Le Premier ministre togolais, Arthème Ahoomey-Zunu, a participé lundi à Midrand (Afrique du Sud) à l’ouverture solennelle de la 3e session du Parlement Panafricain qui se déroule du 21 octobre au 1er novembre.
Au programme figurent la réunion des commissions et des organes de l’institution ainsi qu’une séance de présentation des nouveaux membres désignés.
Le Parlement panafricain est l’Assemblée consultative de l’Union africaine. Chacun des 53 pays membres de l'Union envoie cinq députés élus ou nommés par les parlements nationaux
Prenant la parole au nom du president du Togo, M. Ahoomey-Zunu a souligné que le Parlement panafricain incarnait, non seulement les peuples d’Afrique, mais aussi l’Afrique libérée, une Afrique soucieuse de faire de sa diversité une richesse pour construire son unité.
Et justement parlant d’unité, le chef du gouvernement a plaidé pour une Assemblée continentale au rôle plus affirmé. Aujourd’hui, l’institution n’a qu’une fonction purement consultative.
Pour M. Ahoomey-Zunu, le Parlement a rendez-vous avec l’histoire. ‘De sa capacité à innover et à jouer pleinement son rôle, dépendra l’aptitude de notre continent à mener à son terme le processus d’intégration de l’Afrique (…), a-t-il déclaré.
Voici l’intervention du Premier ministre
Le Président de la République Togolaise, Son Excellence Monsieur Faure Essozimna GNASSINGBE qui a accueilli très favorablement et avec plaisir votre invitation, avait prévu de longue date d’ honorer de sa présence effective, l’ouverture de la troisième session ordinaire de la troisième législature du Parlement Panafricain. Malheureusement des obligations de dernière minute, liées à ses hautes charges d’Etat l’ont contraint à surseoir à son déplacement de Midrand.
C’est pourquoi il m’a fait l’insigne honneur de le représenter à cette cérémonie afin de livrer à votre auguste Assemblée, son message de circonstance.
Voici donc in extenso, le message du Président de la République Togolaise.
Monsieur le Président du Parlement panafricain,
Mesdames et Messieurs les Membres du Parlement Panafricain,
Distingués invités,
Mesdames et Messieurs,
Permettez-moi, avant toute chose, d’exprimer toute ma gratitude au Président du Parlement panafricain, Son Excellence Monsieur Bethel Amadi, qui m’a fait l’insigne honneur de me convier à prendre la parole devant votre auguste Assemblée, en cette occasion solennelle.
Je tiens donc à renouveler au Président Bethel Amadi et aux membres de son bureau tout mon soutien, ainsi que celui de l’ensemble du peuple togolais, pour les actions engagées avec détermination depuis plus d’un an, afin que le Parlement panafricain puisse prendre progressivement toute sa place dans le paysage institutionnel africain.
Je voudrais également mettre à profit mon passage en Afrique du Sud, à l’occasion de la rentrée solennelle du Parlement Panafricain, pour rendre, au nom du Peuple togolais, un hommage spécial à Nelson Mandela, notre héros à tous. Ce digne fils du continent a su imprimer, pour toujours, sa marque à la marche du monde, en menant ici même en Afrique du Sud, un combat juste, un combat émancipateur pour toute l’Afrique, un combat dont la noblesse est désormais une source d’inspiration pour toute l’humanité.
Par une singulière coïncidence, l’histoire a voulu que votre Auguste Assemblée, où siègent les Représentants des peuples de notre continent, voit le jour dix ans exactement après l’élection du héros de la lutte contre l’Apartheid à la tête de l’Afrique du Sud. Cette élection a marqué le début d’une ère nouvelle pour ce grand pays, mais aussi pour tout notre continent.
Depuis ce triomphe, la lutte pour la liberté, pour l’égalité entre les hommes et la justice sociale a enregistré des avancées notables sur notre continent. Et nous devons ensemble les approfondir et les consolider pour l’enracinement de la démocratie et de l’Etat de droit qui conditionne la pleine réalisation de nos objectifs de développement économique et social.
