La Cour Constitutionnelle du Togo a rendu publique mardi 25 juin 2013, la liste définitive des candidats aux législatives de juillet prochain tout en se penchant sur la recevabilité ou non des dossiers des différents candidats. C’est ainsi que la Haute juridiction togolaise a prononcé l’invalidation de la liste du Collectif «Sauvons le Togo» (CST) de la circonscription électorale de la Kozah, pour cause d’ «incohérences ne permettant pas une traçabilité dans l’identification du candidat.» Me Tchessa ABI, tête de liste dudit collectif dans la Kozah, reconnait des «erreurs matérielles» dans le dossier tout en informant qu’une requête sera déposée pour corriger l’erreur.
L’autre grande surprise créée par la Haute juridiction, est la validation des dossiers des candidats du CST détenus dans l’affaire des incendies des marchés du Togo.
Sur les 183 dossiers enregistrés dont cent soixante deux (162) au nom de partis politiques et vingt un (21) au titre des groupes de candidats indépendants , la Cour Constitutionnelle (CC), après les vérifications administratives effectuées par le Ministère de l’Administration territoriale et des collectivités locales a donc statué sur les candidatures en vue des prochaines élections législatives. C’est l’occasion pour la haute juridiction togolaise de relever de graves manquements qui sont relatifs à l’âge des candidats, à la cohérence des mentions sur les actes d’état civil, aux inéligibilités et autres violations de la Constitution et de la Charte des partis politiques.
La première porte sur l’article 205 du Code électoral qui dispose que:
«Nul ne peut être candidat s’il n’est âgé de vingt-cinq (25) ans révolus à la date des élections (… )» , la haute juridiction a ainsi invalidé les dossiers des candidats: AMEVO Améyo Sitsopé inscrite sur la liste Front Démocratique Libéral (FDL), OLOSSOUMARE Moussa inscrit sur la liste de la Coalition «Arc-en-ciel», NAGMA N’mégma, inscrit sur la liste CPP, KOYADJA Kangrou inscrit sur la liste CST, GADO Idrissa inscrit sur la liste du FDL, DARK Kokovi inscrit sur la liste FDL, KPAVOUVOU Amévi inscrite sur la liste Lumière, SAMBIANI Yalbonja inscrit sur la liste CST, GMAGHI N’téassin inscrit sur la liste UFC.
Selon les juges de la CC, ces candidats cités n’ont pas l’âge requis pour se présenter aux législatives prochaines au Togo. Même sanction pour la liste CPP de la circonscription électorale Lacs- Bas Mono et la liste CST de la circonscription électorale de la Kozah.
Toutefois sur la base de l’article 222 du Code électoral qui dispose que: «La déclaration de candidature signée doit comporter pour chaque candidat de la liste les pièces suivantes: une copie légalisée du certificat de nationalité togolaise; un extrait d’acte de naissance ou de jugement supplétif en tenant lieu …» Sur ces listes, les Juges ont relevé dans certains dossiers des incohérences de noms et/ou de prénoms. C’est le cas de OBAFEMY Sofiatou, de la liste CPP de la circonscription électorale Lacs- Bas Mono. Le nom et prénom du père ne sont pas concordants entre le certificat de naissance et le certificat de nationalité. Le premier ayant mentionné OBAFEMY Matchoudi Adissa et le second OBAFEMY Adissa Christoto. C’est le cas de la liste CST de la circonscription électorale de la Kozah, où figure le nom de BODJONA Mèbinésso Palapapawi. Faisant défaut, le nom et prénom que porte le certificat de nationalité alors que sur l’acte de naissance, ce sont BODJONA Marthe. Pour la CC, ces incohérences ne permettent pas une traçabilité dans l’identification des candidats. C’est la deuxième cause qui a conforté les juges de la Haute juridiction à invalider ces candidatures.
La troisième cause d’invalidation porte sur des inéligibilités aux termes de l’article 207 du code électoral qui dispose «Sont inéligibles pendant la durée de leur fonction et durant les six (06) premiers mois qui suivent la cessation de celle-ci:
- Le trésorier-payeur et les chefs de service employés à l’assiette, à la perception, et au recouvrement des contributions directes et ou indirectes et au paiement des dépenses de toute nature en fonction dans le territoire de la République togolaise…»; Mais également sur l’article 208 qui énonce quant à lui que «sont également inéligibles pendant la durée de leur fonction et durant les deux (02) premiers mois qui suivent la cessation de celle-ci:
- Les comptables et agents de tous ordres employés à l’assiette, à la perception, et au recouvrement des contributions directes et ou indirectes et au paiement des dépenses de toute nature en fonction dans le territoire de la République togolaise…». La CC a considéré que monsieur DJITRI Kokouvi, inscrit sur la liste Alliance Démocratique pour la Patrie dans la circonscription électorale de Yoto, inspecteur du trésor de son état, ne peut être candidat sans avoir apporté la preuve d’avoir démissionné de sa fonction depuis au moins six (06) mois à la date de dépôt de candidature. D’où l’invalidation de la liste de l’Alliance dans le Yoto.
