Il ne fait pas bon de solliciter un prêt dans une des institutions de microfinance depuis la mise en œuvre du premier produit du Fonds national de la finance inclusive (FNFI) appelé Accès des pauvres aux services financiers (APSEF). Les délais de traitement des dossiers ont été multipliés avec une priorité donnée aux candidates à l’APSEF. Et le risque est grand que d’anciens clients frustrés ne décident de quitter les institutions qui ont été retenues pour conduire ce produit cher à Victoire Tomégah-Dogbé à quelques mois de l’élection présidentielle de 2015.
D’après des rapports qui nous parviennent des villages où la pauvreté a étalé sa natte à l’abri des regards citadins, la ministre du Développement à la Base, de la Jeunesse, de l’Artisanat et de l’Emploi des jeunes serait considérée comme la solution aux maux qui minent le quotidien du commun des Togolais. Et pour cause, son produit médical, que dis-je, financier ferait tabac au sein des populations qui portent la misère en bandoulière au quotidien. Les esprits fébriles prédisent que l’usage que la ministre fait de ce produit devrait garantir une réélection de Faure Gnassingbé lors de la prochaine présidentielle. Autrement dit, si devant les médias Victoire Tomégah-Dogbé s’efforce de tenir un langage « dépolitisé » par rapport au FNFI, dans le Togo profond, la version servie serait exclusivement destinée à racoler des voix à but électoraliste. Mais des informations font état de ce que le FNFI risque de se retourner contre ses concepteurs.
D’abord, c’est au sujet de la période choisie. Selon des agents d’une institution de microfinance rencontrés à Lomé, la fin du mois d’août devrait rimer avec l’arrêt temporaire de la première vague des bénéficiaires de l’APSEF. Et donc le mois de septembre étant celui de la rentrée scolaire, rien ne garantit à la ministre que ces fonds soient exclusivement utilisés pour des activités commerciales. L’achat et la confection de tenues scolaires aux élèves de même que leurs fournitures étant souvent un casse-tête pour la plupart des parents, il ne sera pas impossible de voir beaucoup d’entre eux qui auront bénéficié de ce prêt l’utiliser pour garantir la rentrée scolaire à leur progéniture. Et dans ce cas, les six mois impartis pour le remboursement avec les intérêts risquent de passer comme un éclair sans que la majorité s’acquitte du remboursement. Demanderait-on aux insolvables de se « fondre » dans un parti politique connu de tous pour recevoir l’absolution ?
Des grincements de dents se font entendre parmi les clients fidèles des institutions de microfinance. C’est d’abord à l’agence Wages du quartier Limousine, puis celle d’Agoè que des clients ayant déposé leurs dossiers pour des prêts, ont attendu plus d’un mois avant de se voir servir alors que dans les principes de cette structure de microfinance, une semaine suffisait pour servir les clients. Une autre cliente ayant demandé un prêt à l’agence de Hédzranawé a aussi attendu un mois avant d’être satisfaite hier. Et selon ses propos, le risque est grand qu’elle n’honore pas ses engagements et que sa caution soit obligée de la soutenir. « J’ai fait une demande de prêt pour approvisionner ma mercerie pour la rentrée scolaire qui débute dans un peu plus mois, mais avec le retard accusé par cette agence, je ne sais pas comment je pourrais honorer mes engagements sans recourir à l’aide de ma caution. Cela fait des semaines que des parents viennent demander des types de tenues scolaires que je n’avais pas à ma disposition.
Mais ils ne se souviendront plus avoir traîné les pas avant de m’octroyer ce crédit lorsque viendront les échéances de remboursement. Ils ont préféré satisfaire celles qui aspirent aux prêts du FNFI, cet instrument de propagande, avant nous autres qui sommes leurs clientes fidèles depuis des années », s’est-elle plainte.
Dans un autre registre, il ressort que la politique adoptée par les concepteurs de l’APSEF ne permet pas aux institutions de microfinance de broncher, même si après réflexion, les responsables réalisent qu’ils ont plus à perdre qu’à gagner. Car un client qui emprunte par exemple 1.000.000 FCFA remboursable en six mois, est plus profitable que trente autres à qui on prête 30.000 FCFA chacun, remboursables dans la même durée. Mais combien de responsables ont-ils le courage de dénoncer cette réalité ?
Aujourd’hui, le régime, pour avoir été mis à nu dans le passé avec son histoire de NAFA, a choisi de procéder en douceur tout en étant aussi pernicieux. Et la « Pnudienne » a jugé plus subtil de faire avaler la pilule de la propagande du parti au pouvoir en mettant à contribution les institutions de microfinance. Mais le résultat n’en demeure pas moins efficace. Il est certain que si la ministre Tomégah-Dogbé n’avait aucun intérêt à tirer en faveur de Faure Gnassingbé, elle ne parcourrait pas monts et vallons pour convaincre les masses les plus démunies à adhérer à ce système, abandonnant la vingtaine de projets chers à elle –Provonat, Psaej, Faej et autres. Et le chef de l’Etat ne la laisserait pas marcher sur les plates bandes d’autres ministres.