Décidément, cela devient difficile et très compliqué de défendre la cause du Prince-héritier du Togo.
Dimanche, Gilbert Bawara, le ministre de l’administration territoriale était sur une chaîne de télévision privée à Lomé.
La question du processus électoral était à l’ordre du jour ainsi que l’épineux sujet des réformes politiques au Togo avant la présidentielle de 2015. Pendant une heure et demi, le jeune ministre de Siou s’est démené grave sans pour autant réussir à anoblir l’image de son Chef.
Premier bouleversement, la question de la transparence de l’élection qui constitue la condition première pour que les partenaires accompagnent le processus.
L’homme a perdu ses mots pendant une quinzaine de seconde avant de finir par dire un vrai mensonge qui fait croire que le processus en cours était transparent.
Mais justement pourquoi le Togo prend il le risque de financer sur fonds propres l’élection présidentielle à coût de milliards alors que les partenaires sont prêts à y mettre les 80 % des ressources nécessaires pourvu qu’il ait un minimum de consensus entre les acteurs politiques ?
Comment des dirigeants conséquents peuvent-ils oser saigner le trésor public pour un besoin qui peut être assouvi par les partenaires sans remboursement ni contrainte particulière à part la transparence surtout dans ce contexte où toutes les couches professionnelles pourchassent le pouvoir de revoir les conditions de vie et de travail des agents de l’Etat ?
Quelle est cette obsession pour nos dirigeants actuels de financer eux-mêmes l’élection présidentielle si elle ne cache pas un désir inavoué de tricherie et de fraudes habituelles ?
Deuxième intervention mal nourrie. Le Ministre de l’Administration Territoriale estime que les réformes n’ont pas été faites parce que l’opposition a torpillé toutes les initiatives du Chef de l’Etat.
Quelle curiosité ! Si l’opposition politique a autant de pouvoir d’empêcher le Président de la République, celui-là même qui détient tous les leviers de l’Etat, qui dispose de tous les moyens du pays et qui, de surcroit a un devoir moral de compte rendu vis-à-vis du peuple, de dérouler son programme, de gouverner et d’assurer le bien-être du peuple, cela suppose alors que cette opposition est plus forte que lui.
Il fait quoi alors dans le fauteuil présidentiel ? Il n’a juste qu’à reconnaître son incompétence et à en tirer toutes les conséquences.
Ainsi donc les tenants du pouvoir sont prêts à penser que les togolais ne savent pas combien ils sont de mauvaise foi. Ils s’imaginent que le peuple ne sait pas que leurs seules préoccupations restent les privilèges, la gloire, le bien matériel au détriment de l’intérêt du peuple ? Mais dis donc !!!
Le journaliste a bien fait de lui rappeler les promesses fermes faites par le Prince en 2009 de faire les réformes avant la présidentielle de 2010. Bawara fait croire que c’est l’opposition qui a empêché Faure Gnassingbé de respecter sa parole.
Est-ce qu’en promettant de faire les réformes avant la présidentielle de 2010, le Prince avait nuancé ? Il a dit clairement « nous ferons les réformes avant la présidentielle de 2010 ».
Il n’a pas dit « si l’opposition ne nous empêche pas, nous ferons les réformes ». Que cela soit clair, un Prince de la République ça s’assume et apprend à donner parole.
Troisième maladresse, le ministre de l’administration territoriale dit que les leaders de l’opposition n’ont pas encore tiré les leçons du passé, que depuis 2010, les mentalités n’ont pas évolué et que les mêmes travers sont encore entretenus ce qui, à ses yeux empêche le pays d’évoluer.
Mais quel est le rôle qui est dévolu à un Chef d’Etat si ce n’est d’impulser, à la tête du pays, la dynamique qui permettra justement le changement de mentalité ?
Comment Gilbert Bawara peut-il oublier de dire qu’au même moment qu’il jette l’anathème sur l’opposition, le système dont il fait partie n’a pas non plus changé ?
La mentalité ne peut changer que si le système lui-même change car c’est lui qui se montre inefficace, incohérent, injuste et qui entretient justement cette mentalité que le ministre Bawara est tenté de critiquer aujourd’hui.
Heureusement qu’il reconnaît au passage qu’ils ont fait preuve d’un manque de souplesse et d’ouverture.
Que les choses soient claires pour tout le monde, l’équipe à Faure Gnassingbé est en train de tirer le Togo vers le bas, elle a bradé toutes les valeurs morales et républicaines qui faisaient la fierté des togolais.