La Haute juridiction, se fondant sur l’article 52 de la Constitution qui dispose que: «Chaque député est le représentant de la nation tout entière», ainsi que sur l’article 7 de la Loi fondamentale et de la loi portant Charte des partis politiques, en son article 6, interdisant aux partis politiques et aux regroupements de partis politiques de s’identifier à une région, à une ethnie ou à une religion, les juges de la CC ont considéré d’une part, que la liste Renaissance Vo, conduite par M. AMOUSSOU AHOUANDJINOU HOAWANOU José dans la circonscription électorale de Vo, a comme slogan «La renaissance de Vo, oui nous pouvons». Les juges estiment que ce slogan tend à faire des candidats qui seront élus dans cette circonscription électorale des représentants exclusifs de celle-ci, en violation des articles 7 et 52 de la Constitution et de l’article 6 de la loi portant Charte des partis politiques. Et d’autre part, que M. AHADZI Kokouvi, inscrit sur la liste Cercle des Leaders Émergeants dans la circonscription électorale Lacs-Bas Mono, se dit employé par Jésus Christ. Les juges estiment là aussi que cette affirmation est contraire à l’article 7 de la Constitution et à l’article 6 de la Charte des partis politiques. C’est pour toutes ces raisons que la CC a invalidé la liste Renaissance Vo de la circonscription électorale de Vo et la liste Cercle des leaders indépendants de la circonscription électorale Lacs-Bas Mono.
Tirant les conséquences de toutes ces décisions de la Cour Constitutionnelle, il ressort que tous les autres dossiers de candidature ont été déclarés recevables et pourront donc participer à la compétition électorale du 21 juillet, avec une campagne qui démarrera le
06 juillet.
La réaction de Me Tchessa ABI à propos de l’invalidation de la liste du CST dans la circonscription électorale de la Kozah
Joint par nos confrères de la station de radio Légende Fm qui émet depuis Lomé, le Président national du PSR et tête de liste du CST dans la région de la Kozah, Me Tchessa ABI a laissé entendre, à propos de l’invalidation de la liste du CST dans ladite localité, qu’ils sont très consternés par la non publication de la liste des candidats des partis politiques du CST dans la circonscription électorale de la Kozah. «Nous préparons une requête destinée à la Cour Constitutionnelle du Togo en vue de faire publier conformément aux dispositions pertinentes du code électoral, la liste», a-t-il laissé entendre puis d’expliquer qu’il y a une erreur matérielle qui figure sur le dossier d’une candidate de sa liste. «Nous avons produit tous les éléments pour que la Cour Constitutionnelle publie notre liste. Nous pensons que cette élection doit être pour nous une occasion d’une compétition ouverte entre les partis politiques et qu’il n’y a pas de raison que la Cour Constitutionnelle n’accepte notre requête étant entendu qu’il s’agit uniquement d’une erreur matérielle», a martelé Me Tchessa ABI.
La surprise de l’opinion publique quant à l’acceptation des dossiers des candidats du CST toujours détenus
C’est à la surprise générale que l’opinion togolaise a appris la décision de la Cour Constitutionnelle, après étude des dossiers par le Ministère de l’Administration territoriale et des collectivités locales, de valider les dossiers de candidature de: Gérard ADJA et de Jean EKLOU, tous candidats inscrits sur la liste du CST mais toujours maintenus dans la maille de la gendarmerie nationale dans l’affaire des incendies du marché du Togo. Ce qui crée un paradoxe si tant est qu’en validant les candidatures de ces personnes détenues la Cour Constitutionnelle prouve ainsi leur culpabilité dans cette rocambolesque affaire. Ces derniers, en vertu de la présomption d’innocence dont ils bénéficient, devaient être relâchés depuis surtout quand on sait aussi que le code de procédure pénale ainsi que le code pénal togolais exigent que les enquêtes judicaires que soient menées à charge et à décharge.
Recouvreront-ils la liberté avant le début de la campagne électorale qui va bientôt démarrer ou seront-ils candidats toujours gardés dans les mailles de la gendarmerie nationale? C’est la question que se posent nombre d’observateurs avisés de la politique togolaise. «Le Togo est un pays atypique, exceptionnel, unique en son genre», s’explosera un citoyen togolais après la décision de la Cour Constitutionnelle.
Le cas PERE Dahuku
Ce personnage, on le connaît. Il était un baron du RPT, parti au pouvoir, avant de rejoindre avec armes et bagages les rangs de l’opposition togolaise. Il avait formé avec Agbéyomé Kodjo, un tandem pour décrier haut et fort la dictature togolaise. L’avènement de Faure Gnassingbé l’avait radicalisé un temps puis c’est le retour à ses premières amours.
Il est tête de liste du parti présidentiel UNIR à Blitta. Le code électoral et la Loi fondamentale disposent clairement que nul ne pourra être membre de deux partis politiques à la fois. Or il est connu de tous que M. Péré est le Président national d’une formation politique L’Alliance. Sans démissionner de ce parti, il brigue la tête de liste d’un autre parti politique. Se pose la question de savoir pourquoi la Cour Constitutionnelle n’a pas invalidé sa candidature. A-t-elle délibérément fait le choix de maintenir cette candidature, recevant des ordres du prince? C’est un précédent juridique grave auquel les hauts magistrats devront faire face et expliquer pourquoi ils avaient refusé d’appliquer la loi dans cette circonstance.
Vivement que les autorités togolaises se comportent en hommes d’État civilisés.