Je suis heureux de constater que le Parlement panafricain se situe dans cette dynamique. Il n’incarne pas seulement les peuples d’Afrique. Il incarne aussi l’Afrique libérée, une Afrique soucieuse de faire de sa diversité une richesse pour construire son unité.
J’ai, pour ma part, la pleine conviction que les idéaux du père de l’Afrique du Sud multiraciale qui est arrivé aujourd’hui au soir de sa vie et qui est devenue une icône mondiale, vous inspirent et guident vos actions, en tant que Représentants des peuples africains.
Ces idéaux prolongent aussi la lutte des pères du panafricanisme, auxquels je voudrais également rendre hommage. L’existence d’un Parlement panafricain, à travers lequel tous les peuples de notre continent peuvent dialoguer et faire entendre leur voix, consacre en effet la réalisation d’une part du rêve d’unité que Kwamé Nkrumah, Gamal Abdel Nasser, Ahmed Ben Bella, Jomo Kenyatta, Ondinga Ondinga, Julius Nyerere, et bien d’autres encore, ont nourri pour notre continent, l’Afrique.
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les membres du Parlement panafricain,
Distingués invités,
Mesdames et Messieurs,
La nouvelle configuration géopolitique mondiale et l’ampleur des défis auxquels l’Afrique est aujourd’hui confrontée rendent plus que jamais nécessaire une institution comme le Parlement panafricain.
En effet, au moment où les Etats fédèrent un peu partout leurs énergies dans de grands ensembles intégrés pour assurer leur survie sur les plans économique, financier et politique, il est indispensable que des hommes et des femmes puissent porter la voix des peuples africains et exprimer leurs préoccupations ainsi que leurs aspirations profondes, dans un monde en pleine recomposition.
Cette importance primordiale du Parlement panafricain mérite aujourd’hui d’être soulignée.
Ce n’est d’ailleurs pas un hasard, si le Parlement a été l’un des tous premiers organes à voir le jour dans le sillage de la création de l’Union africaine. Il faut rappeler que c’est lors de la 36e session ordinaire de la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement de l’OUA, qui s’est tenue du 10 au 12 juillet 2000 à Lomé, que le principe même de la création d’un Parlement panafricain a été adopté, en même temps que l’Acte constitutif de l’Union africaine. L’objectif de départ a gardé toute sa pertinence. Il s’agit de permettre aux peuples de notre continent d’être mieux impliqués dans la prise de décision sur les questions qui engagent l’Afrique.
C’est fort de ce rôle primordial du Parlement panafricain dans la bonne exécution de l’agenda institutionnel de notre continent que mon pays, le Togo, s’est mobilisé très tôt pour prendre une part active au processus qui a conduit à sa création. Des juristes et parlementaires togolais se sont, en effet, pleinement investis aux côtés de leurs collègues des autres pays pour apporter leur contribution aux travaux préparatoires qui ont débouché sur l’adoption du Protocole au Traité instituant la Communauté économique africaine, relatif au Parlement panafricain. Le Togo fait également partie des onze premiers pays à avoir ratifié ce texte qui a donné naissance au Parlement panafricain.
C’est vous dire combien le Togo reste profondément attaché à l’essor d’un Parlement panafricain efficace, afin qu’il soit non seulement l’un des rouages essentiels de la machine institutionnelle de notre continent, mais qu’il devienne véritablement un outil de dialogue entre les peuples du continent, un outil au service du développement, de la démocratie et de l’Etat de droit.
Mesdames et Messieurs les Membres du Parlement panafricain,
Cela fait bientôt une décennie que vous êtes à l’œuvre. Votre mission est exaltante. Mais je sais que votre tâche n’est pas toujours aisée.
La mise en place des organes prévus par l’Acte constitutif de l’Union africaine est certes un chantier qui avance. Mais non sans difficultés.
