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Editorial : Togo, tournons le disque
Publié le mercredi 11 fevrier 2015  |  Horizon news


© aLome.com par Lakente Bankhead
Nouvelle marche pour exiger les réformes: ODDH et partis politiques sous le sceau du CAP 2015 se donnent la main sur toute l`étendue du territoire togolais.
Lomé, le 13 janvier 2015, à Bè: des partisans des réformes ont transformé leur marche initiale dans les rues loméennes en sit-in, à cause du défaut de consensus entre les organisateurs et les autorités, sur le point de chute de la marche.


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Et définitivement. Pour qu’enfin la Nation Togolaise naisse pour l’éternité. Au crépuscule du temps, du temps engagé depuis 1990 pour la mise en œuvre d’une nation démocratique il convient de situer les responsabilités afin d’en sortir un diagnostic exact des échecs pour l’accomplissement de cette noble cause.


Que dire qui ne soit entendu et écrit ? Mais le débat qui agite aujourd’hui le monde politique est létal pour le développement du pays. L’espoir vient des organisations de la société civile qui se démarquent de l’esprit partisan pour se concentrer sur la qualité de vie des citoyens et sur la pédagogie sur les Droits de l’Homme qu’elles officient avec comme seules armes leur courage, leur dignité et leur patriotisme. C’est à ceux-là que la Nation doit demain être reconnaissante. Car en réalité, leurs préoccupations s’émancipent de qui détient le pouvoir suprême. Leurs préoccupations sont dans la recherche du bien-être des populations. Vivement qu’elles tiennent ce cap pour que dans notre pays, dans lequel le manichéisme tranchant trie opposants et majoritaires au pouvoir, le citoyen simple et libre d’esprit existe.


La classe politique, ce marigot boueux intarissable est peuplé d’espèces dont la capacité à survivre dans le mensonge et les alchimies propres au conservatisme abject dénaturent le vrai débat : celui de la construction d’une nation développée. Pour ceux qui adorent ce manichéisme abscond – qu’ils soient du parti au pouvoir ou de l’opposition- il urge de se ressaisir non pas pour parachever leurs desseins inavoués, mais pour redonner une chance à la jeunesse et à leurs enfants.


L’arbalète et sa corde


L’arbalète c’est le pouvoir en place. J’ai lu la constitution togolaise comme on lit un livre sacralisé. Mais je ne me lave pas de ses alinéas. Laquelle des constitutions est légitime. Celle de 1992 votée par référendum ou celles revues et corrigées de 2002 et 2005 ? Se forger une radicalisation sur les pans arrangeants d’une telle loi fondamentale conduit à la situation embrouillée dans laquelle nous vivons aujourd’hui. Si nous prenons la fin de l’ancien régime qui a coïncidé avec la mort de feu EYADEMA comme l’année zéro d’une nouvelle ère, point besoin de s’auréoler d’un juridisme constitutionnel pour trouver un terrain d’entente. De la volonté première du président Faure à la mort de son père de poursuivre et terminer le mandant paternel, à son élection tumultueuse en2005, jusqu’à la quiétude artificielle qui règne de nos jours, il faut en retenir une chose : les accords politiques dans leurs esprits et dans leurs lettres ont surnagé les préceptes constitutionnels. C’est le prix payé pour qu’on en soit où nous sommes. C’est sur ce principe fondamental que le président Faure doit surfer en ne briguant pas un mandat de trop.



Ceux qui s’arcboutent sur la primauté constitutionnelle pour dire le contraire sont dans leur légalité. Mais la paix d’une nation en construction n’a cure des dispositions constitutionnelles qui plus est sont sujets à débat tant leur essence est depuis modifiée.



La courte vue d’esprit autorise certains à évoquer le fait que le Président Faure a travaillé et développé le pays en infrastructures. Ceux nombreux qui jouent à cette agnatologie doivent savoir qu’on n’élit pas un président pour faire mal son travail pour lequel il a prêté serment. Bonne copie ou mauvaise quand l’heure de ramasser les feuilles sonnent on remet sa copie. L’alternance est sacrée dans une démocratie. Plus dans le cas singulier du Togo ou quels que soient les arguments, la conscience collective, légitimement, n’oublie pas que quatre décennies de règne par le père et le fils s’accommode bien plus à une monarchie qu’à une démocratie.


