L’échéance de l’élection présidentielle de 2015 avance à grand pas. Au niveau de l’opposition, et c’est un secret de Polichinelle, l’heure est à la recherche de voies et moyens pour arracher les réformes et sceller une stratégie commune pour cette élection cruciale. Et c’est à ces fins que le Collectif « Sauvons le Togo » et la Coalition Arc-en-ciel se retrouvent en conclave depuis
le 29 juillet dernier. Après une pose d’une dizaine de jours, les travaux reprennent demain mardi, apprend-on des sources informées. Mais dans une atmosphère de dissensions internes au sein de la Coalition Arc-en-ciel sur la désignation de Me Dodji Apévon comme postulant du
regroupement à la candidature unique de l’opposition.
Reprise des discussions ce mardi Dans la perspective de l’élection présidentielle de 2015, les leaders du Collectif « Sauvons le Togo » et de la Coalition Arc-en-ciel ont décidé de fumer le calumet de la paix et se réunissent en conclave depuis le mardi 29 juillet, dans un hôtel de la banlieue Sud-Est de Lomé. Il s’agit pour ces deux regroupements largement représentatifs de l’opposition, de se mettre ensemble pour combattre l’adversaire commun qu’est le pouvoir Rpt/Unir, définir une stratégie commune, exiger les réformes constitutionnelles et institutionnelles de l’Accord politique global (Apg) et plancher sur une candidature unique de l’opposition à cette élection. Inaugurés le mardi 29 juillet dernier où les deux protagonistes ont fait un check-up du passé et reconnu les erreurs commises de part et d’autre, et après une seconde séance le vendredi 1er août au cours de laquelle la question des réformes a été entamée, les travaux devront reprendre ce mardi 12 août – contrairement à ce que nous avions écrit dans la parution de lundi dernier où nous l’annoncions au mardi 5 août. Au menu, toujours la question des réformes, mais aussi la candidature unique de l’opposition.
Les deux parties sont censées se retrouver encore mercredi. Ambiance conviviale, une commission mise en place L’égo est la pathologie séculaire dont souffrent les leaders de l’opposition. C’est en fait un vieux combat entre des formations politiques qui s’est transposé dans les deux regroupements politiques. Très souvent, leurs responsables s’opposent sur tout et rien et s’envoient des piques par médias interposés. Ce qui rend difficile l’entente entre eux. Et dans le cadre des présentes discussions, on redoutait de voir certains claquer la porte aussitôt le conclave ouvert et les débats de fond engagés. Mais les deux parties surprennent leur monde par la cohésion qui prévaut. On parle d’ambiance fraternelle au cours des discussions. En tout cas, pas d’animosité ni complexe de supériorité.
A propos justement des discussions, elles se déroulent en plénière devant tous les représentants des deux parties et les décisions devraient être prises par consensus. Mais il
nous revient qu’une commission a été mise en place à la dernière séance du 1er août dernier, afin d’approfondir les réflexions. Elle a pour mission fondamentale, selon les informations, de réfléchir sur les voies et moyens pour renforcer la mobilisation en vue de contraindre le
pouvoir Faure Gnassingbé à exécuter les réformes constitutionnelles et institutionnelles indispensables au bon déroulement du scrutin de 2015, mais qui sont dans l’impasse depuis le rejet scandaleux du projet de loi gouvernemental par les députés de l’Union pour la République (Unir) le 30 juin dernier. Et malgré les pressions et appels tous azimuts de la communauté internationale, Faure Gnassingbé ne se reprend guère. Ce serait d’ailleurs le tout premier objectif du conclave. Par ailleurs, ladite commission serait (subsidiairement) chargée d’étudier la question de la candidature unique de l’opposition dans toute son entièreté, tailler les critères de désignation, plancher sur les envies exprimées des deux côtés et fournir les résultats.
Des dissensions internes à la Coalition Arc-en-ciel
Le choix (sic) de Me Dodji Apévon comme postulant de la Coalition Arc-en-ciel pour la candidature unique de l’opposition, bien qu’il se soit fait au cours d’une réunion le 27
juillet dernier, suscite des remous. C’est d’abord le président du Nouvel engagement togolais (Net), Gerry Taama qui a lancé les hostilités en remettant en cause cette décision, dans une récente sortie. Vendredi dernier, Jean Kissi, le Secrétaire général du Comité d’action pour le
renouveau (Car) est monté au créneau pour relever que le conclave n’est pas destiné à désigner un candidat unique de l’opposition. Alors même qu’il y a aussi cette problématique à l’ordre du jour. La dernière, c’est le patron de la Coalition, Bassabi Kagbara qui vient remettre en
cause le choix de Dodji Apévon.
