Continuons! Continuons à ne rien voir, ne rien entendre, ne rien sentir pour toujours refuser d’admettre que l’opposition actuelle dans son incarnation la plus agissante, appartient à une autre ère, une opposition nouvelle, une opposition post-Gilchrist Olympio. C’est l’erreur fatale, la plus grosse des erreurs de Faure Gnassingbé d’ailleurs : ayant pensé que s’allier à tout prix à Gilchrist Olympio aurait anéanti définitivement l’opposition togolaise. L’étonnante erreur pascalo-fauriste. Évidemment, une erreur, une seule erreur n’est pas assez au Togo, fut-elle fatale. Et là tout le monde doit la faire, la refaire, y repasser jusqu’à la nausée.
Cette confusion gigantesque se perpétue : Rien n’aurait changé dans l’opposition togolaise. C’est l’erreur impardonnable que prolonge ou tente de ne pas reconnaitre certains des analystes de la situation politique togolaise. Ahaaa! Qu’est-ce que j’aurais tant aimé ne pas écrire ces lignes… Moi qui viens juste de sortir d’une salle de cinéma. Quel film? Tenez-vous bien : « Qu’est-ce qu’on a fait au bon Dieu? » Qu’est-ce que le Togo a fait au bon Dieu? Pourquoi tant de décalage analytique devant des faits aussi criards?
Tellement c’est évident que : « Rien n’est permanent, sauf le changement ». Et il ajoute même qu’en retournant au même fleuve dans son lit, c’est bien une méprise de penser que l’on se baigne dans la même eau; elle circule l’eau du fleuve : « On ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve ». Jamais ! Pas plus au Togo qu’ailleurs, deux fois plutôt qu’une, sachons que : « Rien n’est permanent, sauf le changement ». Et c’est depuis plus de 2500 ans que c’est dit par un certain Héraclite, Héraclite d’Éphèse, porteur d’une sagesse gréco-romaine elle-même fondamentalement héritière de la sagesse mère de l’Égypte d’antan que nous savons réellement africaine... une sagesse bien de chez nous.
Le piège était donc béant. Et pourtant. Comme de simples collégiens, pratiquement tous les analystes, observateurs et acteurs y tombent lamentablement. Il est vrai que le fruit mûr tombe toujours près de l’arbre qui l’a vu grandir. La tentation est ainsi grande de confondre l’opposition togolaise à un corps uniforme qui traverse le temps sans changer. Confondre l’opposition clairement menée par un Jean-Pierre Fabre à celle de Gilchrist Olympio auprès duquel le premier a si longtemps évolué tient lieu simplement d’un refus de la réalité. Ce piège pour amateur, doit normalement être vu par quiconque qui sait de quoi il parle lorsqu’il observe froidement le paysage politique togolais. Il ne s’agit pas d’aimer ou de ne pas aimer Jean-Pierre Fabre. Là n’est pas la question n’est pas là. Il s’agit de percer à la fois la réalité et l’invisible de la vie politique togolaise, de jouer avec les données analytiques et traduire tous ces faits au commun des mortels et non au commun des bordels.
Et pourtant elle change l’opposition togolaise
Oublions même le Jean-Pierre Fabre, et prenons l’entité ANC et son comportement unitaire manifeste dans l’opposition togolaise : l’existence même du CST ainsi que sa durée de vie en sont le parfait exemple. Cette réalité est située aux antipodes du comportement dominateur et méprisant vis-à-vis des autres, lorsqu’un certain maréchal régentait l’opposition togolaise, fermait le clapet aux autres chefs de partis, et jouissait de la complaisance éhontée de certains acteurs et intellectuels togolais tout en étant incapable de produire un seul résultat politique jusqu’à son propre effondrement.
Oublions le Jean-Pierre Fabre. Souvenons-nous qu’ici, là, dans ce pays, le Togo, les chefs des partis politiques se détestaient tellement qu’ils avaient même eu le malin génie de se partager la direction de leur regroupement toutes les deux semaines. Deux semaines de présidence et un autre arrivait à la tête du regroupement, pour repartir lui aussi deux autres semaines après. Évidemment, les ambassadeurs accrédités au Togo ne pouvaient pas s’empêcher de s’en moquer et de travailler en cacophonie, en commun bordel, avec le chef du regroupement et avec ses proches successeurs en même temps. Ici au Togo, on avait inventé « Le Roi est mort-né-vivant, vive le Roi-en-devenir-né-vivant-mort-aussi ». Naturellement, ce faux jeu ne pouvait pas trop durer. Vitement né, vitement mort : à ma connaissance, ce fut la seule fois que le ridicule avait tué au Togo. Et nous pouvons tous donner d’autres exemples aussi causasses les uns que les autres.
Alors que l’on ne refuse pas de voir et d’entendre, pour tenter de nous faire accroire la valeur et l’apport du CST, le Collectif Sauvons le Togo. Le CST est probablement une des grandes réalisations, le plus grand succès de l’opposition togolaise qui marque une rupture véritable avec le passé inefficace (objectif) et inefficient (coût) de cette même opposition. Rupture y en a missié-dame; rupture y en a beaucoup même.
Et, c’est en cette nouvelle opposition que nous observons une véritable détermination, une bonne occupation du terrain, une meilleure ouverture aux autres sur le chemin difficile de l’alternance. Mais nous gardons espoir et travaillons pour que la nécessité et le principe de l’alternance soit davantage tributaire du changement de mentalité, du devoir de réconciliation et des reformes que d’une candidature unique seulement. Ce qui doit nous allumer aujourd’hui et avant tout, c’est bien de reconnaître que l’opposition est nouvelle au Togo, faire ressortir de ces caractéristiques nouvelles et palpables et agir en conséquence… Comprenons enfin : « Rien n’est permanent, sauf le changement »… Rignin disait aussi l’autre autant que Chafou le Terrible, le seul et unique chef, le Conducator colérique du peuple des Bamounas qui assénait aussi souvent que possible Rignin!
Ceci est mon coup de boule, mon coup de gueule à un texte à responsabilité limité que je viens de lire; prenez-en tous votre part et laissez à César ce qui lui appartient, quel que soit ce César. Mais débarrassons-nous de la confusion facile.