La construction historico-culturelle des sociétés africaines a favorisé l’accord tant dans l’inconscient collectif que dans les structures sociales et politiques, d’une certaine déférence et d’une crédibilité surfaite aux Eglises et à leurs représentants. Avec des fortunes diverses, les représentants des Eglises ont souvent été appelés ou se sont auto-désignés comme médiateurs, « désarmorceurs » dans des crises sur le Continent. Mais malheureusement, attirés par les feux de rampes et dans une quête de promotion personnelle, les « hommes de Dieu » s’aventurent de plus en plus sur des pistes qui risquent au mieux de décrédibiliser les Institutions qu’ils représentent, et au pire, mettre en péril la paix et la stabilité des pays. C’est du moins, ce qu’on peut retenir des nombreuses interventions des Togolais de l’Intérieur et de la Diaspora lors de l’émission Appel sur l’Actualité de RFI du lundi 6 octobre consacrée à la déclaration conjointe de la Conférence des Evêques du Togo, le Bureau Exécutif de l’Eglise Evangélique Presbytérienne du Togo et le Comité Exécutif de l’Eglise Méthodiste du Togo.
Les Togolais se sont prononcés sur l’opportunité de l’intervention et la pertinence du message délivré par le clergé togolais lors de sa dernière sortie.
De l’opportunité de l’intervention
La déclaration des Eglises pourfend le rejet par la Représentation Nationale du Projet de Loi introduit par le Gouvernement au sujet des réformes institutionnelles et constitutionnelles dans le cadre de la mise en œuvre des recommandations de la Commission Vérité Justice et Réconciliation. Cette déclaration intervient malheureusement à moins de 9 mois des prochaines élections présidentielles, à un moment où l’ensemble des acteurs politiques togolais a accepté et intégré la volonté exprimée par le Peuple togolais à travers ses Représentants. Les Etats Majors des partis politiques sont entièrement engagés dans le processus électoral en cours et se préparent à se disputer sur des bases transparentes et équitables les suffrages des électeurs. La plupart des intervenants dans l’Emission de RFI ont de ce fait, à juste titre, conclu de l’inopportunité et du caractère anachronique de la proposition de relance du processus de révision de la Constitution.
De la pertinence du message de l’Eglise
Il est apparu évident pour les intervenants de l’émission que la déception avouée du clergé tient principalement au fait que le rejet des députés signifie la pérennisation de la non-limitation du nombre de mandats présidentiels. Dans leur « indignation », le clergé et ses commanditaires essaient de faire croire au peuple togolais que la limitation du nombre de mandat est un principe fondamental de la démocratie. Et pourtant, les démocraties occidentales (Canada, Belgique, Grande Bretagne, Allemagne…) que mimétiquement, nous prenons pour modèles absolus de démocraties, ne limitent pas le nombre de mandats. Il n’est pas antidémocratique de de penser que pour la pérennisation des actions de développement, il faille maintenir des régimes dans la durée, pour peu que, des élections libres et transparentes soient périodiquement organisées afin de s’assurer du renouvellement de la confiance du peuple.
La vraie question restée sans réponse et que se posent bon nombre de Togolais anonymes est celle de savoir pour qui roulent ces trois églises. Le peuple a du mal à croire en l’innocence de cette démarche, à tout point de vue, conflictogène et nocive à la paix et à la stabilité que les hommes d’Eglise sont pourtant censés plus que quiconque défendre et préserver. En attendant d’élucider ce mystère, le peuple invite l’Eglise à plus de neutralité et à accompagner les actions de la classe politique dans son ensemble pour enraciner la démocratie et la paix.