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Les ODDH et la présidentielle/Toujours «Pas de réformes, pas d’élection»
Publié le vendredi 6 fevrier 2015  |  Emergence-togo


© aLome.com par Lakente Bankhead
Les ODDH invitent Faure Gnassingbé à ne pas briguer un troisième mandat
Lomé, le 4 février 2015. CESAL. Les Organisations de Défense des Droits de l`Homme (ODDH) togolaises ont animé un point de presse ce mercredi au CESAL de Lomé. Ces derniers invitent le président Faure Gnassingbé à ne pas se présenter à la présidentielle.


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Ça bouillonnera toujours tant que les réformes ne seront pas opérées avant la présidentielle. Ce mercredi 4 février 2015 au CESAL à Lomé, les organisations de défense des droits de l’Homme (ODDH) ont organisé une conférence de presse pour exiger : « les réformes constitutionnelles, institutionnelles et électorales avant toutes élections et la transparence totale du processus électoral enclenché. » Lecture de la déclaration liminaire !

LE CONTEXTE


Depuis l’assassinat le 13 Janvier 1963, du premier président démocratiquement élu, Monsieur Sylvanus Epiphanio Elpidio Kwami OLYMPIO et la prise du pouvoir par l’armée à la tête de laquelle se trouvait le Lieutenant Colonel Etienne EYADEMA en 1967, l’instauration du système de parti unique, de parti-Etat, le RPT, a consacré un véritable règne sans partage. Les libertés démocratiques ont été entièrement confisquées.

Après le Discours de La Baule et à l’issue de la Conférence Nationale Souveraine qui a rassemblé les forces vives de la nation, la IVème République s’ouvre avec la Constitution du 14 octobre 1992 adoptée au référendum constitutionnel du 27 septembre 1992 par une majorité avoisinant les 100%. Le processus constitutionnel auquel a pris part le Général Gnassingbé Eyadema, Président de la République d’alors, fut inclusif et consensuel. Malgré l’engagement pris par le chef de l’Etat lors de la signature de l’Accord cadre de Lomé de ne pas toucher à une seule virgule de la constitution et qu’en 2003, il allait se reposer, la Loi fondamentale sera révisée le 31 décembre 2002 par une Assemblée nationale composée uniquement des députés de la sensibilité présidentielle.


On sait que les partis politiques de l’opposition ont boycotté les élections législatives anticipées d’octobre 2002 parce que le processus électoral n’offrait aucune garantie de transparence.
Par cette révision, la limitation de mandat venait d’être supprimée de la Constitution togolaise. Le mode de scrutin est désormais à un tour. Les attributs et les prérogatives du Président de la République sont renforcés face à un Premier ministre dépouillé de ses pouvoirs et donc affaibli.

Suite à la disparition du général Gnassingbé Eyadema le 5 février 2005, la Constitution sera à
nouveau révisée dans cette période de vacance de la présidence, plus exactement le 6
février 2005. Un véritable « passe-passe constitutionnel » qui a permis à Faure Gnassingbé,
alors ministre, de devenir député, Président de l’Assemblée Nationale et chef de l’Etat par
interim.

Devant les contestations des acteurs politiques de l’opposition et de la société civile et face
aux sanctions de l’Union Africaine, de la CEDEAO et aux pressions de la Communauté
internationale, Faure Gnassingbé qui avait remplacé son père dans un contexte de textes
modificatifs non promulgués, démissionne.

Les révisions constitutionnelles de 2002 et de 2005 furent des processus unilatéraux,
partisans, exclusifs et sans consensus.

L’élection présidentielle du 24 avril 2005 a été marquée par des actes de violence et des
violations graves des droits humains. Selon le Rapport de la Mission d’établissement des faits
des Nations Unies, il y a eu plus de cinq cents (500) morts.

Dans le souci de trouver une solution définitive à la crise togolaise et mettre un terme aux
violations des droits de l’Homme, la classe dirigeante prendra un certain nombre
d’engagements :

- La signature d’un Accord de Siège entre le Togo et le Haut Commissariat des Nations
Unies aux Droits de l’Homme aboutit à l’installation du Bureau du Haut Commissariat
aux Droits de l’Homme au Togo.
- Un dialogue politique a été initié sous la médiation du Président du Burkina Faso
d’alors, M. Blaise Compaoré et aboutit à la conclusion de l’Accord Politique Global
(APG) le 20 août 2006. Ce processus inclusif et consensuel a impliqué l’ensemble des
acteurs politiques et ceux de la société civile. Cet Accord prévoit les réformes
constitutionnelles et institutionnelles.
Pour les acteurs politiques, il est parfaitement clair que dans le cadre de la mise en œuvre de
l’APG, les réformes constitutionnelles et institutionnelles doivent être faites. En effet, les
conventions légalement formées tiennent lieu de lois à ceux qui les ont faites. Aussi, un
accord conclu doit-il être exécuté de bonne foi par les parties.
Depuis, il y a eu le CPDC (Cadre Permanent de Dialogue et de Concertation), le CPDC rénové,
Dialogue Togo télécom 1, Dialogue Togo télécom 2, Assemblée nationale.

- Entre temps, le Président Faure Gnassingbé crée la CVJR pour faire la lumière sur les
violences à caractère politique qui ont émaillé l’histoire du Togo, avec comme point
culminant la boucherie humaine de 2005.