Le bilan par ailleurs du Président Faure est bien élogieux, loin des considérations infrastructurelles. Mais sociologiques. Et sur ce plan, il y’a rien à dire sur sa capacité à avoir pu endiguer les conservateurs et adeptes de la puissance de son ethnie. Le curseur a dû changer de cran, mais c’est une réalité. La lutte contre la pauvreté fait son chemin avec des résultats probants çà et là, la dissolution du RPT sans coup férir laissant certains caciques sur le carreau, la réorganisation de l’administration financière, l’instauration d’une liberté d’expression bien que sous censorat, et tant et tant d’autres aspects sont à son actif. Nul ne peut ignorer tous ses efforts qui ont fini d’éteindre le sceau de la dictature du règne de son père. Faure n’est pas un dictateur. Il faut le répéter.
Le problème de la corruption est resté entier comme celui de la décentralisation effective. Facteurs indispensables à la démocratie participative et à un développement intégré. Aucune raie lumineuse ne laisse entrevoir la possibilité d’une alternance.



Malgré ce bilan somme toute positif, Faure doit respecter l’histoire et ses faits qui l’ont mis au perchoir pour permettre l’alternance en s’éclipsant. Il accomplira une œuvre salvatrice qui le grandira. On ne souviendra de lui que parce qu’il aura fait changer la mentalité et l’habitus de l’homo togolensis. On ne finira jamais de faire les routes et les ponts.




La ficelle de l’arbalète, disons les ficelles….



Le Togo aime à tuer ses valeureux fils. Hormis ceux tombés sous les balles assassines du régime en place depuis l’enclenchement du processus démocratique, il faut rendre hommage aux pères fondateurs des premiers partis de l’opposition. Chacun a fait de son mieux. Mais leur legs est peu vertueux au point que leurs successeurs oublient de s’en tenir qu’aux pans bénéfiques pour mener la lutte.


L’arbalète tient toujours parce que les ficelles sont si disparates pour permettre de propulser loin la flèche. Que la division de l’opposition soit une tare n’est pas un scoop. Mais la cacophonie et l’immaturité qu’ils nous servent suffisent à dire qu’ils savent bien ce qu’ils veulent : tout sauf le pouvoir. La sempiternelle demande de réformes bien que légitimes occulte le débat sur les questions de société, sur les questions existentielles et sur la projection sur l’avenir. Allez à la conquête des municipalités, des cantons et des régions. Vous gouvernerez mieux demain. Si la hargne mise pour obtenir des réformes qui à l’analyse ne concernent que la présidentielle, était déployée pour exiger les élections locales, il y’a longtemps qu’une démocratie apaisée se serait installée.


L’impossibilité de parler d’une seule voix, la lutte pour un leadership factice annihile le débat sur les vraies questions de société. A voir leur background à quelques exceptions près, c’est ainsi mieux que ces questions-ci soient prônées par la société civile responsable.


Les collectifs divers mis en place et qui continuent de naître chaque jour traduisent for bien l’impossibilité atavique de créer une union sacrée pour obtenir les réformes souhaitées et plus tard de gouverner ensemble. Tous ces faits entretiennent une confusion monstre dans la tête des citoyens dont la majorité approuve la nécessité des réformes. Au point que l’opposition est sévèrement critiquée plus que le gouvernement comme si elle eût à gouverner ce pays.
C’est bien la fin de l’histoire singulière enclenchée depuis les années 90. L’opposition doit tirer les conséquences de ses échecs répétitifs et cesser d’être le parasol troué entre le pouvoir et le peuple représenté par les organisations de la société civile, les syndicats et autres corporations luttant pour l’avènement d’une démocratie véritable. Tous les mêmes ! Cette bravade qu’on lance à l’opposition n’est pas illégitime. Les citoyens sont convaincus que les leaders de l’opposition luttent pour leurs propres intérêts ignorant ou mettant exprès de côté les intérêts d’ordre public. De la sortie de la conférence nationale souveraine à nos jours, les faits sont têtus pour étayer avec puissance cet état d’esprit. L’aspiration au changement est si profonde chez les citoyens qu’il en naît une forme de manichéisme. Les bons sont de l’opposition et les mauvais sont du pouvoir. C’est simplet et loin de la réalité.


Pour la majorité, c’est maintenant qu’il faut engager les réformes sans calculs politiciens et permettre l’alternance qui n’est pas un gros mot si on admet que celle-ci peut être possible dans ses propres rangs, et qu’avec la conscience requise pour une telle œuvre salvatrice, cette majorité fasse la synthèse de son long règne pour imposer un véritable changement.


Oui à cette heure, les dés sont pipés, Faure va gagner les élections qui s’organisent dans un tel cafouillage. Mais c’est demain qui importe pour nous citoyens. La sacralité de l’alternance au pouvoir et du terme de mandat vaut bien que toutes les infrastructures. On revient certes de loin, mais je ne crois pas qu’en sacralisant une présidence à vie nous ayons les meilleures infrastructures et un meilleur développement que les pays voisins qui ont incrusté dans leur ADN la sacralité de l’alternance au pouvoir.

Ben Tchatagba Koutouk

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