La cour suprême du Togo a marqué l’opinion ces dernières années dans de nombreux dossiers par certaines décisions qui sont curieusement sorties du cadre juridictionnel.
En effet, dans l’affaire d’atteinte contre la sûreté de l’Etat d’avril 2009, cette cour a marqué l’attention de toute l’opinion par les méthodes rocambolesques et cavalières par lesquelles elle a expédié les dossiers des inculpés.
Nous rappelons que du 1er au 15 septembre 2011, cette juridiction de haut niveau a non seulement condamné 24 inculpés quand bien même ils ont été innocentés par l’avocat général de ladite cour pour défaut de charges contre eux mais également a condamné à de lourdes peines allant de 5 à 20 ans d’autres inculpés sur la base des aveux extorqués sous la torture et les traitements inhumains et dégradants.
Suite à un rapport publié en plein procès par Amnesty International le 13 Septembre 2011 intitulé « Togo : Procès Kpatcha GNASSINGBE : Les aveux extorqués sous la torture ne doivent pas être retenus », le Gouvernement Togolais par le biais du Ministère de la Justice avait rendu public un communiqué le 18 septembre 2011 dont l’extrait disait : « Face à la gravité de ces allégations, le garde des sceaux, ministre de la justice, chargé des relations avec les institutions de la république, a décidé, sur instruction du chef de l’Etat et du gouvernement, de mandater la Commission Nationale des Droits de l’Homme (CNDH), afin qu’elle ouvre une enquête impartiale pour faire toute la lumière sur les faits allégués. »
En Février 2012, le juge Koffi KOUNTE, Président de la Commission Nationale des Droits de l’Homme (CNDH), a publié le ‘‘rapport authentique’’ de l’enquête qui lui a été confiée par le gouvernement. Dans ce rapport, la CNDH disait que ‘‘ le rapport initial, attestant de l’existence d’actes de torture faites par les forces de sécurités et fournissant des témoignages des victimes, soit connu de tous’’. Ailleurs dans le même rapport, elle a confirmé qu’ ‘‘il a été commis sur les détenus des actes de violence physique et morale à caractère inhumain et dégradant’’. Nous signalons au passage que l’intégralité dudit rapport est disponible sur www.cndh-togo.org .
Malgré les nouveaux éléments et la confirmation des allégations de torture par les résultats d’enquête de la CNDH et malgré les dispositions du code de procédure pénal en vigueur, les juges de la Cour suprême ont déclaré irrecevable la requête des avocats des requérants et ont maintenu les condamnations.
Face à cette situation et les voies de recours internes étant épuisées, l’affaire est portée devant la Cour de justice CEDEAO qui dans un arrêt rendu le 03 juillet 2013 reconnaissait que les requérants n’avaient pas eu droit à un procès équitable.
Les juges de la cour suprême n’arrêteront pas de contester l’évidence des allégations confirmées par le rapport de la CNDH et par l’arrêt de la cour de justice de la CEDEAO. Ils viennent une fois encore de rejeter la requête des avocats allant dans le sens des recommandations de l’arrêt de la Cour de justice CEDEAO.
Nous lançons un appel pressant à toutes les Organisations de Défenses des Droits de l’Homme (ODDH) à s’impliquer davantage dans ce dossier afin que la justice soit véritablement rendue".