A l’approche de l’élection présidentielle de 2015, l’opposition togolaise accumule les handicaps les plus ignominieux et les plus puérils sérieusement en deçà d’un niveau digne de leaders d’opinion nationaux. Le chantier du renouvellement des figures de l’opposition redevient aussi urgent que les questions de Réformes Politiques de l’heure. Car l’adresse et la droiture politique dont Faure Gnassingbé vient de faire preuve en annonçant la mise sur pied de « la commission de réflexion sur les réformes politiques » a déjoué tous les pronostics d’une opposition ringarde, qui n’est que fière de ses titres : tantôt opposition radicale, tantôt opposition constructive, ou tantôt encore opposition participative… avec des slogans aussi vétustes comme : « le changement ou rien », « l’alternance ou la mort », etc. Les regroupements politiques et les slogans populistes ont toujours jonché le parcours de la lutte de l’opposition togolaise. Depuis l’ouverture démocratique des années 90, ce sont les mêmes refrains et la même rengaine barbotés par des opposants autoproclamés qui tirent leur légitimité de la haine qu’ils professent à l’endroit d’un régime qui s’est rajeuni et s’est modernisé.
En effet, le discours de la Saint Sylvestre de Faure Gnassingbé prend sérieusement toute la mesure des réalités et enjeux aussi bien sociaux que politique d’aujourd’hui. Autant que le stipule par exemple l’une des recommandations de la CVJR : « la question des réformes institutionnelles constitue un problème complexe qui mériterait d’être posé dans le cadre d’une réflexion sérieuse devant nous amener à nous interroger sur l’adaptation, à nos réalités sociologiques, du modèle occidental en vigueur dans notre pays depuis l’indépendance. Fondé sur l’individualisme et une conscience citoyenne rationnelle, ce modèle éprouve du mal à régir notre société nationale pluriethnique où les réflexes grégaires ou communautaristes continuent d’être prédominants. La CVJR recommande par conséquent l’organisation d’une large réflexion sur la question associant personnalités politiques, juristes, sociologues, historiens, organisations de la société civile en vue de déterminer les institutions en mesure de nous assurer une gouvernance adaptée à nos réalités».
C’est là justement que la réalité et la justesse de la décision de Faure Gnassingbé, son caractère pertinemment actuel et tourné vers le futur, a envoyé un puissant uppercut à la génération politique d’en haut. Ces pépés de la politique avaient longtemps trouvé dans leurs slogans un exutoire pour exprimer leur colère, mais malheureusement les événements politiques d’aujourd’hui les dépassent, les délaissent et les tournent même en dérision.
L’opposition togolaise, ou ce qu’il en reste, n’a pas encore compris que le monde se développe à une vitesse inimaginable, et qu’il fallait s’adapter à la nouvelle donne géopolitique mondiale et africaine. En commençant par se dépouiller elle-même des vieilles habitudes qui ne forcent plus l’admiration béate jadis brandie. En appelant au changement et à l’alternance, l’opposition a vite oublié qu’elle doit promouvoir l’alternance en son propre sein, et canaliser les énergies de la jeunesse militante vers des débats plus collés aux réalités actuelles de gouvernance démocratique et de développement durable.
Aujourd’hui, au sein du pouvoir et du gouvernement, c’est la régénérescence d’esprit et de corps. Les nouvelles voix du pouvoir n’ont pas en face des voix capables d’entonner de nouveaux hymnes à l’alternance et au changement. Les opposants ont toujours voulu tout avoir, et pour eux seuls.
Et de fil en aiguille, ils quittent le plancher à pas feutrés, pour ceux qui ont compris que la lutte les dépasse dorénavant. D’autres encore, refusent de libérer la voie à une jeunesse qui ne se retrouve plus dans leurs faussetés et leurs bassesses. Dans une opposition qui ne tolère pas en son sein la contradiction, comment peut-on assurer l’alternance et le changement ?
Les points de vue différents et les contradictions qui nourrissent la vie de chaque assemblée sont perçus et dénoncés comme de la traitrise et de la manipulation du pouvoir. Du coup, l’opposition togolaise peine à se renouveler, plongeant ainsi la lutte dans des travers personnels infertiles et inconstants. Le résultat ? Absence d’ouverture au dialogue et crispation consciente de la vie socio-politique. Pendant ce temps, le pouvoir gouverne, et les réformes s’accentuent dans tous les domaines de la vie nationale.