Pour celles qui sont déjà en place, comme c’est le cas pour le Parlement panafricain, le défi majeur consiste à assurer leur fonctionnement optimal afin qu’elles puissent véritablement contribuer à la pleine réalisation des objectifs qui justifient leur création.
Pour ce qui est du cas spécifique du Parlement panafricain, vos rapports périodiques soulignent à juste titre des problèmes matériels récurrents qui se traduisent par de faibles taux de participation aux différentes sessions organisées au cours de l’année. Nos Etats qui attendent beaucoup du Parlement panafricain sont sensibles à cette situation. La mise à la disposition du Parlement panafricain de moyens adéquats pour son fonctionnement optimal est un défi collectif, et il est temps que des mécanismes soient mis en place pour y remédier de la manière la plus appropriée.
Mais l’une des questions fondamentales qui revient sur le devant de la scène, d’année en année, c’est bien celle des prérogatives qui doivent revenir au Parlement panafricain.
Après presqu’une décennie d’expérience, la question mérite toute notre attention.
Jusqu’à ce jour, le Parlement panafricain a été confiné dans un rôle consultatif et il est bien légitime que ceux qui y siègent au nom des peuples africains aspirent à un rôle plus affirmé. Cette aspiration est d’ailleurs conforme à la vocation du Parlement panafricain telle que prévue par les textes. L’objectif ultime qui lui est assigné est de devenir à terme une institution dotée des pleins pouvoirs sur le plan législatif et dont les membres sont élus au suffrage universel direct.
Mais les mêmes textes ne confèrent pour l’instant au Parlement panafricain qu’un rôle consultatif et laissent aux Etats membres le soin de changer cette situation par un amendement du Protocole au Traité instituant la Communauté économique africaine, relatif au Parlement panafricain.
Cette conception évolutive des prérogatives du Parlement panafricain est sans doute l’expression de la sagesse et du réalisme des pères fondateurs de notre Union.
En se gardant de tout dogmatisme et en laissant à l’instance suprême de décision au niveau continental, c'est-à-dire la Conférence des Chefs d’Etat et de gouvernement le soin de renforcer, le moment venu, les prérogatives du Parlement, les pères fondateurs de notre Union ont prémuni l’Union africaine contre les risques qui sont susceptibles d’entraver précocement le bon fonctionnement des organes de notre Union et donc de freiner le moteur de l’intégration africaine.
Malgré nos aspirations à l’unité et à la cohésion, force est de constater que l’Afrique reste encore une mosaïque de peuples. L’Afrique est multiple et sa diversité ne peut être une richesse que si nous parvenons à transcender les particularismes hérités de l’histoire pour les mettre au service des politiques et des objectifs communs de l’Union africaine.
Je demeure, pour ma part, convaincu que tout est une question de temps et qu’à l’instar du Parlement panafricain, tous les organes de notre Union exerceront à terme avec plénitude les prérogatives qu’il sied de leur conférer pour qu’ils épousent la marche inexorable de l’Afrique vers le progrès.
Au demeurant, il vous appartient aussi à vous, Mesdames et Messieurs les membres du Parlement panafricain, d’imprimer le bon rythme au processus devant déboucher sur le renforcement des prérogatives de votre institution en exprimant avec force et conviction, chaque fois que l’occasion se présente, vos vues sur les grands enjeux de l’heure.
Durant les neuf premières années du Parlement panafricain, j’ai noté la part active que vous avez prise dans le positionnement de l’Union africaine à travers des débats riches sur des sujets de grande importance tels que la crise financière, les changements climatiques, l’immigration, la paix et la sécurité, la crise alimentaire, les infrastructures, la lutte contre le terrorisme, etc. A chacune de ces occasions, le travail que vous avez accompli a contribué à démontrer le degré de maturité auquel est parvenue notre Assemblée, en dépit des difficultés qui ont jalonné son parcours.
Mais le Parlement panafricain peut bien faire davantage. Voix des peuples du continent, votre institution a toutes les cartes en main pour jouer pleinement le rôle de courroie de transmission entre les populations africaines dans leur immense diversité et les autres organes dirigeants de l’Union africaine. Un Parlement panafricain actif et qui joue pleinement son rôle est un gage de proximité avec les citoyens de notre continent.
