douloureux passage traversé par l’opposition en 2005, le régime était relativement plus affaibli qu’avant la mort d’Eyadema. Il avait alors grand besoin d’organiser des élections législatives pour « normaliser » à son profit la situation politique créée par le coup de force du 5 février. Il avait fini ainsi par accepter le principe de cet autre dialogue (le 12e depuis 1993). Le CAR, en la personne d’Agboyibo avait présidé ce dialogue en collaboration plus qu’intime avec Gilbert Bawara, l’un des ultras du régime. Ces deux hommes (il faut le souligner) sont en réalité les inspirateurs de « l’Accord politique global » (APG), pour sauver le régime. Les chefs du courant majoritaire de l’opposition feront pourtant de ce document une sorte de bréviaire qu’ils récitent encore aujourd’hui comme le coran !

Si le régime avait besoin de faire des législatives pour débloquer la situation, ce dont l’opposition, elle, avait besoin au contraire n’était pas d’aller à des législatives dans ce contexte politique d’affaiblissement relatif du régime, mais de profiter de cet affaiblissement relatif pour imposer des réformes profondes afin de jeter les bases de la vie démocratique dans le pays.


Les réformes constitutionnelles et institutionnelles devraient donc être, pour l’opposition togolaise, l’objet central de ce 12e dialogue. Dans la situation politique qui prévalait alors (et qui prévaut toujours), la réforme de la constitution en vigueur depuis 2002 et celle d’institutions telles que la Cour constitutionnelle, la HAAC, la CENI, la police, l’armée … étaient (et sont toujours) des conditions sine qua non pour rendre les élections crédibles dans le pays. Dans ces conditions, pour l’opposition, faire ces réformes devraient être un préalable à l’organisation des élections législatives et toutes celles qui allaient suivre. L’affaiblissement relatif du pouvoir dans ce climat politique et social créé par les conditions inacceptables d’accession de Faure Gnassingbe au pouvoir offrait à l’opposition l’occasion, non seulement de donner la priorité à ces réformes, mais aussi d’user de ce dialogue pour créer de nouvelles institutions de nature à jeter les bases d’une évolution démocratique irréversible.
Au lieu de cela, Agboyibo et Bawara donnèrent la priorité à l’organisation des élections, en se justifiant d’un argument incroyable, à savoir qu’il est du ressort d’une assemblée nationale de faire les réformes institutionnelles et constitutionnelles, et qu’il faut donner par conséquent la priorité à l’organisation des élections législatives. Ce qui signifie en claire qu’il faut élire une assemblée nationales dans les mêmes conditions constitutionnelles et institutionnelles qui, depuis 1996, ont toujours permis au régime de manipuler les scrutins pour se donner une majorité contestable à l’assemblée, et charger cette assemblée-là de procéder aux réformes constitutionnelles et institutionnelles. Inouï ! Agboyibo fut bien entendu récompensé de cette tractation par un poste de Premier ministre (pour quelques mois !), et les partis alliés du CAR obtinrent des postes ministériels, tout cela au grand dam de l’UFC dont les deux principaux acteurs étaient à l’époque J-P Fabre et Patrick Lawson.

On a vu ce qui s’est passé depuis les législatives du 14 octobre 2007. Le régime a fini certes par créer le Comité permanent de dialogue et de concertation (CPDC), dont il a confié la présidence à un des responsables de la CPP, un parti satellite. Puis le CPDC fut enterré aussitôt jusqu’au moment où le puissant ministre de l’intérieur, Pascal Bodjona va le ressusciter sous la forme du CPDC rénové, pour tourner en bourrique ceux qui se sont précipités dans ce truc pour pouvoir s’afficher, eux aussi.



Du temps d’Eyadema et depuis que Faure a succédé à son père, la préoccupation essentielle du régime n’a jamais été de reformer des institutions qu’il a créées pour se maintenir au pouvoir contre la volonté populaire. A partir du moment où le 12e dialogue a ouvert la voie aux législatives, et que le scrutin du 14 octobre 2007 lui a donné une majorité confortable à l’assemblée, la consolidation du pouvoir de Faure à travers les présidentielles de 2010 est devenue la préoccupation première du régime. De toute façon, pour le régime, l’APG avait été rédigé pour la forme, et son contenu n’a d’autres fonctions politiques que celle d’abuser l’opinion. Le sort réservé au CPDC, puis au CPDC rénové le montre bien.

