Togo - « La langue est la meilleure et la pire des choses », disait Eusope. Après des années de controverses, après tant d’atermoiements, le chef de file de l’opposition et président national de l’ANC, Jean Pierre Fabre, a fini par rencontrer à plusieurs reprises le Chef de l’État Faure Gnassingbé. Motifs : les réformes constitutionnelles et institutionnelles. D’autres qui l’ont emboîté le pas ont été qualifiés de traites à l’image de Bassabi Kagbara du PDP. Depuis les dernières élections législatives de juillet 2013, un schéma ambigu semble se dessiner au niveau de la classe politique. Le silence, ou du moins l’hypocrisie politique, a remplacé les discours tonitruants d’avant les élections. Le doute est aujourd’hui de plus en plus porté sur Jean Pierre Fabre, le leader de l’ANC, quant à sa capacité à mener le combat pour une alternance. Face à lui, un homme intelligent, disons habile, qu’on le veuille ou non, Faure Gnassingbé dont l’opposition a toujours minimisé sa capacité à ‘’tenir’’ le pays. Il fut une époque où on pensait à une suprématie de Gilchrist Olympio, plus tard à celle de Jean Pierre Fabre sur le jeune président. Les évènements détermineront au fil des années que c’est plutôt Faure Gnassingbé qui traçait son avenir politique face à aux leaders usés par tant d’années de lutte politique.
Nous l’avions toujours dit dans nos précédentes parutions ; pendant plusieurs décennies, les Togolais ont été manipulés par les politiciens en panne d’idéologie réduisant ainsi la dignité humaine en un jouet. Pendant que le pouvoir nourrissait son peuple de résidus et de discours propagandiste sous la menace des bruits de bottes, l’opposition assouvissait sa soif par les manifestations de rue, ceci, pour pouvoir monter les enchères. Preuve, rien à ce jour n’a été obtenu en dehors des acquis des années 90 et ceux de 2006 issus notamment de l’Accord Politique Global.
Suite à l’euphorie et à la solennité qui ont accompagné la signature, le 20 août 2006, de cet accord tant attendu, l’UFC, version ANC aujourd’hui, a manqué un sursaut républicain en refusant d’apporter son soutien au nouveau Premier Ministre Me Yawovi Agboyibor. Nous pouvons dire sans risque de nous tromper que le succès de l’Accord Politique Global aurait pu dépendre du patriotisme des acteurs politiques togolais. Mais dommage !
En clair, les responsables politiques de l’ANC sont souvent trop pressés d’accéder au pouvoir mais sans aucune stratégie, quand bien même disposant d’un capital humain important. Et pire, ils ne font pas une bonne analyse des méthodes du camp présidentiel. Cette capacité à analyser et à anticiper sur les actions politiques du pouvoir peut revenir au Comité d’Action pour le Renouveau, CAR, de Me Apévon. Contre vents et marées, le CAR a su tirer, par moment, son épingle du jeu ; illustre sa toute dernière proposition de loi à l’Assemblé Nationale avec l’ADDI alors que des agitations inutiles étaient observées ici et là.
A quelques semaines de la présidentielle de 2015, des excitations électoralistes sont observées. Dans la foulée, on enregistre une dizaine de candidatures depuis quelques semaines faisant voler en éclat le projet utopique de candidature unique de l’opposition. Au terme du congrès de son parti, l’Alliance des démocrates pour un développement intégral, ADDI, .Aimé Tchaboré Gogué a été désigné candidat à la présidentielle 2015. Gerry Tamaa du Nouvel Engagement Togolais, Alberto Olympio du Parti des Togolais, Me Tchassona Traoré du MCD tout comme Jean-Pierre Fabre de l’ANC sont aussi candidats. Toujours pour le rendez-vous du scrutin présidentiel de 2015, les Togolais vont compter avec Kofi Yamgnane de Sursaut-Togo, les pasteurs David Ada et Pépé Dotsè qui veulent s’essayer en politique, sans ignorer une probable candidature de Agbéyomé Kodjo de l’OBUTS et celle d’un responsable du CAR.
On annonce d’autres candidatures issues du rang de l’opposition dans les semaines à venir. Le peuple est allé à des élections présidentielles en 1993, en 1998, en 2003, en 2005 et dernièrement en 2010. Toutes ces élections ont été contestées et certaines qualifiées de non-sens par certains observateurs. Habituellement, ces élections présidentielles forment le terreau de la crise socio-politique qui secoue le pays depuis des décennies. Il est à rappeler que les élections se déroulent généralement dans le cadre du fonctionnement démocratique des institutions en vue d’opérer des alternances politiques. En d’autres termes, elles sont un moyen démocratique de conquérir ou de conserver le pouvoir politique. Malheureusement, les exemples d’élections truquées font légion en Afrique depuis le déclenchement des processus de démocratisation incités par le Discours de la Baule et le Vent de l’Est au point qu’on en vienne à s’interroger sur la signification des élections en Afrique ? Les élections constituent la voie par laquelle les peuples participent souvent aux processus de décisions dans leurs pays respectifs et c’est l’une des caractéristiques de la démocratie. Et tout ce que font les gouvernants produit des conséquences sur la vie des citoyens que nous le voulions ou non. Nous ne devons pas rester indifférents. Lorsque le régime togolais a choisi de chanter et de danser parce que le pays a trouvé de la manne dérivée de l’exploitation des phosphates, personne dans le temps n’a véritablement contesté, en dehors des revanches personnelles. Le pays tout entier en paie aujourd’hui les pots cassés. Les écoles tombent en ruine, les instituts de formation pédagogique sont devenus des champs ; les hôpitaux manquent de tout, ce qui fait d’eux de vrais mouroirs ; le taux de chômage est fort élevé. La seule voie dont disposent le peuple togolais pour influencer les décisions des gouvernants de leurs pays est l’organisation d’élections libres et transparentes.
Malheureusement ces genres d’élections sont des denrées très rares. Il est aussi évident que le pouvoir multiplie ses dernières années des acrobaties socio-politiques pour donner une certaine teinture démocratique à la vie nationale. Le multipartisme pour lequel nous avons opté nous impose de nouveaux comportements, de gré ou de force, dans notre cheminement pour un lendemain meilleur des générations futures. Les forces en présence, pouvoir et opposition, doivent adopter une nouvelle forme d’action politique avec de nouvelle et mature stratégie. Nous l’avons déjà dit, à plusieurs reprises, dans nos éditions précédentes qu’aucune force n’est à exclure pour un Togo meilleur.
En somme, les fils du Togo doivent s’unir pour faire taire les égoïsmes individuels au profit de l’intérêt du peuple et pour promouvoir la démocratie, facteur de notre progrès.