La plupart des organisations non gouvernementales qui exercent au Togo mettent un réel accent sur deux choses : la santé et l’éducation. Mais c’est officiellement admis que ces deux secteurs sont malades. Surtout la santé. Pendant que les centres de santé et hospitaliers peinent à trouver du matériel adéquat pour des interventions idoines, une association monopolise les projecteurs pour mettre au grand jour les maux dont souffre la population. Mais lundi dernier, une femme est décédée des suites d’une intervention chirurgicale réalisée par AIMES-Afrique deux jours plus tôt pour des problèmes de fibrome, une affection qui a cessé d’emporter des vies, pour peu que les conditions de l’acte opératoire soient réunies. Un décès qui remet en question les motifs qui font tant courir les responsables d’AIMES-Afrique, à la recherche du plus grand nombre de patients à traiter pour la pérennisation de la dictature au Togo.
Par deux fois déjà, les Grandes assises de la Santé au Togo (GAST) ont été reportées. Ces assises sont censées panser les maux inhérents au secteur crucial de la Santé au Togo. Parce que malgré les « rafistolages », malgré les milliards injectés pour renouveler certains matériels, il s’avère que le secteur végète dans un dénuement criard. Mais bien avant que ce triste constat ne soit fait, Aimes-Afrique, une association avec à sa tête un jeune, le docteur Michel Kodom, occupe l’univers médiatique depuis belle lurette, pour vanter ses actions. C’est ainsi qu’à la radio, dans la presse et sur les écrans de télévision, on voit et lit les « interventions » réalisées par des médecins et autres chirurgiens. Et à chacune des séances de médiatisation, des patients doivent se prononcer sur les sentiments qui les animent après avoir été opérés. Pas une seule fois on n’a entendu un patient dire son insatisfaction. Autrement, avec Aimes-Afrique, c’est l’assurance du lait et du miel. Mais la réalité serait-elle différente de ce que les responsables voudraient faire apparaître ? Lorsqu’il y a mort d’homme, nous pensons que oui.
Samedi dernier, une jeune femme a subi une intervention chirurgicale pour se faire enlever un ou des fibromes dans le cadre de la mission humanitaire d’AIMES-Afrique et d’une députée UNIR de Tsévié. D’après l’entourage de la victime, il n’y avait pas le feu, puisque plus aucune femme ne meurt des suites de l’enlèvement des fibromes au Togo. Mais l’opération subie par cette femme a raté. La preuve, moins de 48 heures après l’acte, elle est tombée dans un coma et ne s’en est plus relevée. Morte pour s’être fait enlever des fibromes par les chirurgiens d’AIMES-Afrique.
Sans vouloir verser dans un excès dezèle morbide, il urge de remonter pour déterminer les conditions de stérilité de la salle d’opération et celles de l’acte opératoire lui-même, qui ont prévalu lors de l’intervention chirurgicale. « Il est rare qu’un patient décède après une intervention chirurgicale sur le fibrome. Si cela arrive, il faut s’interroger sur les conditions dans lesquelles l’opération a été conduite, surtout que le personnel soignant de cette association veut opérer un grand nombre de personnes en un temps record. Le patient pourrait être victime d’un saignement à l’intérieur. En plus, il faut se demander si ce sont des vrais médicaments qui lui ont été administrés », affirme un médecin. Le gouvernement, incapable de pourvoir les centres hospitaliers en matériels et personnel adéquats et qui tire profit de ces opérations électoralistes, ne s’est jamais senti en position de force pour commettre un expert qui suivrait les conditions d’intervention des agents de cette association.
En effet, il nous revient que la descente de l’association dans la préfecture est une initiative d’une députée d’Unir de la localité. Et comme c’est souvent le cas dans ces genres de situations, des espèces sonnantes et trébuchantes auraient été mises sur la table pour polir l’image du parti Unir. Or, le serment d’Hippocrate dit, entre autres paroles : « Au moment d’être admis(e) à exercer la médecine, je promets et je jure d’être fidèle aux lois de l’honneur et de la probité. […]. Je donnerai mes soins à l’indigent et à quiconque me les demandera. Je ne me laisserai pas influencer par la soif du gain ou la recherche de la gloire. […] Je préserverai l’indépendance nécessaire à l’accomplissement de ma mission. […] ». Mais vers la fin, le serment se termine ainsi : « Que les hommes et mes confrères m’accordent leur estime si je suis fidèle à mes promesses ; que je sois déshonoré(e) et méprisé(e) si j’y manque ». Reste à Dr Kodom et ses collaborateurs de se demander de quel côté ils se trouvent par rapport à la dernière partie de cette citation. Les responsables pourront-ils affirmer la main sur la conscience qu’ils ignoraient le but pour lequel cette ponte du parti au pouvoir les a fait atterrir dans la préfecture ? Et que leur « hôte » ne voudra pas utiliser cette opération pour pousser des citoyens qui ne demandaient qu’à recouvrer la santé ou l’usage de l’organe affecté pour lequel ils se sont présentés, vers ce parti qui a du mal à s’implanter tant il est abhorré ?
Sous d’autres cieux plus démocratiques, beaucoup n’hésiteraient pas à tenter un procès pour homicide involontaire contre les responsables de cette association.
Mais on est au Togo où les lois varient selon l’accointance de l’accusé avec le pouvoir en place. Malheureusement. Dans les jours à venir, les parents de cette malheureuse victime qui croyait en AIMES-Afrique, la conduiront à sa dernière demeure. Mais l’Ong et ses responsables continueront de sillonner les routes et préfectures, à la recherche d’autres malades à soigner afin qu’ils votent le parti de Faure Gnassingbé. « Docteur Kodom a recours à l’humanitaire pour avoir des appuis financiers qu’il utilise au profit du parti-Etat UNIR. Ce n’est pas normal. La même chose est faite par la Fondation Gnassingbé Eyadema», tranche un observateur.