Bisbilles au sein du pouvoir
Il est présenté comme le gardien du temple et pilier n°1 du régime Gnassingbé, le vrai détenteur du pouvoir. Après avoir passé de longues années à diriger des départements ministériels et à conseiller le Père, il a accepté se mettre au service du Fils qu’il a su bien bichonner depuis 2005. Mais les relations entre lui et son protégé se seraient beaucoup détériorées, au point où ce dernier croirait nécessaire de le priver de liberté. Lui, c’est Barry Moussa Barqué, ancien ministre et éternel conseiller des Gnassingbé Père et Fils.
Barry Moussa Barqué dit en résidence surveillée
Les informations circulaient depuis plusieurs mois et faisaient état de relations devenues tendues entre lui et Faure Gnassingbé. Ces derniers temps, des rumeurs des plus folles circulent à son sujet. Certaines sources le donnent même pour arrêté. Ces rumeurs sont montées d’un cran la fin de la semaine dernière, lorsque des sources ont fait état de ce qu’il aurait même échappé à une arrestation, averti par ses proches de l’envoi d’un groupe de corps habillés à l’un de ses domiciles où il crèche souvent alors qu’il était en ville, et qu’il aurait dès lors décidé de se mettre à l’abri. Il se dit même qu’il serait entré dans le maquis. D’autres sources le disent même avoir demandé asile à l’Ambassade de France.
Des informations que nos différents recoupements ne nous ont pas (pour l’instant ?) confirmées. Certaines sources contactées rapportent que l’éternel conseiller du clan Gnassingbé ou « président de l’ombre » était même à des funérailles d’un proche au cours de la semaine écoulée. Suffisant pour infirmer les allégations de mauvaise passe traversée avec son protégé ? Il nous est tout de même revenu que Barry Moussa Barqué serait en résidence surveillée et que ses mouvements seraient contrôlés et soumis à des autorisations (sic). Les jours et semaines à venir nous situeront davantage.
A l’origine de ses ennuis, un conseil culoté donné à Faure
Le commun des Togolais doit s’étonner devant ces informations faisant état de relations conflictuelles entre Barry Moussa Barqué et Faure Gnassingbé, d’autant plus qu’il s’agit là d’un conseiller très spécial, un homme que certains caricaturent comme le vrai détenteur civil du pouvoir du Fils et qui serait consulté sur bien de sujets. En tout cas, son avis compterait beaucoup sur les questions économiques surtout – il était ministre de l’Economie et des Finances-, et les budgets de l’Etat ne seraient pas votés sans son adoubement. L’homme était donc dans le premier cercle fermé de Faure Gnassingbé. Mais à l’origine de la brouille ou plutôt de l’inimitié, nous revient-on, un conseil culoté donné à son protégé.
Selon les indiscrétions donc, Barry Moussa Barqué aurait usé de ses prérogatives et conseillé au Prince de la République, il y a plusieurs mois avant même l’ouverture du débat sur les réformes constitutionnelles et institutionnelles de l’Accord politique global (Apg) ou la chute de Blaise Compaoré, de…ne pas chercher à rempiler à la fin de son second mandat qui arrive à échéance et d’opérer ces réformes. Afin de s’éviter des problèmes et sortir par la grande porte. Un conseil culoté, un crime de lèse-majesté. Depuis lors, le conseiller serait perçu comme un ennemi, son protégé ne voulant pour rien au monde lâcher de si tôt le pouvoir, s’estimant trop jeune – 49 ans- pour le quitter. Au-delà des jouissances que lui procure le pouvoir, Faure Gnassingbé n’aurait pas l’assurance que ses arrières seraient protégés lorsqu’il aura quitté le pouvoir, craignant le fantôme des événements de 2005 et les retours de la suite d’affaires puantes de sa gouvernance, mais surtout la vengeance (sic) de ses anciens proches coincés en prison dont Kpatcha Gnassingbé et Pascal Bodjona. Et depuis ce conseil, Barry Moussa Barqué était sur le gril et son protégé cherchait simplement l’occasion idéale pour le coincer.
