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Candidats à L’APG, globalement vôtres
Publié le mardi 19 aout 2014  |  icilome


© Autre presse par DR
Le président Faure Gnassingbé à Dapaong pour offrir du matériel agricole aux populations
Samedi 17 mai 2014. Dapaong. Le président Faure Gnassingbé offre du matériel agricole aux populations


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Togo - Voilà. Le principe est en fait le même : un semblant de consensus qui garantisse la pérennité du pouvoir Gnassingbé, enrobé dans un discours d’apaisement, de nécessité de la concorde nationale…


L’APG de 2006 n’est ni le premier, ni peut-être le dernier sauf si… On disait qu’il y avait crise. Or, n’y a-t-il jamais eu crise au Togo, avant celle qui avait conduit à l’APG ? Tout le problème est que, selon qu’on regarde les choses du côté du pouvoir ou du côté du peuple, la notion de crise n’a pas le même sens. Pour l’opposition, je serais assez prudent. Pour le pouvoir, la crise, c’est surtout quand les rênes lui semblent s’échapper des mains. C’est pour cela que vous entendrez presque toujours les tenants du pouvoir déclarer, surtout quand tout semble bien aller pour eux qu’il n’y a pas de crise au Togo. Mais quand ils se sentent menacés, ils reconnaissent qu’il y a crise. Et alors il leur faut trouver des hommes, des moyens pour les aider à se maintenir en place. Pour le peuple, évidemment, il y a crise quand l’harmonie est brisée entre lui et l’équipe qui le dirige, quand il ne sait pas où il va…pire, quand ceux qui sont censés le protéger, le gouverner…ne respirent que la menace de le massacrer, parce que précisément ils perdent ou ont peur de perdre le contrôle du pouvoir. Si on me demande comment et par qui la crise se déclenche, je répondrai : de deux manières, deux sources, mais plus particulièrement d’une source et d’une manière. La deuxième manière et deuxième source, rare, mais qui se produit quand même, étant un soulèvement assez important du peuple. La première source et la première manière par lesquelles la crise arrive, c’est évidemment celles que constitue le pouvoir lui-même quand sa volonté de se maintenir à tout prix l’amène à opérer coups d’État et coups de force, à provoquer la colère du peuple. En ce sens on peut dire que la crise existe depuis le 13 janvier 1963, et que la première version de l’APG , la version originale, si l’on peut dire est la création du RPT en 1969 : dès lors, que l’on appelle la chose « creuset national », APG ou d’un autre nom, le contenu est le même, c’est-à-dire absence de contenu réel, avec, qu’on le reconnaisse explicitement ou tacitement, une seule constante : que le pouvoir Gnassingbé soit et reste en place. D'où vient donc que certains politiciens togolais, notamment les dupés de l'APG 2006, continuent de s'y référer et de réclamer son application?

