A l’approche des échéances électorales, les manœuvres visant à intimider les militants de l’opposition reprennent. Des faits de harcèlement se font de plus en
plus récurrents dans le nord du pays comme à Dankpen où des militants du
pouvoir organisent des tournées visant à démobiliser les populations et
faire resurgir le spectre des violences, en cas de défaite de Faure
Gnassingbé.
La présidentielle de 2015, c’est dans
quelques mois et les membres des instances devant assurer la régularité
du scrutin, notamment la Cour constitutionnelle et la Commission
électorale nationale indépendante (Céni) viennent d’être désignés. Les
esprits se préparent donc pour les joutes électorales qui constituent un
événement majeur pour le pays. Si dans la
capitale et ses banlieues, les partis politiques et leurs militants
exercent dans une certaine liberté leurs activités, dans les régions du
nord du pays, la situation est tout autre. Les militants de l’opposition
et leurs leaders sont constamment harcelés.
On se rappelle encore les menaces dont a
été victime le député Targone Sambiri dans sa circonscription
électorale de Dankpen et les accusations portées contre lui par le
préfet de la localité, Dadja Maganawé. Eh bien ! Les populations de
cette préfecture et des localités environnantes ne sont pas à l’abri des
menaces constantes des partisans du régime Rpt-Unir.
Il ya quelques jours, les responsables
du Parti Démocratique Panafricain (Pdp) devraient distribuer des primes à
leurs délégués. A cet effet, une note d’information avait été déposée à
la préfecture. Le préfet a rappelé les responsables locaux du parti
pour leur faire comprendre qu’ils doivent être suivis par ses hommes
lors de leur rassemblement. Le motif de cette surveillance policière est
que les militants d’opposition raconteraient des choses qu’ils nient
après coup.
Les jours qui ont suivi le dépôt de la
note d’information ont été marqués par des appels téléphoniques
menaçants envers les responsables locaux du parti. « Des gens proches du pouvoir nous ont appelé de Lomé pour nous accuser d’organiser une révolution »,
relate un délégué. Et dans cette série d’accusations, le nom d’un
ancien membre de l’Unir (Union pour la République) aujourd’hui membre du
Pdp, est sans cesse cité. « Ils nous ont dit que nous tenons des
réunions au domicile de l’ancien chef de la délégation spéciale de
Kouka, Mabitché Ngagnima pour préparer une révolution afin d’en finir
avec les gens du pouvoir. Mais la personne indexée n’habite pas la même
ville que nous, et nous ne tenons pas de réunion à son domicile. La
réalité est qu’il y a une volonté du pouvoir de mettre un terme à toutes
les activités des partis de l’opposition », renchérit un militant. Les menaces grandissant, la remise des primes aux délégués n’a pu avoir lieu.
D’après une autre source que nous avons
jointe, le député Targone Sambiri aurait été contacté et son
interlocuteur l’aurait menacé de « se taire s’il ne veut pas retourner en prison ». « Ils
nous intimident pour que nous leur laissions le champ libre en 2015,
mais c’est peine perdue. Nous savons qu’ils sont en perte de vitesse
dans tout le pays », assure-t-il. A l’en croire, comme l’ont d’ailleurs confirmé d’autres natifs du milieu, « la journée de réflexion organisée lors de la fête des ignames était un fiasco, un sanglant revers pour les organisateurs », l’assistance n’atteignant guère une cinquantaine de personnes.
La raison de ce désintéressement des
populations est la transformation de toute initiative communautaire en
propagande électorale au profit du pouvoir. Les déclarations, le décor
et les activités enregistrées au cours de la dernière célébration de
D’pontre, la fête des ignames, ont encore prouvé que le pouvoir fait des
occasions de retrouvailles des communautés, une tribune pour battre
campagne. En effet, il nous revient que la tenue favorite arborée à
l’occasion était les T-shirts et les pagnes à l’effigie du parti au
pouvoir et de son président, Faure Gnassingbé. Les discours tenus ont
été ceux d’allégeance au chef de l’Etat à qui des remerciements ont été
adressés malgré les promesses électorales non tenues jusqu’alors. « La
fête était transformée en une vitrine politique avec des portraits du
chef de l’Etat partout. On l’a même remercié pour ce qu’on n’a pas
obtenu », s’indigne notre source.
Du côté des militants de l’opposition,
l’heure est à la sérénité devant toutes les menaces et les intimidations
dont ils sont victimes. « Nous allons malgré tout, jouir des droits que nous confère la Constitution »,
assure-t-on. Pour faire peur aux populations, des militants du pouvoir
ont sillonné les villages, du 25 au 30 août 2014. Le message adressé aux
paisibles citoyens était que le régime dispose des armes, et que peu
importe l’issue du scrutin présidentiel, Faure Gnassingbé sera maintenu
au pouvoir. « Que vous votiez UNIR ou pas, c’est Faure Gnassingbé qui va diriger le pays », leur a-t-on adressé.
Dans un autre registre, les 130.000 âmes
que compte la localité de Dankpen n’ont pas accès à l’électricité, ni à
l’eau et ne disposent pas d’hôpital. Les populations sont obligées
d’évacuer les malades sur la ville de Sokodé quand de tels cas se
présentent. La possibilité que de tels citoyens sanctionnent le régime
en place, dans les urnes, ne souffre d’aucun doute.