« Je n’étais pas au pays quand la réunion du 27 juillet s’est tenue. Et en tant que Président en exercice de la Coalition, je n’ai pas été informé de la tenue d’une telle réunion. C’est par les médias que j’ai appris que Me Apevon a été désigné comme candidat unique de la Coalition Arc-en-ciel pour la présidentielle de 2015. Par qui ? Je ne sais ! En ce qui nous concerne au Pdp, cette désignation ne nous engage aucunement ! C’est un non évènement… La désignation d’un candidat de la Coalition doit se faire dans les règles de l’art. Deux leaders étaient absents à la réunion du 27 juillet, moi je n’ai même pas été informé, bien que je sois encore le président en exercice de la Coalition. Vous voyez que la démarche est
vraiment déplorable ! Ce genre d’attitude n’est pas de nature à renforcer la cohésion au sein de la Coalition. Et c’est bien dommage !», relève-t-il dans une interview. Voilà qui pourrait remettre en cause la sérénité des discussions au conclave.
Dynamique unitaire (toujours) partagée La démarche initiée par les deux regroupements de l’opposition était partagée de part et d’autre. Surtout dans les rangs des leaders de la Coalition Arc-en-ciel qui ne tarissent souvent pas de reproches (fondés ou non) à l’endroit de leurs camarades du Collectif « Sauvons le Togo ».
« L’opposition s’est présentée aux dernières élections législatives en rangs dispersés. Le résultat, on l’a vu. On aurait fait mieux s’il y avait eu une démarche unitaire. Vous conviendrez alors avec moi qu’il urge que nous puissions harmoniser les positions afin de parvenir à cet objectif. Car, aucun parti de l’opposition ne peut, à lui seul, faire face à la machine d’en face », a déclaré dans une récente interview Dr Georges Kuessan de Santé du Peuple, ajoutant relativement à la candidature unique et au risque que les petits partis comme le sien soient broyés par l’hégémonie des grands : « Lorsque nous nous sommes rencontrés, nous avons été
très heureux de constater qu’il n’y a pas de prééminence de positions.
Chacun est venu avec des idées certes, mais je puis vous assurer que jusqu’à maintenant, le consensus est la chose la mieux partagée au cours de nos échanges (…) Dans une société ou dans un groupe, il y a des devanciers qui ont plus d’expériences forcément. Les nouveaux venus ont du chemin à faire pour acquérir de l’expérience ».
« Même si dans nos efforts pour les réformes, nous arrivons à obtenir les deux tours de scrutin, la position correcte à avoir, c’est de se dire que nous irons quand même ensemble,
nous aurons un seul candidat. Parce que dans la situation actuelle, il est clair que celui qui oserait faire route tout seul, celui-là est dans une logique de faire perdre l’opposition et de faire gagner le pouvoir. Il est dans la logique que le pouvoir doit demeurer après 2015, et par
conséquent, il cherche à pouvoir coopérer avec lui. Mais je suis convaincue que les Togolais sont des gens qui réfléchissent, analysent, voient les actes que chacun pose, les populations sauront sanctionner.
En tout cas, la CDPA appellera à ce qu’ils soient sévèrement
sanctionnés », déclarait Mme Brigitte Adjamagbo-Johnson de la Convention démocratique des peuples africains (Cdpa).
On pourrait craindre que le nouvel épisode au sein de la Coalition n’affecte l’élan engagé à travers le conclave. Mais Bassabi Kagbara ne voit aucun effet sur cette
dynamique. « Au fil des mois, le Cst et Arc-en-ciel se sont rapprochés dans leurs objectifs. Un chantier qui nous tenait tellement à cœur au Pdp et qui commence par prendre aujourd’hui, heureusement.
Cette dynamique étant acquise, il nous reste juste à harmoniser les autres détails restants pour dégager un candidat qui porte les aspirations des deux regroupements. Je crois que chaque acteur s’investit à cela. Je suis optimiste pour l’issue de ce conclave, au bénéfice de nos populations qui ont trop souffert du régime clanique et partisan qui les a régentées jusqu’ici », a-t-il déclaré, refusant même de voir en ces divergences une crise au sein de la Coalition.
Vivement que chacun retrouve la raison et que les deux entités de l’opposition parviennent à dégager ce candidat unique attendu par le peuple assoiffé d’alternance.