Si j’ai fait d' assez près l'expérience d’une forme d’APG, c’est celle du « Nouveau Contrat social » rédigé par Koffigoh après sa capture par l’armée au bout du sanglant événement du 28 novembre au 3 décembre 1991, le plus effroyable et le plus meurtrier de cette période. Ce « contrat social », ainsi que la liste proposée des membres du gouvernement devait être adopté ou rejeté en bloc par le Haut Conseil de la République. Déjà, le matin, en petits groupes, avant l'ouverture officielle de la séance, alors que nous étudiions le texte, des rumeurs menaçantes circulaient et nous prévenaient que si nous sortions de la salle sans accord sur les propositions du premier ministre et sans l’investiture d'un gouvernement, les militaires étaient prêts à prendre le pouvoir par un coup d'État, pour cinq ans au moins. Quelle était la source de ces rumeurs? Toujours est-il que Koffigoh viendra confirmer lui-même l'ultimatum. Certainement, il était lui aussi sous pression et ne remplissait qu'une fonction de caisse de résonance de la source de la menace. Et cela l’arrangeait aussi, puisque c’était pour lui le seul moyen de ne pas perdre son poste. Sa complicité avec Eyadema était devenue objective et nécessaire. Dès lors, la discussion article par article, même si elle avait été autorisée et avait été faite, n’avait pas vraiment de sens. Mais, le problème n’est pas là. La question essentielle est de savoir s’il y avait vraiment contrat, qui étaient les parties contractantes. Le vrai contrat aurait été entre le pouvoir et le peuple, dont les représentants étaient supposés être les membres du parlement de transition. J’incline à croire que s’il y a contrat, le vrai texte dudit contrat n’est jamais rendu public et qu’il est le même : le clan Gnassingbé veut le pouvoir, un pouvoir qui risquerait de tomber sans le soutien de certains hommes et ces hommes-là conviennent avec lui de le lui assurer, moyennant des récompenses ( de quelles natures ?)
J'étais aussi au HCR, dans ses heures de gloire, au moment du débat sur la dissolution du RPT, parti unique. Tout comme les autres grands ténors du parlement transitoire, Agboyibo, Zarifou Ayéva... Edem Kodjo avait tenu un brillant discours que je n’avais pas hésité à applaudir. La chute, très belle était, était à peu de chose près ceci : « En tant que Secrétaire-Général fondateur, je déclare la fin du RPT... ». Pourquoi avais-je applaudi? Je ne doutais pas de la sincérité de l'ancien Secrétaire Général et je pensais qu'il reconnaissait que ce parti avait fait son temps, avait nui à beaucoup de Togolais, notamment en confisquant les libertés, en envoyant à la torture, à la mort ou à l’exil de nombreux citoyens, en retardant le développement du pays. Au cours du débat, les plus conciliants proposaient aux représentants du RPT ( dont Dahuku Péré) présents de changer juste de nom , mais ils s'obstinaient à conserver leur parti avec l'ancien nom. Et vous savez que cette dissolution avait coûté la vie à des dizaines de Togolais, les militaires s'étant rués sur la ville aussitôt la loi votée. Avec le recul du temps, on peut se demander aujourd'hui si, le jour de la dissolution, les gens comme Kodjo étaient bien inspirés, surtout ce dernier? S'il était conscient de condamner, non pas une dénomination, ni les idéaux affichés par ce parti, encore moins ses membres, mais un système dont le fondement même était ( il l’est encore) la conservation du pouvoir par tous les moyens, fondement incompatible avec l'existence de la démocratie. Que le même Kodjo ait renoué avec le parti et le système RPT sous le prétexte que sa formation, alors UTD était un parti charnière afin de pouvoir s'installer dans le fauteuil de premier ministre ou que sans l'argument du parti charnière, il soit redevenu premier ministre de Gnassingbé fils après un autre massacre de population, il n'a fait que convertir son « APG » à lui ou si on veut, renouveler son contrat du RPT, contrat fondateur du système.

Il faut rappeler ceci : à la veille de la Conférence Nationale, c’est-à-dire au lendemain de la révolte populaire du 5 octobre ( il y avait crise et personne ne pouvait le nier ), Kodjo était rentré au pays avec en poche son « APG » (ou sa nouvelle édition du RPT) qu’il avait baptisé « le Grand Pardon ». Non qu’il ait en fait inventé la formule, puisque c’est une pratique biblique, le Yom Kippour des Israélites. La différence est peut-être qu’il n’aurait pas été prêt à exiger du premier magistrat d’alors, Eyadema, de confesser ses propres péchés afin d’obtenir le pardon de ses concitoyens qu’il avait offensés et de Dieu, s’il y croyait réellement. C'est ainsi que l'on procède dans le Grand Pardon biblique. Que se serait-il passé si la pression populaire réclamant la Conférence Nationale et rien d’autre, n’avait pas été plus forte que la volonté d’Eyadema et si celui-ci avait demandé à Kodjo de former un gouvernement pour mettre en application son « Grand Pardon » ?

C'est en considérant des cas comme celui de Kodjo, que je voudrais être prudent quand certaines personnes se réclamant de l'opposition parlent de la crise. Elles peuvent n'en parler que comme candidats secrets à l'APG, c'est-à-dire des personnes, certes très intelligentes, capables de tenir un discours prônant démocratie, alternance, apaisement, réconciliation, développement, mais cachant le contrat qu'on ne nomme pas, passé avec le système ou qu'elles s'apprêtent à passer avec lui, de ne pas le remettre vraiment en cause. Quelquefois ce discours n'est qu'un acte de candidature à « l'APG »en attendant, lorsque la candidature serait retenue, de changer de discours et de nier la crise. Dans ce sens, combien, d'une manière ou d'une autre, après le rejet des réformes et d'éventuelles protestations populaires que cela peut provoquer, ont déjà fait acte de candidature et combien se préparent à le faire, avant ou après les présidentielles de 2015? Faut-il s'étonner alors que la crise ne connaisse jamais de fin? Non pas du point de vue du pouvoir, non plus de celui d'une catégorie d'opposants, mais du point de vue du peuple togolais.

Sénouvo Agbota ZINSOU

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