Le « partage du pouvoir » et les réformes

Mais notre histoire des réformes est loin d’être terminée. Quand, après le scrutin présidentiel de 2010 Gilchrist Olympio a rejoint le régime avec son UFC comme d’autres l’avaient fait avant lui, il s’est fait attribuer le registre des réformes. Il s’en est glorifié. Et avec ses airs de grand seigneur, il a proclamé à la face du monde entier qu’il réglerait rondement le problème en l’espace de six mois. Vantardise ou naïveté politique ? Depuis, on a plus entendu le fils d’Olympio sur la question. Il a dû comprendre qu’un régime déterminé à ne pas céder le pouvoir ne fait pas des réformes pour laisser la place à quelqu’un d'autre, que celui-là s’appelle Olympio ou pas. Et de fait, aucun homme sensé ne scie la branche sur laquelle il est assis. La branche ne se casse jamais que sous la force d’une bourrasque ; et avec elle, celui qui s’y accroche. C’est une leçon de l’histoire.

Le régime n’entend pas faire des réformes susceptibles d’ouvrir la voie au changement du système. L’expérience a montré depuis 1998 au moins sa capacité à faire du dilatoire pour abuser et repousser ces réformes aux calendes grecques. Aucun Togolais conscient des enjeux de la lutte pour la démocratie n’ignore plus cela aujourd’hui ; y compris ceux qui n’arrêtent pas de demander aux tenants du pouvoir de faire preuve de bonne volonté, ou se satisfont de les tancer de mauvaise foi.

Voilà pourquoi on comprend difficilement que des chefs de partis d’opposition croient ou donnent le sentiment de croire, et de toute façon laissent croire à la population qu’il suffit de demander à Faure Gnassingbe de faire des réformes pour qu’il les fasse. Voilà pourquoi il est surprenant de voir ces chefs de partis donner le sentiment de croire et de faire croire aux Togolais qu’un consensus pourrait être possible au cours d’un quelconque dialogue entre le pouvoir et son opposition sur les types de réformes qui sont de nature à ouvrir la voie au changement démocratique. Voilà enfin pourquoi il est difficile de comprendre comment des chefs de partis ou d’organisations de l’opposition peuvent se fondre en lamentations devant le rejet du projet de loi introduit par le gouvernement sur des questions aussi sensibles que la réforme de la constitution de 2002, l’institution du scrutin à deux tours, la limitation du mandat présidentiel à deux mandats avec effet rétroactif, la réforme de la Cour constitutionnelle, de la HAAC, de la CENI et bien d’autres encore…

Continuer de se complaire dans l’impasse ?

La CDPA-BT déplore ces comportements politiques que les partis du courant majoritaire de l’opposition érigent en stratégie politique. Car, ils ajoutent la confusion à la confusion ; ils font que la masse des opposants et tous ceux qui aspirent au changement politique ne comprennent plus rien à la politique d’opposition ; ce faisant, ils contribuent objectivement à renforcer les positions du régime.

La CDPA-BT réaffirme, une fois de plus, que le régime n’a pas l’intention de faire des réformes qui soient de nature à engager franchement le pays dans la voie de la démocratie. Ce refus n’est pas difficile à comprendre. Comme nous l’avons déjà dit, aucun homme sensé ne scie lui-même la branche sur laquelle il est assis, et dont il se nourrit des fruits.

La politique d’opposition dans laquelle les chefs des partis du courant majoritaire entretiennent la population n’est pas la seule possible. De plus, elle enfonce sans cesse l’opposition dans l’impasse. Si la masse des opposants veut réellement le changement démocratique pour mettre les Togolaises et les Togolais en mesure de changer durablement leurs conditions de vie, il faut qu’elle accepte de se donner une nouvelle politique d’opposition.

La CDPA-BT avait fait des propositions précises dans ce sens depuis 2006. Mais elles ont toujours été repoussées du revers de la main parce qu’elles n’entrent pas dans la logique de la compétition entre partis d’opposition pour le pouvoir. Nous reviendrons sur l'ensemble de ces propositions.
Le bon sens veut que si l’on ne parvient pas à résoudre un problème avec une solution donnée, il faut en essayer une autre, au lieu de se complaire dans l’impasse.

Fait à Lomé le 22 juillet 2014.

Pour la CDPA-BT,
Son Premier Secrétaire
E. GU-KONU


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