- L’ancien gardien de but des Eperviers du Togo, Dodo Kodjovi Obilalé, grièvement blessé le 8 janvier 2010 dans l’attaque rebelle essuyée par le convoi des Eperviers à Kabinda en Angola à quelques jours de leur premier match de la coupe d’Afrique des Nations (CAN), est à Lomé depuis quelques jours.
Sans tabous, il se confie dans un entretien exclusif à l’Agence de presse Afreepress sur son état de santé, ses rapports présents aussi bien avec la Fédération Togolaise de Football (FTF) et le gouvernement togolais, en l’occurrence le chef de l’Etat, Faure Gnassingbé.
Cet ancien Epervier qui a été témoin oculaire de la défaite de l’équipe nationale togolaise contre les Black Stars propose sa « thérapie » pour le football togolais.
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Afreepress.info : Bonjour Kodjovi Obilalé. Sans trop d’émotion et complaisance, pouvez-vous nous rappeler ce grave incident de kabinda en Angola le 8 janvier 2010 qui vous a arraché des pelouses?
Kodjovi Obilalé : Je vais juste faire un petit résumé. Je pense que ça a fait le tour du monde et c’est même passé au Togo. On était en stage à Congo Brazzaville, on a pris le bus pour l’Angola. Après la frontière, il y a eu des coups de feu, j’étais touché, d’autres aussi comme Stane Ocloo, le coach adjoint Amélété Abalo. Tout le monde a été évacué à l’hôpital d’Angola et moi j’étais évacué à Joanesbourg après en avion.
Afreepress.info : De quoi souffrez-vous exactement aujourd’hui?
Kodjovi Obilalé : Aujourd’hui j’ai une paraplégie incomplète de la jambe droite, ce qui veut dire que j’ai une partie qui a une sensibilté et l’autre partie qui est à moitié morte. ça s’appelle une paraplégie incomplète. J’ai des douleurs fréquentes, ce qui m’amène aux prises de cachets, aux traitements, aux séances de reéducation. Aujourd’hui, je suis un peu en congé et j’ai décidé de rentrer à Lomé pour prendre un peu du soleil.
Afreepress.info : Outre ce désir de prendre du soleil, ce retour ne cache t-il pas d’autres projets?
Kodjovi Obilalé : C’est pour me ressourcer surtout, voir ma famille, me désangoisser, déstresser un peu, voir surtout aussi les gens qui m’ont aidé sur mon lit d’hôpital, les gens qui ont participé à ma reéducation, ceux qui m’ont aidé à me relever du fauteuil, les gens qui ont investi et qui ont cru en moi et qui m’ont fait sortir de cette souffrance et les remercier. A l’ensemble du peuple togolais et surtout aux journalistes, je leur dit merci.
Afreepress.info : Vous confirmez aujourd’hui que vous ne pouvez plus retourner sur le terrain?
Kodjovi Obilalé : Je confirme et ça c’est une décision personnelle. Même s’il s’avérait que je peux rejouer au football, ce sera avec mes enfants parce que le football reste toujours ma passion mais je m’écarte de ce milieu qui aujourd’hui pour moi, restera quelque chose d’inoubliable. Il se peut que je me contredise, mais du foot, vraiment, c’est quelque chose qui ne me dit plus rien.
Afreepress.info : Même si la FTF vous sollicite après votre rétablissement total !
Kodjovi Obilalé : Non, je dirai non parce que plus jamais ça. Je ne pense pas que je vais répondre à cet appel de la fédération, même si on me propose le paradis.
Afreepress.info : Dites-nous, M. Obilalé, quels sont vos rapports avec la FTF?
Kodjovi Obilalé : Je n’ai pas de rapport avec la fédération et ça fait quatre (4) ans je n’ai pas de nouvelle de la fédération. Je le confirme je ne vais pas vous le cacher et je ne veux pas me leurrer. C’est quelque chose qui me hante à chaque fois que j’y pense. Sans citer de noms, il m’arrive de saluer les gens de la fédération sans qu’ils ne sachent qui je suis. C’est très aberrant et triste pour une fédération.
Afreepress.info : Quelles sont vos relations avec le gouvernement togolais ? Vous a-t-il apporté des soutiens dans les périodes critiques?
Kodjovi Obilalé : Je suis en bonne condition avec le Chef de l’Etat et ça se passe super bien. Il a porté toujours main forte à mes demandes. Grâce à lui, j’ai eu une formation et je fais mes petits projets. Je ne vais pas trop en parler puisqu’on dit fait ton projet en silence et le succès se chargera du reste. Alors j’attends plus et c’est quelque chose de très enrichissant.
Afreepress.info : Les jeunes Togolais qui vous admirent malgré tout veulent emboîter vos pas. Quels conseils vous leur prodiguez?
Kodjovi Obilalé : Je leur souhaite beaucoup de courage déjà. Il faut qu’ils se préparent psychologiquement pour affronter les difficultés parce que ce n’est pas facile et surtout lorsqu’on se retrouve dans mon état. Mais je ne peux pas conseiller à un joueur de ne pas jouer pour son pays parce qu’il faut être patriote. Si je l’avais fait, c’est en tant que patriote et aujourd’hui, tout ce que je dis c’est via mon expérience. ça ne me dis plus rien de jouer au foot.
Afreepress.info : Vous avez suivi le match qui a opposé le Togo au Ghana mercredi dernier, quelles sont vos impressions?
Kodjovi Obilalé : Il y a beaucoup de choses à revoir surtout du côté de la fédération. Ensuite, il faut éviter de faire de la sélection quelque chose de familial car on ne pourra pas avancer comme cela. J’ai été regardé le match, je n’ai pas de mots, je n’ai pas grand’ chose à dire. J’ai fait ce métier pendant des années et ça peut m’arriver aussi. Mais j’invite aussi les dirigeants du foot surtout à revoir le système de jeu surtout la charnière centrale.
Afreepress.info : Quel avenir pour le football togolais?
Kodjovi Obilalé : Auourd’hui le fooball togolais est à la ramasse. De toute façon, ils peuvent le prendre autrement mais c’est ce que j’ai constaté. Il n’y a pas un suivi, ils mettent l’argent devant avant de penser à l’humain. Parce que ce qu’ils oublient c’est que c’est l’humain qui fait rentrer les sous. Il faut que tout ça s’arrête.Il y a plein de joueurs, qui d’ailleurs sont très intelligents, il faut mettre les gens qui ont déjà fait ce métier de footballeur et qui ont déjà galéré, il faut les prendre et les entourer d’un bon président de fédération pour faire rêver le public.
Afreepress.info : Votre mot de fin à l’endroit du peuple togolais.
Kodjovi Obilalé : Merci au public pour son soutien. Je lui également de ne pas lâcher les affaires, surtout les spectateurs de ne pas se décourager, de supporter l’équipe nationale. Cette équipe restera toujours la nôtre. Il ne faut pas envenimer toujours les choses au niveau de la fédération mais prêter mains fortes aux joueurs aussi.