Alors que la plupart des Chefs d’Etats africains ayant pris part au sommet USA-Afrique brillent par leur présence active et leurs multiples rencontres avec les officiels américains dont notamment John Kerry, Faure Gnassingbé est bien contraint de raser les murs à Washington.
Pour l’instant, et selon les retours que nous avons, seule Sally Jawell, la secrétaire d’Etat américaine à l’Intérieur, l’équivalent au Togo du ministère de l’environnement a eu l’amabilité de rendre visite au Prince dans ses appartements dès son arrivée à Washington pour parler écologie.
Aucune autre rencontre avec un officiel américain n’est prévue dans le cahier de charge de Faure Gnassingbé.
Les multiples tractations de Robert Doussey auprès du secrétariat d’Etat américain pour que John Kerry accorde quelques minutes au Prince du Togo se sont révélées vaines alors qu’au même moment ce privilège est bien accordé à certains Chefs d’Etats dont Blaise Compaoré que Kerry a félicité pour ses efforts en faveur du maintien de la paix en Afrique de l’Ouest.
De guerre lasse, Faure Gnassingbé se voit ainsi contraint de se contenter des rencontres de bas-niveau notamment avec les hommes d’affaires américains et quelques griots du monde diplomatique présents à Washington.
Mais comment en est-on arrivé là pour que notre cher Président, le Prince des Princes puisse autant sentir la peste au point d’être ci-indésirable ?
Au moins deux raisons majeures expliquent cet état de fait.
La première tient du refus du Prince d’opérer les réformes politiques pour garantir une assise effective de la démocratie et une perspective d’alternance politique au Togo.
En effet, la farce orchestrée récemment par le pouvoir de Lomé en envoyant un projet de loi sur les réformes pour ensuite le faire rejeter par sa propre majorité a retenti dans le monde diplomatique comme une onde de choc qui a littéralement brisé la fragile confiance que les puissances occidentales plaçaient encore en ce régime cinquantenaire de Lomé.
Les rapports établis à la suite de cette comédie par le groupe des cinq ambassadeurs en poste au Togo pour le compte de l’Allemagne, la France, les USA, l’UE et l’ONU sont plus que salés et illustrent parfaitement le niveau intolérable de duplicité et de faux-fuyant du Prince et de son régime.
Il s’avère d’ailleurs qu’Alassane Ouattara, le Président ivoirien dont le Prince s’était servi pour donner une crédibilité aux élections législatives de juillet 2013 est plus qu’en courroux et attend bien des explications du Prince de Lomé sur ce coup de force surprenant et parfaitement lâche qu’il vient d’opérer avec sa majorité parlementaire.
Personne dans les milieux diplomatiques n’a pu comprendre comment le fils du père tient à s’accrocher aussi lâchement à ce fauteuil que son père a déjà géré pendant 38 ans et lui pendant 10 ans sans donner aucune possibilité d’ouverture et d’espoir à ces milliers de togolais qui aspirent à avoir une alternance pacifique dans ce pays.
D’autres informations font état du même courroux qui se développe auprès de l’Union Européenne et d’autres partenaires-soutiens du régime de Lomé. Des programmes de financements pour le Togo sont en voie d’être purement et simplement suspendus. L’on parle déjà Fonds Européen de Développement (FED) et du Programme de Modernisation de la Justice qui ne seront plus renouvelés au Togo.
Naturellement de telles mesures vont d’elles-mêmes d’autant que le Programme de Modernisation de la Justice dans lequel les partenaires ont engagé plus de 10 milliards de fcfa visait à assurer une indépendance réelle, pleine et entière de la justice au Togo.
Mais où en est-on aujourd’hui ? Là vient justement la deuxième raison qui détruit littéralement l’image du Prince et de son régime auprès de la Communauté Internationale.
En effet, la justice togolaise n’existe pratiquement plus. Et comme le disait si bien Loïck Le Floch Prigent, elle se résume aux décisions d’une seule et unique personne, Faure Gnassingbé.
