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Présidentielle 2015/Yotroféï Massina à la Gendarmerie : Faure Gnassingbé opte pour la force et se tient prêt à…TOUT!
Publié le mercredi 15 octobre 2014  |  Liberté


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Faure Gnassingbé


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C’est l’information de la fin de semaine dernière. Yotroféï Massina à la direction générale de la Gendarmerie nationale. Ainsi en a décidé Faure Gnassingbé, entre autres nominations dans la haute hiérarchie des Forces armées togolaises (Fat), en marge d’un Conseil des ministres tenu jeudi 09 octobre dernier. Un choix vécu par les défenseurs des droits de l’Homme comme un scandale, au regard de la carte de visite de l’homme. Au-delà d’une simple nomination, c’est un message que voudrait passer Faure Gnassingbé, dans le cadre de la prochaine élection présidentielle.

Un Conseil des ministres, des décisions, un scandale


Cela faisait plus de deux mois qu’un Conseil des ministres n’avait pas été tenu. Il a donc plu à Faure Gnassingbé d’en organiser un ce jeudi 09 octobre. Le commun des Togolais s’attendait peut-être à voir le Conseil débattre des questions sociales relevant de l’urgence comme les inondations, le virus Ebola, la sécurité routière (accidents et morts sur les routes togolaises), le braquage de l’aéroport.

Mais ce sont plutôt la refondation de l’armée et l’élection présidentielle de 2015 qui ont monopolisé l’attention de l’Exécutif, entre autres sujets évoqués dont l’organisation judiciaire, la modernisation de l’action publique de l’Etat en faveur de l’économie. D’importantes décisions ont été prises, des plus normales aux plus curieuses.


Relativement au scrutin de 2015, on retiendra que la Force sécurité élection présidentielle de 2015 (Fosep) a été officiellement créée. Selon le communiqué officiel, elle est « chargée de la sécurité du processus électoral sur toute l’étendue du territoire national » et « prendra toutes les mesures nécessaires pour maintenir l’ordre public avant, pendant et après les opérations de vote ».


S’agissant de la refondation de l’armée, la nouvelle organisation militaire a été actée par l’adoption d’un projet de décret visant à « asseoir toutes les mesures et actions relatives à cette refondation sur une base juridique appropriée », lequel prévoit à cet effet « un aménagement de la chaîne de commandement opérationnel ainsi que des formations propices au renforcement de la sécurité à l’intérieur du territoire national et à nos frontières ».


« Dans le nouveau maillage des forces de défense et de sécurité, les Forces armées togolaises et la Gendarmerie nationale rapprocheront leur structures, en raison de deux régions militaires et deux régions de Gendarmerie, subdivisées chacune en cinq secteurs », indique le communiqué. Et dans cette dynamique, c’est un chamboulement qui est intervenu à la tête des Fat. Il a été procédé à une bonne dizaine de nominations rapportées déjà dans notre parution de vendredi. Mais une sort du lot et suscite scandale : le parachutage de Yotroféï Massina à la tête de la Gendarmerie nationale.


Un tortionnaire à la tête de la Gendarmerie


C’est ainsi qu’il urge d’apprécier simplement cette nomination du Colonel Yotroféï Massina à la tête de la Gendarmerie nationale. Un scandale aux yeux des défenseurs des droits de l’Homme, mais aussi des partis politiques, et les réactions de condamnation ne devraient pas tarder en ce début de semaine. A raison, car il s’agit d’un homme de triste réputation.


«L’homme a une allure assez brève, à la limite anodine avec une balafre oblique sur chaque joue, mais particulièrement venimeux au sens plein du terme. Il lui arrive parfois d’afficher un sourire narquois à l’approche des gens, donnant ainsi l’impression, sans doute fausse, d’un homme courtois ou même naïf.

Que personne ne blague avec cet officier originaire de la Binah ou plus précisément du Bénin dont les parents ont fait un saut vers le Togo avant de l’y mettre au monde. Il a une tête relativement petite, mais vraiment pleine…bien sûr d’idées noires et pernicieuses », tel est le portrait que dresse de lui le confrère togoinfos, et à juste titre. Il s’agit de l’ancien patron de l’Agence nationale de renseignement (Anr), ou plutôt de torture. Car c’est dans ce domaine que ce service placé sous l’autorité directe du locataire du palais de la Marina s’est illustré, avec un homme à la manette : Yotroféï Massina. Et la seule évocation de son nom entraîne la chair de poule et ressuscite de bien mauvais souvenirs chez ses anciennes victimes.

La torture et les traitements inhumains et dégradants étaient pratiqués dans ce lieu lugubre depuis des temps, mais c’est le cas Bertin Agba qui les aura révélés au grand jour. Le DG d’OPS Sécurité arrêté en mars 2011 dans l’affaire d’escroquerie internationale, a été soumis à bien de traitements cruels dans les locaux de l’Anr, menotté jusque sur le lit d’hôpital.


