« La responsabilité de la bonne tenue de cette élection incombe à l’ensemble des partis membres de la CENI »
Candidat à l’élection présidentielle du 15 avril prochain, Mouhamed Tchassona Traoré, notaire de son Etat et président du Mouvement Citoyen pour la Démocratie et le Développement(MCD), à quelques jours du démarrage officiel de la campagne présidentielle, nous parle dans cette interview exclusive réalisée par le www togoenmarche.com et www togonews.info, de son projet de société, des conditions d’organisation de l’élection et surtout sur la crise sociale que connait le pays en ce moment.
Togoenmarche.com: Bonjour Monsieur le président. A quelques jours du démarrage de la campagne, comment le MCD et son candidat se portent ?
Mouhamed Tchassona Traoré : On se porte bien. Nous sommes dans les préparatifs pour ces élections qui s’annoncent pour le 15 avril prochain s’il n’y a pas de changement. Nous entendons qu’on peut changer cette date, mais nous nous préparons à affronter cette élection.
Togoenmarche.com: Est-ce que vous souhaiteriez qu’on repousse cette date ?
Mouhamed Tchassona Traoré : Si cela peut participer à une meilleure organisation et à plus de transparence de cette élection, pourquoi pas.
Togoenmarche.com: Vous fêtes votre baptême de feu à une élection présidentielle. Qu’est-ce qui vous a motivé à vous y engager ?
Mouhamed Tchassona Traoré : Je ne suis pas un candidat indépendant. Je suis issue d’une formation politique qui est allée au congrès et qui a dit pourquoi il fallait aller à cette élection. Le parti MCD a jugé que la façon dont s’articule la gouvernance au Togo et l’expression des libertés, il y a un pan de togolais qui n’est pas pris en compte. Nous estimons qu’il faut parler en toute responsabilité à nos concitoyens, prendre en compte leurs problèmes au quotidien et faire des propositions de solutions.
Togoenmarche.com : Beaucoup continuent de penser que votre clash avec la coalition arc-en-ciel était lié à votre envie d’être candidat. Est-ce que votre candidature ne confirme pas cette allégation?
Mouhamed Tchassona Traoré : Au Togo, il y a une certaine presse qui tend à catégoriser et décrédibiliser les hommes politiques comme s’il n’y a qu’une certaine classe politique qui seule, est autorisée à mener certains actes et que les autres doivent se taire. Nous sommes de ceux-là qui sont victimes de ce dictat qui vient de la presse ou des partis politiques. Nous disons que nous ne sommes pas de ceux-là.
Les évènements que vous évoquez remontent de juin 2014. Vous vous souvenez qu’à l’époque, nous avons suffisamment expliqué pourquoi nous avons suspendu notre participation à la coalition arc-en-ciel parce que ce qui c’était passé défilait la logique d’une action commune. Nous ne pouvions accepter la posture de victimes résignés expiatoires Nous avons voulu aux yeux des togolais travailler à ce que les gens se respectent mutuellement lorsqu’on aspire à diriger ce pays et qu’on travaille en toute transparence. C’est de cela qu’il c’était agit. Nous avons dit, qu’en nous retirant, notre parti travaillerait à soutenir toute stratégie conduisant à la désignation d’un candidat commun de toute l’opposition. Aujourd’hui, cette stratégie n’a pas abouti et toutes les formations politiques sont libres de prendre toutes les décisions qui sont dans l’intérêt de la nation. Et c’est ce que le MCD a fait.
Vouloir toujours nous ramenez aux évènements qui se sont passés depuis juin est comme si, c’était une faute pour une formation politique qui a librement intégré une coalition d’aller demander le suffrage de nos concitoyens. Je profite pour rappeler qu’aujourd’hui, on ne parle même plus de la coalition arc-en-ciel. Le reste de cette coalition est allé s’allier à l’ANC pour créer Cap2015. Si elle existait, parler encore de ce problème aurait un sens. Parmi ceux qui sont partis, il y a Gerry Taama qui est candidat, il y a le CAR et le PDP mais on ne leur pose pas la même question. Les problèmes qui se posent au peuple togolais sont plus importants que de rester accrocher aux petites querelles de clochés. Nous sommes des gens de paroles et de vérité et nous ne pensons pas rester accrochés à ces genres d’évènements.