L’affaire de la Btci, la passerelle
Même si l’immeuble tient encore debout, la Banque togolaise pour le commerce et l’industrie (Btci) n’est qu’un géant au pied d’argile. Et c’est un secret de Polichinelle. La banque est l’objet d’une coupe réglée entre les membres d’un réseau de pilleurs réputés proches de la présidence de la République, depuis l’époque de Yao Kanékatoua. Surfacturations, détournements de fonds, telles sont entre autres méthodes utilisées pour la piller. Le montant du préjudice s’estime en milliards. Le dossier a été entre-temps révélé par les confrères de « L’Alternative ». La situation a même induit l’intervention de la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’ouest (Bceao). Une nouvelle gérance est en cours depuis plusieurs mois.
Les premiers responsables de ce pillage dit à ciel ouvert sont bien des cadres de la banque. Mais dans ce dossier, il a été révélé que des proches collaborateurs de Faure Gnassingbé aussi en profitent. Souvent, son nom serait même utilisé pour justifier des décaissements. Et dans le lot, figure un certain…Barry Moussa Barqué. L’homme profiterait beaucoup de la banque. Bien que n’étant plus président du Conseil d’administration, il disposerait d’une suite présidentielle au 10ème étage de l’immeuble où il viendrait passer de bons moments en très bonne compagnie, aux frais donc de l’institution bancaire. Il est dit jouir par ailleurs d’un cachet spécial à chaque fin du mois, des bons de carburants mensuels de 1000 litres et utiliserait même le parc automobile de la banque à des fins personnelles, dont des funérailles. En clair, il est aussi partie prenante de ce pillage, et c’est ce dossier que son protégé voudrait exploiter.
La mise en branle du scénario était simplement en stand-by ; mais l’ancien ministre aurait corsé sa situation avec ses fréquentations, notamment avec l’ancien député du Rassemblement du peuple togolais (Rpt) et président de la Fédération togolaise de football (Ftf) écarté, Gabriel Ameyi. Les indiscrétions le disent lui avoir rendu visite les 17 et 23 décembre derniers. Des fréquentations soupçonnées comme la collusion de deux anciens proches à des desseins inavoués qui ont suffi pour décider le Prince à le coincer une fois pour de bon, pour s’éviter une autre épine dans les pieds.
Le chant de cygne de Barry Moussa Barqué ?
Rien n’est pour l’instant officiel, mais tout a l’air d’un chant de cygne pour l’ancien ministre et conseiller éternel. Un homme qui était pourtant dans le secret des dieux et que certains disent même être le vrai détenteur du titre foncier du pouvoir des Gnassingbé. Il ne serait d’ailleurs pas le premier collaborateur du premier cercle de Faure Gnassingbé à passer à la trappe. Et ils finissent toujours de la même façon. Kpatcha Gnassingbé et Pascal Bodjona en sont des illustrations vivantes.
Tout commence souvent par des rumeurs de relations qui deviennent conflictuelles entre lui et sa cible (sic) et est rapporté sous forme d’indiscrétions par la presse indépendante et non liée au pouvoir. La chute de Pascal Bodjona était annoncée plusieurs mois voire des années avant le déclenchement du scénario. C’était dit à plusieurs reprises que l’ancien ministre était dans l’œil du cyclone et qu’il devrait être arrêté ; et les rumeurs ont fini par devenir clameurs. L’affaire dite d’escroquerie internationale a servi de passerelle, et son sort était scellé. C’est de la même façon que Kpatcha Gnassingbé a été coincé. On se rappelle même que pour son cas, au cours d’une sortie politique de son parti en amont des législatives d’octobre 2007, Faure Gnassingbé avait même ironisé sur les allégations de relations tendues entre lui et son demi-frère et simulé une parfaite entente. Mais il n’a pas fallu longtemps avant que les faits ne confirment ces rumeurs, avec l’attaque du domicile du député dans la nuit du 12 avril 2009 dans la fameuse affaire d’atteinte à la sureté de l’Etat et son arrestation 72 heures plus tard.
Sans doute qu’avec ces révélations sur Barry Moussa Barqué, les métayers de la plume du pouvoir seront mis à contribution pour démentir. On fera croire que le conseiller et son protégé s’entendent toujours bien comme larrons en foire. Mais les faits ne tarderont pas à être confirmés. En tout cas, c’est le wait and see.