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Liberté N° 1757 du 11/8/2014

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Editorial

TOGO: Les autorités togolaises à l’école du devoir de sincérité envers les populations
Publié le mardi 12 aout 2014  |  Liberté


© Autre presse
Faure Gnassingbé et Ahoomey-Zunu cherchent désespérément candidats pour prendre part au gouvernement


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Le gouvernement a longtemps tu le SIDA avant d’avouer son existence au Togo

Le suspect au bord de l’égout
Le ministère béninois de la
Santé a tenu la semaine dernière une conférence de presse pour un cas
suspect de malade Ebola pour édifier les citoyens. Au Togo, des
situations identiques n’ont pas encore décidé les autorités à affronter
les médias et la population pour faire le point. Et lorsqu’on revoit les
conditions dans lesquelles certains éléments des forces de l’ordre ont
évolué devant le cas suspect à Lomé, il ressort qu’un premier cas avéré
risque d’être la catastrophe. Mais le black-out que les autorités font
planer sur cette épidémie fait penser aux méthodes utilisées il y a des
dizaines d’années face au virus du Sida avant que finalement, elles
concèdent à reconnaître l’existence de cette maladie au Togo.
Vendredi dernier, lorsqu’un premier cas
suspect à virus Ebola a été signalé au Bénin, voici ce que le
gouvernement a sorti comme communiqué : « C’est un patient
de 21 ans venu du Nigéria admis au Chd de l’Ouémé/Plateau. La personne
ne pouvait plus s’exprimer. Il faisait la diarrhée et le vomissement. Il
n’était plus en bon état physique. Ce sont les cas que nous recevons
souvent dans nos hôpitaux. Le malade et ses accompagnateurs ont été
isolés. Il s’agit d’un cas suspect, mais ce n’est pas encore confirmé.
Des prélèvements ont été faits pour confirmer ou non la maladie
d’Ebola…. ». Le communiqué du Directeur adjoint du cabinet du ministre de la Santé précise en toute humilité que « …toutefois,
lesdits prélèvements seront analysés à l’extérieur, car le Bénin ne
dispose pas pour l’heure d’un laboratoire capable de détecter des cas
d’Ebola ».
Dans la même journée au Togo, un cas suspect signalé la veille a obligé le ministère de la Santé à la sortie suivante : « A
ce jour, aucun cas suspect de malade à virus Ebola n’est signalé sur le
territoire national… Il s’agit d’informations non fondées qui sèment
une psychose générale dans la population ». Voilà comment les
autorités béninoises qui ont demandé à tout citoyen de signaler tout cas
suspect et qui ont mis à sa disposition un numéro vert, gèrent les cas
suspects signalés moins de 24 heures avant. Mais rien n’a été dit sur
d’autres cas ayant débarqué à l’aéroport de Lomé. De sources proches du
personnel de l’aéroport, quatre cas suspects ayant pris un vol d’Asky jeudi dernier, ont été signalés dans la zone de transit et seraient en centre d’isolement. Le lendemain, quatre nouveaux cas sur la compagnie Air Ivoire seraient également détectés et ont rejoint le même centre.
Il est vrai que le service de prévention
n’a pas la cote au Togo, mais il est tout aussi vrai que le Togo ne
dispose pas de centre d’analyses pour détecter la présence ou non du
virus dans les liquides biologiques d’un suspect et que c’est au Sénégal
ou ailleurs que les analyses se feront. Et ça, aucune autorité n’a le
courage de l’avouer aux populations comme le Bénin l’a humblement
reconnu. La sortie de vendredi dernier mérite quelques remarques. Si la
durée d’incubation du virus varie entre 2 et 21 jours, et si le suspect
évacué jeudi soir au centre d’isolement n’a pas atteint la période de « maturité »
qui pût permettre à d’autres signes de se révéler, sur la base de
quelle certitude les services de santé ont-ils pu se prononcer sur la
non existence du virus chez ce suspect ? Ou bien a-t-on pu envoyer des
prélèvements nuitamment au Sénégal pour des analyses? Tout paraît dans
le communiqué gouvernemental comme si le souci majeur était de rassurer,
plus que de montrer aux populations que les cas suspects sont traités
avec diligence. Et dans ce cas de figure, les autorités togolaises ne
seront pas à leur coup d’essai.
En effet, pour ceux qui peuvent encore
s’en souvenir, la maladie du Sida a proprement fauché des vies de
Togolais longtemps avant que le régime qui tenait plus à ripoliner son
image aux yeux du monde entier, ne finît par reconnaître
qu’effectivement le Sida existe bel et bien au Togo. En toute