Togoenmarche.com : Etant candidat au même titre que quatre autres. Que proposez-vous de particulier ou de nouveau aux togolais pour qu’ils portent leur choix sur vous le 15 Avril prochain ?
Mouhamed Tchassona Traoré : Merci mon cher ami. Nous sommes quatre candidats face au candidat du régime en place. Cela prouve que la liberté d’expression et d’association est dynamique malgré les difficultés, les obstructions parfois artificielles que créés le régime pour décourager toute avancée. Notre formation politique a fait le choix d’aller à ces élections, pas pour faire notre baptême de feu comme vous semblez dire ni pour légitimer un candidat. Je suis même surpris que, vous ne soyez pas vous-même surpris qu’il n’y ait que quatre candidats alors qu’il était annoncé près de sept candidats qui devraient affronter l’actuel chef de l’Etat.
Notre formation politique a une particularité qui la distingue des autres. Et nous entendons faire la différence au soir du 15 avril prochain. Au MCD, nous prônons la non-violence et le dialogue, choses que ne connaissent ni le pouvoir ni d’autres formations politiques qui ont toujours menti à ce peuple. Voila autant de choses que nous proposons aux togolais. Nous avons aussi notre programme qui est propice et en avance sur les autres que nous proposons pour sortir ce pays de la situation dans laquelle il est enfermé depuis cinquante ans. Nous allons à cette élection avec la ferme conviction de vaincre Faure Gnassingbé au soir du 15 avril.
Togoenmarche.com: Le fichet électoral et l’organisation de cette élection sont décriés. Au MCD vous êtes satisfait ? Sinon pourquoi obstinez-vous à participer ?
Mouhamed Tchassona Traoré : Le MCD, en toute responsabilité a été depuis 2010 le premier à remettre en cause la nature juridique de notre CENI. Nous au MCD, nous ne sommes pas pour une CENI politique. Aujourd’hui, nous avons écrit à la CENI comme la loi nous l’autorise pour demander l’accès au fichier électoral mais on n’a pas eu de réponse. Le MCD va à cette élection avec la conviction que la responsabilité de la bonne tenue de cette élection incombe d’une façon solidaire et indivisible à l’ensemble des partis membres de la CENI. Il y en a qui sont candidats, il y en a qui ne le sont pas, nous leurs tenons tous responsables de la bonne tenue ou non de cette élection. Nous sommes une formation politique responsable, respectueuse de la légalité et au nom de cette légalité, nous allons avec la confiance qu’eux également, feront en sorte que les problèmes de la fiabilité du fichier ne soient pas au rendez-vous au soir du 15 avril.
Togoenmarche.com : Et si cela arrivait, qu’allez-vous faire ?
Mouhamed Tchassona Traoré : Nous avons toutes les aptitudes de contester cette élection et c’est notre droit absolu. Cette fois-ci en mettant en cause l’ensemble des sociétaires de la CENI, nous espérons les tenir tous responsables de cette situation. Ce sont eux qui ont mis en place cette structure paritaire dont ils sont bénéficiaires. On y trouve un peu de tout, des partis politiques qui n’existent que par leur présence à la CENI. Nous de l’extérieur, nous disons que nous les tenons collégialement responsables de la mauvaise organisation de cette élection.
Togoenmarche.com : Des gens ont contesté des élections durant cinq ans mais cela n’a rien donné ?
Mouhamed Tchassona Traoré : Tout ce que nous disons, c’est que les togolais portent leur confiance sur ma personne et vous verrez si cette élection ne sera pas différente de celle qu’on a déjà connues. Lorsqu’une personnalité tentera de détourner les résultats, elle fera face aux dispositifs que nous avons mis en place pour contester cette élection.
Togoenmarche.com : Monsieur le président, depuis quelques jours le front social est en ébullition au Togo. Comment analysez-vous cette situation?
