La mendicité se définit comme le fait de quémander un bien, de demander de l’aumône. C’est une profession, un art qui nourrit celui qui maîtrise ses règles. Au Togo, elles sont nombreuses, ces personnes qui vivent essentiellement de la charité des autres. Le phénomène se développe dans notre pays surtout dans les grandes agglomérations. Il n’est pas rare de surprendre sous des feux de signalisation de la capitale, des hordes de mendiants, la plupart handicapés moteurs ou souffrant d’autres déficiences physiques. Faisant preuve d’une gentille sans pareil, ils vous saluent, vous sourit et vous congratulent sur votre habillement. Difficile d’être indifférent face à ces gestes d’attention et de gentillesse venant de simples gens.
La crise économique qui secoue tous les secteurs d’activité dans notre pays, semble épargné le secteur de la mendicité. Les mendiants opèrent des chiffres d’affaires très enviables, des chiffres d’affaires qui sont parfois largement au-dessus du salaire du travailleur moyen togolais.
Fort de ce constat, l’Agence de presse en ligne Afreepress, a voulu en savoir plus en allant au contact des mendiants de Lomé.
Certains arrivent à tirer leur épingle du jeu…
Les avis recueillis diffèrent d’un mendiant à un autre. Malgré qu’ils soient nombreux à s’adonner à ce métier, certains arrivent à tirer leurs profits et d’autres non. Comme on le dit souvent en entrepreneuriat, il faut innover, inventer et créer. Certaines personnes ayant embrassé ce métier appliquent cette règle à la perfection. C’est le cas d’Ibrahim, qui affirme avoir opté pour la promenade dans les rues de Lomé au lieu de s’immobiliser à un endroit donné de la capitale. S’il lui arrive parfois de violer cette règle, il dit opter dans ce cas de figure pour les points stratégiques de la ville qui sont les feux de signalisation, les grands carrefours et les ronds points. « Si la journée est bonne, je peux gagner jusqu’à cinq mille (5000) F CFA ou parfois deux mille (2000) F CFA», nous confie-t-il dans un français approximatif.
Selon lui, il y a des jours où cette manne se décuple et d’autres où il ne gagne rien. «Ça dépend des jours », ajoute-t-il.
Selon d’autres mendiants, en dehors des points stratégiques de la ville, la devanture des mosquées constituent de véritables cavernes d’Ali Baba pour eux. « Je préfère rester sur place, aux alentours des mosquées pour ne pas laisser échapper les bonnes volontés qui viennent faire des œuvres de charité, communément appelés ’’Saraka’’», dit Aboudou Issifou.
«Quand les El Hadj viennent faire ’’Saraka’’ ici, ils peuvent donner parfois 1000 F à chacun ou nous donnent une enveloppe de 10.000 F à partager et je peux avoir peut-être 500 F, si on n’est pas nombreux», raconte-t-il.
La mendicité est un métier qui se démocratique de nos jours, un un travail considéré comme un métier d’avenir par certains de nos concitoyens. Ce n’est plus seulement des personnes de religion musulmane qui s’y adonnent. On compte également des gens pratiquant d’autres cultes et religion dans ce secteur d’activité. Des gens désœuvrés qui n’ont parfois ni job, ni domicile fixe.
C’est le cas de Da Afi, une veuve togolaise avec cinq (5) bouches d’enfants à nourrir. Son histoire est commune à celle de beaucoup de veuves. A la mort de son époux, elle fut abandonnée par sa belle-famille. C’est grâce à la mendicité qu’elle arrive à subvenir aux besoins de ses enfants.
«J’arrive à gagner des fois 500, 800, 1000 F voir 1500 F par jour et c’est avec ça que j’arrive à nourrir mes enfants et leur payer les fournitures scolaires. Heureusement que l’école primaire est devenue gratuite», s’est-elle exclamée et d’ajouter : «fdes fois, je gagne rien du tout, pas même 5 F, mis à part les nourritures et les habits».
Des mendiants VIP, il en existe
De Very important ’’mendiants’’ il en existe. Même si les concernés préfèrent faire profil bas et jouer dans la modestie, les témoignages de leurs voisinages sont édifiants. « Moi j’ai vu au feu rouge un mendiant qui faisait de la monnaie de 10.000 F CFA à un passant. Ça m’a impressionné ! », raconte Koffi, un jeune conducteur de zémidjan dans la trentaine.
« Moi je connais une dame qui a passé toute sa vie à faire la manche mais qui, dans le privé est une bourgeoise. Elle a sa maison et surtout a envoyé ses enfants à l’Université. L’un de ses enfants a même été envoyé en Europe pour poursuivre ses études. C’est dire que c’est un métier qui nourrit son homme. Je vous assure que j’ai du respect pour des gens comme ça, ils font preuve de courage », confie à Afreepress, Johannes, jeune cadre dans une entreprise de la place.
« L’autre jour, rapporte Afiwa, j’ai surpris un mendiant à un carrefour de Lomé. Mais ça alors, très tôt le matin il avait déjà un grand plat de watché (riz avec haricot) surmonté d’une foule de viandes. Quand il m’a vu arriver, il a fermé le couvercle et m’a tendu la main pour demandé de l’argent et je lui ai dit que j’ai vu ce qu’il s’apprêtait à manger, que moi-même je n’avais pas encore trouvé ça ce beau matin », relate-t-elle avec beaucoup d’humour.
En somme, il faut dire que certains mendiants arrivent à bien gagner leur vie tandis que d’autres, continuent par tirer le diable par la queue. C’est un monde qui est à l’image de notre société où certains triment pour survivre pendant que d’autres vivent comme des nababs.