Son dossier a permis de connaitre les différentes formes de torture pratiquées dans ce lieu : privation de nourriture durant plusieurs jours, exposition et regard tourné au soleil, bruit assourdissant la nuit pour empêcher les pensionnaires de dormir, supplice de l’eau glacée sur le corps en pleine nuit, ligotage des détenus la tête en bas…On se rappelle qu’à l’époque, des organisations de défense des droits de l’Homme s’étaient même proposé de visiter les détenus dans les cellules ; mais elles avaient eu droit à une fin de non recevoir. Le richissime homme d’affaires togolais révèlera plus tard les différentes formes de torture qui étaient pratiquées sur lui à l’Anr.


C’est l’affaire d’atteinte à la sureté de l’Etat qui aura été la consécration de la torture. Si les informations s’ébruitaient depuis leur arrestation en avril 2009 et leur détention dans les locaux de l’Anr, c’est surtout le procès en septembre 2011 qui aura permis à l’opinion d’en avoir la confirmation, par le témoignage vivant des coaccusés de Kpatcha Gnassingbé. Adjinon Lambert, Efoé Sassou Sassouvi, Seydou Ougbakiti, Casimir Dontéma…ils étaient nombreux à témoigner à la barre des tortures subies et citer Yotroféï Massina et bien d’autres noms. Certains étaient allés jusqu’à le qualifier de « démon », à cause du plaisir qu’il éprouvait à faire souffrir les détenus. Saisie au forceps, la Commission nationale des droits de l’Homme (Cndh) a fini par confirmer les allégations de torture, dans son rapport rendu public en février 2012. Un document qui a été traficoté dans un premier temps par les « sécurocrates ». L’ex-patron de l’Anr s’est illustré dans bien d’autres dossiers.


La banalisation de la torture par Massina avait poussé les organisations de défense des droits de l’Homme à monter au créneau et requérir son limogeage et même la fermeture de l’Anr. Mais pour toute réponse, Faure Gnassingbé l’a juste enlevé un temps de la tête de l’Agence et placé dans un petit bureau à la Gendarmerie, histoire de l’arracher des regards indiscrets. Après un temps qu’on dit avoir passé pour une formation au Maroc, il est revenu au pays. Au-delà d’être un as de la torture, l’homme, c’est aussi la saisie arbitraire des fonds des commerçants, les écoutes téléphoniques illégales…Bref, tout ce qu’il y a de détestable.


Faure Gnassingbé opte pour la force


A quoi joue Faure Gnassingbé ? C’est la question qu’il urge de se poser devant ce choix de parachuter un homme d’aussi sinistre réputation à la tête de la Gendarmerie, à un moment aussi crucial que celui de l’élection présidentielle de 2015, et son faible pour lui. Faut-il le rappeler, revenu au pays après sa pseudo-formation à l’étranger, Yotroféï Massina a semblé avoir retrouvé son poste à la tête de l’Anr.


Ce qui a suscité en juillet dernier une levée de bouclier des organisations de défense des droits de l’Homme. « Ce retour condamnable du personnage à l’Anr est incontestablement révélateur de la duplicité murie dont fait preuve le Chef de l’Etat togolais », avaient relevé l’Association des victimes de torture au Togo (Asvitto), l’association Ensemble pour les droits de l’Homme (Edh), l’Association togolaise des droits de l’Homme (Atdh) et l’Association togolaise pour la défense et la promotion des droits humains (Atdpdh), et de mettre en garde Faure Gnassingbé contre l’impunité et l’encouragement dont bénéficient certains auteurs convaincus de crimes de violations des droits humains. Comment comprendre alors que le Fils du Père puisse encore parachuter un tel personnage à la tête de la Gendarmerie, un corps plutôt sollicité lors des périodes électorales ?


La Gendarmerie et la Police sont en effet les deux corps qui forment souvent la force spéciale (Fosep ou Fosel) et se chargent le plus de la sécurité et du maintien de l’ordre en ces moments sensibles. Et généralement, c’est le patron de la Gendarmerie qui a toujours pris son commandement. C’est souvent cette force qui est chargée de la répression des contestataires des résultats frauduleux et du hold-up. Justement ,Yotroféï Massina est réputé pour sa méthode forte, son amour pour la force et la violence à l’état brut, c’est quelqu’un qui n’éprouve aucune pitié pour l’homme qu’il n’hésite d’ailleurs pas à torturer. Certains pensent que Faure Gnassingbé l’a parachuté à la tête de la Gendarmerie « pour l’exposer davantage et le pousser très vite vers la sortie, comme il sait si bien le faire ».


Mais pour bien d’observateurs, c’est un message qu’il veut faire passer par cette nomination, celui de l’option de la force. « Faure sait très bien ce qu’il fait. Il semble dire aux opposants et à tous ceux qui seraient tentés de se mettre au travers de son chemin : « Gare à vous, Massina est là et vous le ferez à vos risque et péril. Vous serez proprement matés ». Il se tient donc prêt à tout, vraiment à tout. Ça peut être juste de l’intimidation pour dissuader les détracteurs ; mais il faut craindre vraiment pour ce scrutin…», glose un compatriote. L’option de la force est manifeste, vu que la Fosep, généralement placée sous le commandement du patron de la Gendarmerie, est mise cette fois sous le commandement opérationnel du ministère en charge de la Défense.


Tino Kossi




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