Le Togo constitue l’une des veilles dictatures rampantes de la sous-région ouest-africaine incarnée par la dynastie Gnassingbé. Depuis un demi-siècle, de père en fils, le Togo est régenté par ce régime militaro-clanique. Comme toute dictature, celle incarnée aujourd’hui par Faure Gnassingbé commence par présenter des signes de son déclin.
Peu à peu, les éminences grises du pouvoir de l’enfant de Eyadèma quittent la scène la queue entre les jambes : Kpatcha Gnassingbé, Assani Tidjani, Mohamed Atcha Titikpina hier, Pascal Bodjona, Jonathan Fiawoo, Alexis Aquereburu aujourd’hui. Tous ces sicaires à un moment où à un autre, ont joué leur partition pour maintenir en vie la dictature implacable du président du RPT hier, UNIR aujourd’hui. Tous ont connu des fortunes diverses surtout les plus fâcheuses. Les plus heureux d’entre eux sont inculpés mais en liberté provisoire. Pour d’autres, ils sont carrément passés de vie à trépas.
Kpatcha, Tidjani, Titipinna, des rayons solaires aux ténèbres
Le trio infernal aux premières heures de l’imposition de Faure aux Togolais en 2005, étaient aux avant-postes pour des missions lugubres et sanguinaires. Kpatcha Gnassingbé étaient aux côtés des officiers qui ont installé Faure dans le fauteuil présidentiel au décès de Eyadèma le 05 février 2005. Il était dans tous les coups pour les répressions sanglantes d’avril 2005. A un moment donné, il apparaît même comme le Vice-Président du Togo. Mais fatalement, dans la nuit du 12 au 13 avril 2009, c’étaient avec des armes lourdes et des missiles que son domicile privé a été attaqué par un bataillon sous les ordres du Général Félix Katanga (colonel à l’époque). Motif : le demi-frère du chef de l’Etat est soupçonné de tentative d’atteinte à la Sûreté de l’Etat. Depuis lors, l’ancien ministre de la Défense est écroué à la Prison civile de Lomé. Le Général Assani Tidjani qui a aussi perpétré des massacres dans les Lacs depuis un hélicoptère pour arracher le silence des populations face aux fraudes électorales en vue d’assurer l’éternité du pouvoir des Gnassingbé, n’a pas connu meilleur sort. Il a été accusé d’être complice de Kpatcha Gnassingbé.
Tout comme Kpatcha, l’ancien chef d’Etat-Major des FAT a été condamné à 20 ans de prison ferme. Avec une santé chancelante à l’époque, le tout-puissant Tidjani est allé mourir dans un hôpital de France et enterré sur sa demande au Nigeria, loin du Togo qu’il a servi du père en fils.
Tout à côté du regretté Tidjani, se trouve un certain Mohamed Atcha Titikpina. Ancien garde rapproché de Faure à la mort de Eyadèma, l’ex-colonel devenu Général est passé des rayons lumineux aux ténèbres depuis plus d’un an déjà. Déchu de la tête de l’Etat-Major Général des FAT, le Général Titikpina serait carrément en résidence surveillée. Eloigné du pouvoir qu’il a servi avec zèle et excès, le Général de Tchamba n’a que le temps pour remémorer ses exactions et violences gratuites au profit de Faure.
Ce trio de serviteurs zélés avalés par la dictature cache un autre trio dont la chute fracassante est d’actualité.
Bodjona, Fiawoo, Aquereburu confirment le déclin de la dictature
Principal artisan de la fausse victoire de Faure Gnassingbé en 2010, Pascal Bodjona est retourné en prison depuis le 21 août dernier pour une affaire d’escroquerie d’un Emirati. Depuis 2005, l’ancien Directeur de Cabinet de la Présidence de la République était l’homme à tout faire de Faure Gnassingbé. Le summum a été atteint en 2010 où le fils de Kouméa a dû utiliser les grands moyens (sic) notamment le sabotage du VSAT et la falsification des procès-verbaux du scrutin à bord d’un hélicoptère bourré d’argent pour sauver le fauteuil de son ami et frère Kabyè. Dans toute dictature, chacun s’emploie pour apparaître l’homme de confiance du gourou dictateur. A ce niveau justement, on se permet certains écarts ou des gestes qui fâchent parfois le gourou qui seul décide du sort de chacun. Sans sourciller, Faure a envoyé son ami de longue date à la Prison civile de Tsévié en attendant le procès. D’autres fidèles du régime attendent aussi leur procès pour se situer. Il s’agit du tandem Jonathan Fiawoo et Alexis Aquereburu. Les deux inconditionnels soutiens du chef de l’Etat sont inculpés dans l’affaire de détournement de 2,6 milliards FCFA d’Ecobank.
Le Président de la Chambre du Commerce et d’Industrie du Togo (CCIT) Jonathan Fiawoo est inculpé et déposé à la Gendarmerie Nationale depuis la semaine dernière. Pourtant, il était le principal artisan des deux sièges du parti UNIR dans le Zio lors des législatives du 25 juillet 2013. Originaire de la préfecture du Zio, il était l’ordonnateur des achats de consciences en masse de ses frères et sœurs pour arracher deux (2) des quatre (4) sièges de Zio et par sa fortune, ce qui ne s’est jamais passé. Mais le tout-puissant Fiawoo qui se prend pour l’homme du pouvoir est désormais privé de liberté jusqu’à nouvel ordre. Dans cette même affaire, son compagnon de toujours, Me Aquereburu est aussi inculpé pour tentative de corruption d’un magistrat. Le célèbre avocat et ami personnel de Faure Gnassingbé aurait approché un magistrat avec une manne importante pour plaider la justice à la faveur de son Président de la CCIT Fiawoo.
Pourtant, l’homme ne cache pas son amitié de longue date avec Faure et a beaucoup œuvré pour arracher un siège de député à UNIR dans les Lacs, fief de l’opposition. Il est le principal avocat de l’Etat togolais qui défend à l’interne comme à l’international, les dossiers même les plus pourris. Toute analyse faite, la barque de Faure se vite. Quel que soit le cas de figure, Faure Gnassingbé a plus que besoin de Kpatcha, Tidjani, Titikpina, Bodjona, Fiawoo et Aquereburu pour 2015. Mais les principes de la dictature étant inévitables, toutes ces figures sont éloignées du pouvoir. N’est-ce pas une preuve de plus du déclin d’une dictature, vieille d’un demi-siècle ?