L’Union Européenne revient par la grande porte et compte jouer sa partition
L’UE et le PNUD se tiennent prêts, à l’opposition de jouer la sienne
Les élections locales « risquent » de ne rien à voir avec les dernières législatives si l’opposition, dans un esprit patriotique et d’humilité se remet en ordre de bataille et réalise que sans elle, plus rien ne sera possible au Togo. Les dernières notes du représentant sortant de l’Union Européenne sont un message qui doit faire date dans l’organisation des toutes prochaines échéances au Togo. Si bien sûr l’opposition réussit à en décrypter la vraie essence et à se l’approprier.
Qui ne dit mot consent, dit-on souvent. Au terme de sa mission au Togo, Mr Patrick Spirlet a tenu à partager sa vision sur la politique togolaise et tracer par ricochet la voie à suivre à son successeur pour la réussite de sa mission dans un pays qui croupit depuis près de 50 ans dans une dictature un temps érigée en système de gouvernance, mais depuis 2005, devenue plus silencieuse et plus pernicieuse sans être moins nuisible à la liberté et à l’expression démocratique.
« Je pense qu’il est important, à la veille des élections locales, de tirer les leçons des dysfonctionnements et difficultés qui ont pu être observés durant les élections législatives, et de prendre en compte les recommandations émises par les différentes missions d’observation et d’expertise », écrit Mr Spirlet à l’attention du Premier ministre. Il a aussi saisi ‘instant pour le féliciter suite à l’organisation des législatives « dans un climat apaisé », sans plus. Pour celui qui a lu ou écouté l’allocution du représentant de l’UE à l’occasion de la présentation de vœux de fin d’année à Faure Gnassingbé, la différence de ton est on ne peut plus nette. L’homme a dit vrai en parlant de climat apaisé, mais son silence quant à la transparence et à la crédibilité du scrutin est une caution très claire au rapport intérimaire des « observateurs indépendants » de l’institution sur la valeur démocratique à accorder au scrutin qualifié de frauduleux. Patrick Spirlet souligne l’importance de l’application des recommandations des Missions d’observation électorale (MOE) pour permettre au Togo de bénéficier d’«un éventuel soutien au processus de préparation et de mise en œuvre des élections locales». Mais poursuivant, il prévient une fois encore que « les possibilités d’appui seront naturellement liées aux capacités de mise en œuvre ». En clair, plus l’Etat togolais collaborera dans la mise en œuvre des réformes allant dans l’amélioration du cadre électoral, plus grandes seront les possibilités d’appui. Or qui dit appui, dit financement.
C’est justement à propos du financement des élections que l’opposition doit se voir interpellée. Car il ne serait plus possible –à moins que les souffrances que les populations endurent dans leur lutte pour la survie quotidienne soient « un détail » pour les réfractaires au changement- que pendant que l’Enseignement est en crise, le secteur de la Santé est en décrépitude, pendant que les avancements sont en berne dans la fonction publique, que l’Etat s’arrange encore pour organiser des élections « sur fonds propres », histoire de tenir les partenaires financiers et techniques loin de ce qui risque de n’être qu’une répétition de fraudes comme lors des dernières législatives.
Il vous souvient que Gilbert Bawara, ministre de l’Administration territoriale, de la Décentralisation et des Collectivités locales avait bombé le torse, chantant à qui voulait l’entendre que le Togo n’a eu besoin de personne pour tenir un scrutin. Un scrutin qui, tout en étant exempté de violences, a consacré les diverses formes de fraudes dont le pouvoir seul connait les rouages. Dans le temps, une frange de l’opposition s’était apprêtée dès les premières heures à y participer, malgré la mauvaise foi affichée du régime lors du dernier dialogue tenu sous l’égide de Mgr Nicodème Barrigah et de Mr Robert Whitehead, Ambassadeur des Etats-Unis au Togo.
Aujourd’hui, l’accompagnement de l’UE est plus qu’indispensable et il revient à l’ensemble de l’opposition de parler d’une seule et même voix pour conditionner la tenue des prochaines élections à l’accompagnement effectif de l’institution européenne.
Le représentant sortant de l’UE emploie des termes très policés pour décrire les mauvaises conditions d’organisation du scrutin ; c’est ainsi qu’il propose : une expertise électorale de trois ou quatre mois pour «L’amendement au code électoral nécessaire pour y insérer les dispositions spécifiques relatives aux élections locales ; la rationalisation des procédures de vote, ainsi que l’élaboration d’un plan de formation à l’égard des acteurs du processus électoral, y compris les membres des bureaux de vote, ainsi que l’élaboration d’un plan de formation à l’égard des acteurs du processus électoral, y compris les membres des bureaux de vote » d’une part « Une expertise en communication/monitoring des médias qui assisterait la CENI dans l’élaboration et la mise en œuvre de son plan de communication » d’autre part. Et dans une dernière partie, la note parle des « actions de sensibilisation et d’éducation civique visant à améliorer le taux de participation et à diminuer le grand nombre de bulletins nuls observé lors des législatives ». Apparemment, l’UE et le PNUD se tiennent prêts à accompagner le Togo ; il revient à l’opposition de jouer sa partition.
En tout état de cause, l’UE recommande un délai minimum de cinq mois à compter de la date de déclenchement du processus comptant pour les locales. Et comme pour dire qu’il connait suffisamment le pouvoir en termes de promesses non tenues, Mr Spirlet suggère « l’engagement du gouvernement à prendre en compte les recommandations nécessaires ». Quoi de plus pour démontrer que l’homme ne connait que trop bien le pays qu’il vient de quitter, de même que ses gouvernants. Pour faire boire le calice jusqu’à la lie au pouvoir, il ajoute qu’il lui « paraît important d’associer les acteurs principaux, en particulier les partis politiques à la préparation et l’organisation du scrutin ». Un message que l’opposition devra faire sien et ne plus quitter la table de dialogue pour protester contre une quelconque « mauvaise foi du régime ». Ailleurs, des députés, pour se faire entendre, en étaient venus au lancer de chaises à l’hémicycle, l’essentiel étant d’établir le rapport des forces.