Je vous engage dans cette perspective à retourner sur le terrain chaque fois que l’occasion vous en est donnée, pour vous mettre à l’écoute de l’Afrique profonde, de l’Afrique des humbles qui, quoi qu’on puisse en dire, nourrissent des attentes précises vis-à-vis du processus d’intégration de notre continent dont ils veulent être des acteurs à part entière.
Ces attentes communes sont d’autant plus profondes que les populations perçoivent le processus d’intégration à l’échelle des sous-régions et du continent comme un moyen de réparer les blessures de l’histoire qui a séparé à l’aveuglette et éloigné par des frontières artificielles des peuples jadis intimement liés.
Monsieur le Président du Parlement panafricain,
Mesdames et Messieurs les membres du Parlement panafricain,
Distingués invités,
Mesdames et Messieurs,
A l’heure de la mondialisation et de l’interdépendance, le Parlement panafricain se doit d’être à la hauteur de l’espérance qu’il suscite sur l’ensemble du continent. Pour y parvenir il doit nouer et développer des partenariats stratégiques et s’inspirer des exemples de réussite en matière d’intégration régionale.
Je me réjouis à cet égard du partenariat que le Parlement panafricain entretient depuis quelques années avec le Parlement européen et qui lui permet de construire progressivement son architecture institutionnelle et de contribuer au raffermissement de la coopération avec l’Europe en favorisant un dialogue de haut niveau sur des questions clefs, telles que la promotion de la paix et la sécurité, la gouvernance économique et le respect des droits humains.
Cette plate-forme de dialogue entre le Parlement panafricain et le Parlement européen est un outil précieux de coopération et mérite d’être optimalisée afin que l’expérience de l’Union européenne dans la construction communautaire inspire à bon escient la démarche de l’Union africaine dans les domaines pertinents. Bien entendu une telle démarche n’est porteuse que si elle prend en compte les réalités qui sont propres au contexte africain et qui appellent donc une bonne dose d’adaptation, d’innovation et d’inventivité.
Mesdames et Messieurs,
Je voudrais également saluer la présence du Président du parlement Arabe dans cette salle. L’Union Africaine et les pays arabes entretiennent des rapports très étroits depuis plusieurs années.
Merci de votre présence monsieur le Président.
Monsieur le Président du Parlement panafricain,
Mesdames et Messieurs les membres du Parlement panafricain
Distingués invités
Mesdames et Messieurs,
Le Parlement panafricain a rendez-vous avec l’histoire. De sa capacité à innover et à jouer pleinement son rôle, dépendra l’aptitude de notre continent à mener à son terme le processus d’intégration de l’Afrique, conformément aux vœux des populations urbaines et rurales, aux vœux des femmes et de la jeunesse sur l’ensemble du continent qui aspirent plus que jamais à une croissance inclusive favorisant la création d’emplois, l’accès aux soins de santé pour tous et à une éducation de qualité.
Le Togo a organisé au mois de juillet 2013 des élections législatives dans un climat de paix, de transparence totale et d’ouverture. Ce fut une victoire de plus pour la démocratie togolaise et mon pays entend apporter sa contribution à la pleine réalisation de nos objectifs communs. Il agira par tous les moyens appropriés et s’appuiera plus particulièrement sur les nouveaux parlementaires issus de ce scrutin et qui siégeront parmi vous pour faire en sorte que cette troisième législature qui s’ouvre aujourd’hui soit l’une des plus fécondes à tous points de vue de l’histoire du Parlement panafricain.
Sur ce, je souhaite plein succès à vos travaux et vous remercie pour votre aimable attention.
Monsieur le président voilà donc le message du Chef de l’Etat togolais que j’ai eu l’honneur de vous transmettre en son nom, vous savez bien son engagement pour la cause africaine, il demeure un fils fervent de l’Afrique préoccupé par le développement de notre continent.