Au Togo, disait-il, il n’existe pas de justice en dehors du Chef de l’Etat. Même les juges d’instruction pensent qu’ils doivent recevoir les consignes du Président de la République avant de prendre leurs actes. Où sommes-nous au juste ?
L’on croirait à une fable si des éléments corroborant ces allégations n’étaient pas légion dans ce petit pays de l’Afrique de l’Ouest.
L’affaire des incendies qui est gérée de la manière la plus artisanale et insensée est très illustrative de cette funeste réalité.
Voilà donc un dossier dans lequel le principal accusateur, Mohamed Loom, dont les accusations avaient permis de mettre la main sur des leaders politiques, s’est rétracté à plusieurs reprises et accuse les ténors du pouvoir de l’avoir torturé et manipulé.
Voilà un dossier dans lequel, les personnes mises en cause dénoncent, à travers un rapport dûment établi, ceux qu’ils considèrent comme étant les vrais auteurs et commanditaires de l’acte incriminé.
Voilà encore un dossier dans lequel, le pouvoir lui-même se précipite pour démolir le corps du délit sans l’ordonnance du juge d’instruction alors même que cette instruction n’est pas encore clôturée et mieux, les rapports établis sur le mode opératoire et les substances utilisées pour ce crime sont sujets à polémique….
Et que, malgré tous ces nœuds, le même pouvoir veuille poursuivre la forfaiture en vue d’éliminer de la course présidentielle des adversaires politiques de taille.
Comment le Président d’un tel Etat de terreur et d’injustice flagrante ne serait-il pas obligé de raser les murs dans des rencontres de taille où l’on parle de la bonne gouvernance, de la promotion des droits de l’homme, de la lutte contre la corruption etc ?
Faure Gnassingbé pourrait-il faire autrement que de raser les murs dès lors que toute la Communauté Internationale sait d’emblée qu’il est derrière la fameuse affaire d’escroquerie internationale par le biais de laquelle il entend démolir un Pascal Bodjona qui est tant redouté pas ce régime ?
Dans cette curieuse affaire justement, et même s’il avait tenté de se cacher, le Prince s’est vu obligé, à un moment donné d’agir à visage découvert.
Il a fallu que Faure Gnassingbé donne des consignes fermes à Yark Damehane, ministre de la sécurité et à Akpovi à l’époque Dg de la gendarmerie pour que ceux-ci s’activent pour coordonner l’interpellation de Pascal Bodjona le 1er septembre 2012.
Il a fallu qu’il passe un coup de fil à Alassane Ouattara pour obtenir l’interpellation et le transfèrement précipité de Loïck Le Floch Prigent d’Abidjan à Lomé.
Il a aussi fallu que la France l’interpelle directement et même le menace pour qu’il se résolve à lâcher leur citoyen qui a regagné son pays fin février 2013 après 5 bons mois de détention à la gendarmerie nationale de Lomé.
Il a fallu, dans sa vaine tentative de secréter des charges contre Pascal Bodjona, que le Prince envoie son conseiller à plusieurs reprises à Bamako pour forcer des révélations de Aoua Mounira.
Il a aussi fallu que le même Prince refuse la libération de Agba Bertin pour que la décision de la Cour Suprême du 20 juin 2012 libérant ce dernier ne soit pas exécutée.
Il a fallu encore une fois, que le Prince écourte à nouveau la mission du même conseiller en France pour que ce dernier se dépêche récemment à Athènes afin de négocier farouchement la tête de Agba Bertin retenu par la police grecque…
Il a fallu beaucoup d’autres faits et gestes du Prince pour que l’affaire soit à ce niveau pitoyable où elle se trouve actuellement….
Comment un tel Chef qui se sait découvert dans ses supercheries ne finit pas par raser les murs quand il est en face des hommes lucides ?