La CVJR a recommandé au point 5 que ces réformes doivent notamment viser la mise en
place de mesures garantissant de meilleures conditions pour l’alternance démocratique. La
CVJR précise que le mandat présidentiel devra être limité, avec un mode de scrutin
garantissant l’élection du chef de l’Etat à la majorité absolue des votants. A cet effet, la
CVJR a recommandé le retour pur et simple à l’article 59 de la Constitution de 1992.

En mai 2012, lors de la réception du premier volume du Rapport de la CVJR, le Président
FAURE avait déclaré :

« C’est avec courage et lucidité qu’il nous faudra lire, avant de les tourner, toutes les pages
de cette mémoire controversée pour éviter le retour des vieux démons... »

CONSTAT

De 2006 à 2015, soit 9 ans, l’Accord Politique Global est toujours en attente de mise en
œuvre.

Dans son adresse à la nation le 31 décembre 2014, le Président Faure Gnassingbé occulte la
question cruciale des réformes tel que le préconise le point 5 des recommandations de la
CVJR et crée une Commission de réflexion sur les réformes chargée de « proposer un texte
de réforme politique, de réforme institutionnelle et constitutionnelle qui tient compte de

notre histoire, reflète nos réalités et répond aux aspirations les plus profondes des
Togolaises et des Togolais ».

La ruse du Président Faure et de son gouvernement de gagner du temps et de mettre la
question des réformes aux calendes grecques vient de se confirmer.

 Un désaveu de la Constitution de la IVème République ?
 Une option à peine voilée vers la Vème République ?
 La question des réformes institutionnelles et constitutionnelles est-elle encore à
l’ordre du jour ?

Toujours est-il que lors du dernier sommet de la Francophonie tenu à Dakar au Sénégal, le
Président français, François Hollande a demandé aux dirigeants africains de ne plus chercher
à se maintenir et à s’accrocher au pouvoir.

Le dernier sommet de l’Union Africaine a fait résonner les mêmes échos : le SG des Nations
Unies, M. BANKI-MOON s’est presque prononcé sur la situation togolaise ;

« Les échappatoires que l’on trouve dans certaines législations ne devraient pas être
utilisées pour s’éterniser au pouvoir ».

Et l’ONG « AFROBAROMETRE » estime à plus de 85% le taux de la population togolaise qui
désire le changement.

Et malgré les appels incessants des religieux, l’insistance des différentes missions
diplomatiques accréditées dans notre pays quant à l’urgence et à la nécessité des réformes,
l’élection présidentielle est annoncée et la révision des listes électorales a commencé. Les
délais constitutionnels viennent d’être précisés par la Cour Constitutionnelle.

Les Togolais ne doivent pas être les mauvais élèves de la démocratie.

Les demandes du peuple togolais et sa soif de l’alternance, deviennent très fortes et plus
poussées.

Ce désir du peuple traduit l’idée selon laquelle aucun processus démocratique ne présente
des gages de perfection et d’achèvement si ne s’opère au sommet de l’Etat une dévolution
démocratique du pouvoir en terme d’alternance.

Cette alternance ne saurait être envisagée que si les institutions impliquées dans le
processus électoral et le cadre électoral lui-même présentent des gages sérieux de neutralité
et de clarté.

Il est donc clair que le refus des réformes, couplé avec un cadre électoral souvent truqué et
verrouillée, échappant à certains acteurs de la compétition et dont seul le parti au pouvoir a
la maîtrise, ne peuvent forcément conduire qu’à des élections contestées et par conséquent,
à des violences et violations des droits de l’Homme. C’est-à-dire au retour des vieux Démons
comme le dit le Président Faure Gnassingbé lui-même.
Comment conduire un peuple qu’on aime à l’abattoir en toute connaissance de cause ? Le
Président Faure Gnassingbé doit se raviser encore qu’il est temps ou porter à lui seul
l’entière responsabilité historique.

Les risques que recèle la situation togolaise sont énormes et palpables. L’opinion nationale
et internationale ne doit pas se laisser berner par un semblant de paix vécue à l’occasion des
élections de 2007, 2010 et 2013. C’est une paix imposée, une paix de cimetière qui cache un
volcan prêt à entrer en activité. Les situations récentes au Burkina Faso et en République
Démocratique du Congo sont révélatrices.

Pour parvenir à l’alternance tant souhaitée, le peuple attend une Synergie de toutes les
forces vives de la nation.

NOTRE POSITION VIS-A-VIS DE LA PROCHAINE PRESIDENTIELLE

C’est pour cette raison que, dans ces conditions :

Où la volonté du Président Faure Gnassingbé de s’incruster à tout prix au pouvoir est plus
que démontrée par son refus obstiné des réformes ;

Où les règles du jeu électoral ne sont pas claires, alors que le processus électoral est
verrouillé et constitue la chasse gardé du pouvoir RPT/UNIR ;

Et enfin où les signes et les risques réels d’un dérapage pré, per et postélectoral sont
perceptibles ;

Les ODDH et les formations politiques engagées dans la lutte pour l’alternance et la vraie
démocratie au Togo ne sont pas prêtes à accompagner un processus corrompu et verrouillé
à l’avance qui cache une énième mascarade électorale destiné à légitimer le pouvoir du
prince et appelle le peuple souverain à rester mobilisé et à prendre ses responsabilités.

ELLES EXIGENT :

- Les réformes constitutionnelles, institutionnelles et électorales avant toutes
élections ;

- La transparence totale du processus électoral enclenché.

Fait à Lomé, le 04 Février 2015

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