probabilité, le Togo aurait bénéficié plus tôt d’assistance si les
gouvernants avaient fait profil bas et dit la vérité sur la maladie.
Sans être alarmiste, le pays se trouve encore dans ce cas de figure.
Au-delà de la présence ou non du virus
Ebola au Togo, le pays n’est pas prêt à faire face à une épidémie de ce
genre. Pas parce qu’il n’existe pas de personnel qualifié, mais du fait
de l’amateurisme dont fait preuve la hiérarchie. Jeudi dernier, à
l’annonce du cas suspect, des éléments des forces de l’ordre se sont
rendus sur les lieux sans mesures de protection et il a fallu l’arrivée
d’un agent de santé pour qu’ils se couvrent le nez non pas avec des
masques de protection, mais avec des cache-nez. Et pourtant, on parle
d’un virus hautement transmissible. L’autre aspect que les autorités
tardent à expliquer concerne la configuration des centres d’isolement.
Ces lieux sont-ils constitués de pièces séparées et isolées pour éviter
la circulation des gouttelettes de Pflügge ou alors, sont-ce des lieux
où chacun regarde l’autre ? Loin d’être anodine, la réflexion trouve son
importance lorsqu’on sait que tous les cas suspects ne sont pas
susceptibles d’être des cas déclarés et qu’une dizaine de citoyens
peuvent se retrouver pendant une période donnée dans ces lieux comme
c’est actuellement le cas. Qu’arrivera-t-il aux suspects sains s’ils
devraient côtoyer pendant la période d’incubation un seul porteur
sain parmi eux?
Il est tout aussi étonnant que face à
une maladie à si fort taux de mortalité, ce soit le Premier ministre
n’ayant aucune formation médicale qui demeure le responsable de la santé
au Togo. Puisque la semaine dernière, l’homme s’est éclipsé pour éviter
les questions des médias en rapport avec le fret aérien et le virus
Ebola. C’est le Colonel Gnama Latta ne sachant pas tenir la seringue,
qui tient à expliquer la situation épidémiologique aux médias. C’est à
se demander à quoi servent tous les docteurs dont regorge le Togo.
S’agissant des forces de l’ordre, même
s’ils se sont souvent illustrés négativement vis-à-vis de la population,
on doit avouer que leurs vies sont en danger. Pas qu’une « agression terroriste »
viendra les défier, mais parce que l’ennemi est invisible dans cette
lutte préventive. Et c’est ici que leur sacro-sainte maxime « exécution avant réclamation » doit être remise en question. Malgré ce qui se passe dans les « pays épicentres »
de l’épidémie, la hiérarchie, dans son souci de préserver l’image du
Prince de la République, n’hésitera pas à envoyer des policiers ou
militaires vers des zones où des cas suspects seraient signalés. Mais à
l’heure où l’Organisation Mondiale pour la Santé (OMS) veut fait de la
maladie à virus Ebola un problème de santé publique, existera-t-il
encore des soldats à qui on demandera d’aller dans des foyers suspects
sans les pourvoir en équipements protecteurs ? En Sierra Leone, on
enregistre des défections au sein du corps médical et ce sont des
bénévoles qui, au péril de leurs vies, ont accepté mettre la main à la
pâte pour enterrer des morts du virus. Une situation qui fait voler en
éclats le serment d’Hippocrate prêté par le corps médical.
En l’état actuel de l’épidémie, certains
Etats ont émis le vœu d’utiliser un anticorps expérimental développé
aux Etats-Unis, le ZMAPP, jamais testé sur l’homme, et qui a été
administré à deux Américains infectés au Liberia. Ces deux personnes –
un médecin et une religieuse – ont été transférées aux Etats-Unis et
placés à isolement à Atlanta. Selon les dernières informations, l’OMS
doit se réunir la semaine prochaine pour examiner l’éventualité
d’utiliser le ZMAPP en Afrique de l’Ouest. Sur le continent européen, un
traitement préventif contre Ebola mis au point par le laboratoire
britannique GSK pourrait faire l’objet d’essais cliniques en septembre,
et s’ils sont concluants, être disponible courant 2015, d’après
Jean-Marie Okwo Bélé, directeur du département des vaccins et
immunisation de l’OMS. Mais en attendant cet horizon si proche et si
lointain, la seule alternative reste la prévention et la considération
de tout cas suspect détecté. Car on le ne dira jamais assez, « prévenir vaut mieux que guérir ».
On vient d’apprendre que le Ghana a
enregistré son premier cas mortel. L’homme serait rentré du Burkina Faso
après une période de maladie et c’est lors de son rapatriement qu’il a
clamsé.
Godson K.
LIBERTE HEBDO TOGO

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