Mouhamed Tchassona Traoré : C’est une situation des plus préoccupantes. Nous ne pouvons comprendre que quand on parle de la politique, c’est la gestion de la cité selon les grecs. La cité c’est quoi ? C’est l’ensemble des individus, des citoyens et on ne peut pas être un gouvernement responsables qui dit qu’il travaille mais qui ne met pas l’individu au centre de ses préoccupations. Mais aujourd’hui, nous avons la certitude que le gouvernement ruse par méchanceté parfois ou par incompétence. Quand on voit certains ministres dans leurs déclarations, on a l’impression que lorsqu’ils deviennent des ministres, ils deviennent des étrangers qui n’avaient jamais appartenus à ce peuple. Ils se comportent comme si, accéder à ces revendications c’est faire aumône à des mendiants. Nous disons qu’il faut respecter ce peuple. La non-transparence dans les déclarations et le non-respect et le suivi des engagements sont à l’origine de ce que nous avons aujourd’hui. Un gouvernement ne peut pas prendre des engagements au-delà de qu’il a, mais un gouvernement ne peut pas prendre des engagements et refuser de les respecter. Un gouvernement responsable agit en toute connaissance de cause et dans l’intérêt général de son peuple. Nous avons la fierté cette foi-ci que le monde syndical s’organise, bien sûr avec quelques ratés pour que demain ce soit plus pareille à aujourd’hui. Ce sont les travailleurs qui alimentent l’économie. Des gens nous ventent un Togo émergent en an 2030, mais comment vous pouvez y arriver si vous ne relevez pas le pouvoir d’achat des travailleurs ? On a l’impression comme au Togo, tout ce qu’on fait, c’est ce qui rentre dans la conservation du pouvoir. Nous disons qu’une fois aux affaires, il faut faire mieux en respectant surtout ce peuple.
Togoenmarche.com: Si vous étiez président, que ferriez-vous en ce moment pour apaiser la tension sociale ?
Mouhamed Tchassona Traoré : Je mettrais en toute transparence, à la disposition de tous les togolais ce que représente les recettes de l’Etat. Je dirais aux togolais, ce que nous gagnons avec nos partenaires des institutions internationales. Il faut assainir les finances publiques. Je dirais aux togolais les efforts que nous faisons pour que l’économie togolaise prospère dans la sous-région. Lorsqu’en toute transparence, vous dites ce que vous avez comme recettes, les travailleurs togolais sont des gens responsables qui comprendront les propositions qu’on leur fera par rapport à leurs revendications. Cette crise sociale en appelle à des discussions sérieuses autour d’une table. Le gouvernement doit discuter avec les syndicats sans exclusif. Et c’est en cela que j’en appelle à la retenue, la STT afin qu’elle accepte les autres centrales à la table de discussion et s’il le faut, en présence d’un facilitateur international de la BIT. Nous pensons que le moment est venu pour que la BIT puisse aider les Togolais à sortir définitivement de cette situation.
Togoenmarche.com: Dans ces conditions, si au soir du 15 avril, le choix des togolais se portait sur vous pour présider aux destinés du Togo. Quels seront vos axes prioritaires ?
Mouhamed Tchassona Traoré : Mes axes prioritaires, il faut d’abord résoudre cette crise sociale parce que, quelque soit celui qui sera élu, il retrouvera ce problème au soir du 15 avril prochain. Il faut mettre l’ensemble des acteurs autour d’une même table pour mettre fin à ce problème. Il faut ensuite rassurer l’ensemble des togolais autour de l’épineux problème des réformes. Opérer les réformes constitutionnelles et institutionnelles, trouver le type de régime politique à travers une commission qui va regrouper tous les togolais de tous les bords. Ceci, autour d’un gouvernement de salut national qui pendra en charge l’ensemble des problèmes économiques, sociopolitiques et culturels du pays.
Togoenmarche.com : S’il vous était demandé de présenter en quelques mots, votre programme de gouvernement à l’appréciation de nos lecteurs. Que diriez-vous ?
Mouhamed Tchassona Traoré : Nous allons renforcer les institutions de la République pour avoir une véritable forme de séparation des pouvoirs au niveau du contre poids. Nous avons pour ambition de faire en sorte qu’au niveau de la presse, de la justice, l’on participe à tous les niveaux à l’élévation des consciences des togolais afin que les togolais ne soient plus traités comme de grands enfants mais des adultes responsables. Au plan politique, nous avons l’intension de revoir l’organisation territoriale du pays. Faire en sorte que la commune soit le point de départ du développement de notre pays. Nous envisageons revoir le système de notre enseignement qui ne fait que produire chaque année des bataillons de chômeurs. Le système allemand qui produit rarement de chômeurs mérite d’être implémenté au Togo. Il faut revoir également notre système sanitaire en se basant sur l’expérience de la Suisse qui allie le secteur privé et le secteur public dans la gestion des hôpitaux. Voilà quelques grandes lignes de notre programme.