Le président du Sénégal et du Togo sont arrivés mardi à Ouagadougou pour faciliter la sortie de crise au Burkina Faso, où l'armée doit rendre rapidement le pouvoir aux civils après la chute du chef de l'Etat Blaise Compaoré.
Le Sénégalais Macky Sall, tout comme le Togolais Faure Gnassingbé un peu plus tôt, a eu droit à un accueil officiel par l'actuel homme fort du Burkina Faso, le lieutenant-colonel Isaac Zida, à qui les deux présidents ont fait la bise, avant de procéder à une revue des troupes, a constaté un journaliste de l'AFP.
Leur visite, qui n'était pas annoncée lundi soir, se fait au nom de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao).
L'organisation a nommé vendredi M. Sall président d'un groupe de contact pour "faciliter le processus de transition" au Burkina après la chute du président Blaise Compaoré, chassé du pouvoir par la rue après 27 années de règne alors qu'il souhaitait modifier la Constitution pour pouvoir se représenter à la prochaine présidentielle.
Faure Gnassingbé, vainqueur en 2005 et 2010 de scrutins présidentiels aux résultats contestés par l'opposition qui veut l'empêcher de briguer un troisième quinquennat, effectue le déplacement à Ouagadougou pour la Cédéao, a annoncé la présidence togolaise.
L'activité diplomatique est intense dans la capitale burkinabè, où s'était déjà rendu lundi le président en exercice de l'Union africaine (UA), le chef de l'Etat mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz. L'UA avait posé le 3 novembre un ultimatum à l'armée burkinabè pour qu'elle cède sous quinzaine le pouvoir aux civils.
La Cédéao s'est opposée vendredi à des sanctions contre le Burkina, "compte tenu des efforts en cours".
"L'UA n'est pas venue pour vous imposer quoi que ce soit, pour vous menacer de quoi que ce soit", a déclaré M. Aziz, qui a multiplié les messages rassurants lundi, tout en appelant les acteurs de la crise à se dépêcher. "Le temps joue en votre défaveur" et "il joue en défaveur de toute notre organisation", a-t-il lancé devant la presse.
- 'Les discussions avancent doucement' -
Le président de l'UA se serait toutefois montré bien moins conciliant en petit comité, loin des micros. Le délai de l'organisation africaine, qui expire dans six jours, a ainsi été maintenu, a-t-on appris de source diplomatique.
Le temps presse donc pour les protagonistes de la crise burkinabè. Un pas important a été franchi lundi, quand opposition et société civile ont transmis à l'armée un projet de "Charte de la transition" - une constitution intérimaire, sur laquelle elles se s'étaient mises d'accord dimanche après de laborieuses discussions.
Ce texte, qui régit la structure et le fonctionnement des futures autorités de transition, prévoit notamment un président civil, un gouvernement de 25 ministres et une Assemblée de transition de 90 députés.
Mais les militaires, qui ont fait leurs propres propositions, doivent désormais en discuter, avant d'élaborer un document de synthèse définitif. Seuls 10 sièges de députés leur sont accordés dans le projet de Charte leur ayant été transmis.
"Les discussions avancent doucement mais elles avancent", a remarqué Abdoulaye Sama, un constitutionnaliste burkinabè, qui attend "les commentaires de l'armée sur la charte."
Le texte devrait être "finalisé" "incessamment sous peu avec les militaires", a estimé Siaka Coulibaly, un politologue qui faisait partie de la délégation de la société civile reçue lundi par le président de l'UA.
"C'était prévu (lundi) mais le départ tardif de M. Aziz a amené un report", a-t-il fait savoir à l'AFP, regrettant "les changements de calendrier" provoqués par les visites officielles.
Les autorités militaires sont "en train de s'activer pour convoquer des assises en vue d'arrêter le scénario" de sortie de crise, a estimé lundi Bénéwendé Sankara, un leader de l'opposition, qui a requis de la "flexibilité" de la part de l'Union africaine.
Une fois un accord trouvé se posera le choix, très délicat, du président de la transition.
Le nom de l'archevêque de Bobo-Dioulasso (sud, deuxième ville du pays), Mgr Paul Ouédraogo, qui semblait recueillir l'assentiment général, a été écarté en raison de réticences de la hiérarchie catholique, selon Jonas Hien, un responsable de la société civile.
Les protagonistes ne s'avançaient pas sur d'autres noms.