Et en retour, Faure Gnassingbé et ses amis ont instauré dans le pays, le mensonge, le dilatoire, le faux-fuyant et un curieux esprit de facilité qui les amène à siphonner toutes les ressources de l’Etat, et comme si cela ne suffisait pas, ils vont jusqu’à braquer les pauvres commerçants pour leur arracher les fruits de leur labeur. Le dernier braquage à l’aéroport de Lomé en dit long.
Quatrième couac, Badjoulbayéna Bawara dit que c’est l’opposition qui a suscité et entretient le débat sur la candidature de son mentor alors que le souci actuel de celui-ci est de voir si les togolais mangent à leur faim, si son équipe s’occupe bien d’eux etc.
Là justement, le ministre a développé une contradiction flagrante. Alors qu’il reconnaissait d’emblée que c’est la majorité à l’Assemblée qui a soulevé le débat sur la candidature de Faure Gnassingbé par rapport aux réformes qui étaient préconisées par le projet de loi de juin dernier, il a encore le courage de dire que c’est l’opposition qui, redoutant Faure Gnassingbé, se préoccupe actuellement de sa candidature et en fait un monstrueux problème.
Pire, il va jusqu’à caricaturer les propos des leaders politiques et des organisations de la société civile lors de leur dernière marche.
Et pourtant, les images étaient bien projetées au cours de l’émission et les propos tenus par ceux-ci étaient clairs, ils marchent pour arracher les réformes, ils ne se préoccupent guère de la candidature de qui que ce soit car lorsque l’on signait l’APG en 2006, cette question de candidature n’était pas à l’ordre du jour….
Dans le reportage en question, Me Kpandé Adjaré est allé jusqu’à dire qu’il était inadmissible que l’on ramène la problématique des réformes à la seule question de la candidature de Faure Gnassingbé.
Qu’est-ce que Gilbert Bawara voulait entendre avant de comprendre que le fait pour Unir et sa majorité d’agiter la candidature de Faure Gnassingbé comme une condition sine qua non des réformes était malsain et éteignait justement le caractère impersonnelle de toute loi ?
Là encore, le journaliste a bien fait de lui rappeler les propos maladroits tenus par Christophe Tchao, l’homme des petits débats, conditionnant justement les réformes à la candidature du Prince !
Il a encore bien fait de lui rappeler ce que Faure Gnassingbé lui-même a dit à Accra que « la Constitution en vigueur sera rigoureusement respectée ». Et à Bawara de dire que le Prince avait ajouté « dans tous les cas de figure » !!! Mais quelle blague !!! Et « en Vigueur » alors ?
Si Faure Gnasingbé était dans la logique des réformes, il aurait nuancé et mettre la balle dans le camp de l’Assemblée Nationale qui avait déjà reçu la proposition de Loi de l’opposition.
Mieux, le Prince a ajouté qu’en ce qui concerne sa candidature, il revenait à son parti d’en décider. Il n’a pas dit qu’elle était conditionnée par les réformes, c’est donc clair qu’il fermait justement la page des réformes pour se rabattre sur son positionnement en tant que candidat par son parti…Il peut tromper qui ? Le français est riche et aussi nourri en mots et expressions clairs que personne ne peut facilement biaiser.
Tout compte fait, l’on s’aperçoit qu’il n’est pas aisé de prendre la défense de Faure Gnassingbé aujourd’hui dans un débat. Tant l’homme s’est rendu coupable de beaucoup de maladresses, d’incohérences, de faux pas, de dilatoire et de mensonges, que les faits le rattrapent à tout point de vue aujourd’hui.
Malgré son génie et son éloquence, Gilbert Bawara n’a pu que balbutier sur tous ces points qui sont indéfendables pour un homme qui a autant roulé les togolais dans la farine.
Faure Gnassingbé veut conserver le pouvoir, il est dans la logique d’un règne comme ce fut le cas pour son père et les faits le démontrent avec éloquence.
Aucune masturbation intellectuelle ne saurait camoufler ce désir vorace et inextinguible du Prince de s’accrocher indéfiniment au pouvoir contre la volonté du peuple. Toutes ses manœuvres visent donc à empêcher l’alternance au Togo et Hollande le lui a bien rappelé dans son discours de Dakar lors du dernier sommet de la francophonie.