Les grands hommes qui ont de l’étoffe ont ceci de particulier qu’ils inspirent d’emblée par leur allure, leurs idées, leurs actions et leur vision du devenir de l’humanité.
L’histoire nous enseigne que de par les siècles, l’humanité a connu une mue considérable grâce à ces meneurs d’hommes qui ont un esprit éclairé qui embrase sans retenue, des masses humaines dans leur jardin fleuri du bonheur et de la prospérité pour tous.
Les exemples saisissants et récents d’un Thomas Sankara au Burkina Faso, d’un Rawlings au Ghana ou d’un Mandela en Afrique du Sud illustrent parfaitement ce génie florissant de ces hommes féconds qui ont marqué leur passage au sommet de l’Etat par des actions de pointe ayant lancé irrésistiblement leurs pays vers un meilleur devenir.
A quoi sert alors un dirigeant qui n’a de vision que pour son ventre, ses prestiges personnelles et sa gloire qui écrasent littéralement l’aspiration légitime de tout un peuple à une métamorphose vers la prospérité et le mieux-être ?
L’interrogation a tout son pesant d’or dans le contexte spécifique du Togo au regard de l’impasse continue qui se crée et s’entretient sous les yeux impuissants de tout le peuple togolais.
Hier, c’était feu général Eyadèma qui, par sa main de militaire, avait maintenu pendant 38 ans, le peuple togolais sous un joug maîtrisé de la dictature imposant de fait une seule et unique direction que tous les togolais se devaient de suivre.
A sa mort en 2005, beaucoup de togolais avaient cru qu’enfin, le Togo et son peuple allaient connaître une résurrection assumée au travers d’une alternance pacifique qui devrait poser les jalons d’un charmant édifice de démocratie et de l’Etat de droit. Mais hélas !
La peur du lendemain, l’avidité prononcée et illimitée du pouvoir affichée par les orphelins du vieux, la lâcheté de l’armée …ont évaporé, en quelques heures, cet espoir légitime de tout un peuple.
Le tour de passe-passe a été tout de suite organisé sous le contrôle expert du mercenaire aux cols blancs qui a eu le génie malicieux de tripatouiller littéralement la Loi fondamentale du Togo pour refaire du fils, un député puis un président de l’Assemblée assumant de fait l’exercice du pouvoir pour le reste du mandat inachevé du père.
Il a fallu que les foules se déchaînent dans les rues de Lomé pour crier haro. Il a fallu qu’un Alpha Omar Konaré ou un Olusegun Obasandjo tapent du poing sur la table pour refuser ce coup de force aussi honteux que lâche, pour que, de guerre lasse, le Prince fasse semblant d’abdiquer laissant ainsi au Premier vice-président de l’Assemblée Nationale l’opportunité de conduire en 60 jours la transition politique.
Par la magouille et le forcing, le Prince a fini par conquérir le fauteuil de son père à la suite du semblant d’élection présidentielle qui a été organisée en avril 2005.
Les 400 à 500 morts recensés par les enquêteurs de l’ONU, la tension politico-sociale et la brûlure politique de l’époque n’ont pas suffi pour éteindre l’envie inextinguible du Prince de régner sur le Togo exactement comme son père l’avait fait pendant quatre bonnes décennies.
Au départ, l’on avait naïvement cru, vu son allure profane et son calme apparent, qu’il œuvrerait volontiers pour corriger les creux laissés par son père défunt en vue de jeter les jalons d’une résurrection démocratique du Togo pour ensuite s’éclipser du pouvoir afin de donner une chance aux togolais de choisir par eux-mêmes et en toute transparence leurs dirigeants.
Personne à l’époque ne pouvait imaginer, même un seul instant, qu’une fois à la place du père, le fils se transformerait en un redoutable serpent venimeux prêt à mordre tous ceux qui seraient tentés de lui résister dans son désir effréné de régner absolument et pour longtemps sur le Togo.
Aujourd’hui, presque dix ans après, les comptes sont bons. Faure Gnassingbé a fini de se métamorphoser suffisamment pour verrouiller tout l’appareil électoral et créer ainsi son empire de règne. Qui dit mieux?
Lequel des togolais espère encore qu’après avoir refusé allègrement d’entamer les réformes politiques préconisées par l’APG de 2006, le Prince pourrait un jour, de lui-même consentir à céder le fauteuil présidentiel?
Qui peut objectivement croire qu’ayant réussi cette magistrale déviation vers l’intérêt personnel au point de se construire près de 10 résidences de haut standing au Togo en moins de 4 ans de règne, qu’après avoir mis toute son énergie pour promouvoir l’accaparement des richesses de l’Etat par sa minorité au pouvoir, qu’après avoir réussi à blaser son cœur pour ne rien voir ni rien entendre sur les maux qui rongent le peuple de l’intérieur, le Prince perdrait un jour son temps à se préoccuper du devenir du Togo et des togolais ?
Les rapports établis aujourd’hui sur les fuites des capitaux au Togo sont effarants. Des milliards de fcfa quittent tous les mois le Togo par des voies détournées pour se loger dans des paradis fiscaux en Europe et en Asie.
En moins de 4 ans après l’atteinte par le Togo du point d’achèvement de l’initiative PPTE, la dette extérieure de notre pays dépasse largement les mille milliards de fcfa, soit exactement à la taille de toute l’ardoise que feu Eyadèma avait laissée comme dette en 38 ans de gouvernance. C’est extraordinaire !
Mais qui peut bien broncher dès lors que tout est centraliser au palais de la Marina ? Dès lors que le Prince a réduit tout le monde au silence ? Les ministres, les directeurs généraux de sociétés et des régies financières ne font aucun compte au peuple de la gestion qu’ils font du patrimoine commun.
Le Prince lui-même voltige d’avion en avion avec l’argent du contribuable sans rendre un seul compte au peuple souverain. Bref il a imposé son rythme, son allure, son mutisme à tout l’appareil de l’Etat.
Le désordre et l’anarchie ont pris la place d’une gestion saine des biens de l’Etat. Un déplorable culte de la falsification, de la légèreté et de l’usage au rabais des lois de la République est érigé en règle au Togo.
Les valeurs humaines qui ont longtemps cimenté significativement les liens entre les citoyens sont littéralement dépravées et altérées faisant ainsi du Togo une jungle où seuls les plus forts ont droit de cité.
Dans un tel contexte, sont heureux tous ceux qui ont gagné des postes juteux sous Faure Gnassingbé, car ils ne seront jamais inquiétés dès lors qu’ils ne convoitent pas le fauteuil de celui-ci.
A cette allure, que deviendra le Togo si le Prince réussit son pari de s’octroyer un troisième mandat de cinq ans à compter de 2015 ?
Voilà une bonne question qui doit inspirer méditation de la part de tous les togolais, aspirant profondément à un Etat et à une nation dignement construits au Togo.