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Exclusif : Nouvelle ère en vue pour le commerce togolais
Publié le mercredi 23 octobre 2013  |  Afriquinfos


© Autre presse par DR
une vue du marché de Lomé


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A l’heure où s’amorce la reconstruction des deux principaux marchés du Togo, des voix s’élèvent pour y formaliser progressivement les services.
La contribution du commerce à la croissance économique a été en moyenne de 0,3 point ces quatre dernières années, indique la Direction de l’Economie du Togo. Une Direction qui précise en outre que le commerce a représenté en moyenne près de 40% de la valeur ajoutée du secteur tertiaire et 8,3% du PIB (Produit intérieur brut) de ce pays, au cours de la période 2008 à 2012. 25% de ces services se concentrent dans les marchés togolais où la plupart des activités relèvent de l’informel, avec quotidiennement des centaines de milliers d’agents économiques. Victimes de graves sinistres début janvier 2013 et en cours de reconstruction, les deux principaux marchés du pays (à Lomé et à Kara) concentrent l’essentiel des transactions commerciales dans le secteur des services. Cette donne ne devrait pas s’inverser dans les années à venir.

Cependant, une formalisation des services dans ces lieux de vente pourrait jeter les bases d’une mutation profonde dans le monde commercial togolais dominé par les femmes qui représentent 52% de la population du Togo. Ceci est encore plus vrai dans le secteur de la vente de tissus pagnes qui a bâti la réputation des commerçantes togolaises («Nana Benz») en Afrique de l’ouest et du centre. Ces «Nana Benz» constituent les principaux poumons financiers de ces marchés, grâce à la diversification de leurs produits commercés et de leurs investissements. «Le grand marché de Lomé jouit d’une forte compétitivité prix dans le domaine de tissus pagnes dans la sous-région ouest-africaine », souligne un fonctionnaire de la Comptabilité nationale sous le sceau de l’anonymat. «Plus de 70 % des activités sur ces marchés se faisaient dans le réseau informel avec peu de recettes directes pour l’Etat (…) Une grande partie de ces commerçantes de pagnes a préféré jusqu’ici opter pour des facilités fiscales négociées à huis clos au lieu de s’associer pour maîtriser la chaîne de production de leurs articles (…) », fait constater Dr Ekoué Amaïzo, économiste, consultant international en Management de projets. « Au lieu de continuer à aller acheter des tissus en Hollande, Autriche, Chine ou ailleurs pour venir les vendre au Togo et dans la sous-région, elles auraient gagné à s’associer pour acheter une usine textile pour la délocaliser sur le sol togolais et produire localement. Ainsi, quand elles créent le modèle d’un dessin sur pagne, elles peuvent sortir le pagne directement au lieu de se le faire voler par des partenaires asiatiques très peu scrupuleux sur les droits d’auteurs, par exemple », fait remarquer Dr Amaïzo. « 80 à 95% de femmes animent les marchés du Togo. Le commerce du pagne imprimé est une marque de fabrique de l’économie togolaise à préserver en Afrique. En formalisant, en diversifiant et en mettant le cap sur une industrialisation de leurs activités, ces commerçantes ont la possibilité d’exploiter la production cotonnière locale en important à côté de ceci la technologie de production. Sans nul doute, à partir de cet instant, elles verront surtout baisser les coûts de production de leurs pagnes pendant que leurs marges de bénéfices sur ces produits vont augmenter (…) », renforce Dr Charles Birregah (expert comptable).«Elles limiteront indirectement à ce jeu la concurrence et seront obligées de se former aux stratégies commerciales de l’heure, aux techniques modernes de vente, de marketing, de management, de gestion, techniques mues par des visions sur cinq ou dix ans. Toutes choses qui commandent que les transactions à venir dans ces marchés soient couvertes par les assurances», poursuit Dr Birregah, dans son évocation du redimensionnement des activités économiques autour du pagne au Togo.

Elargir le champ de la promotion d’une autre forme de commerce

Au-delà de la nécessaire refonte des activités des «Nana Benz», ils sont également nombreux à estimer dans le secteur économique togolais que l’après-sinistres de janvier 2013 est le moment opportun pour repenser la dynamique commerciale générale dans les marchés togolais, ainsi que leur structure interne. Avec à la clé des répercussions positives sur toute la chaîne de l’économie locale ; en l’occurrence les régies financières que sont les impôts et les douanes. « Il faut trouver ou inventer un moyen pour aider dorénavant les commerçants à faire des dépôts en dehors des heures normales dans les banques et institutions de micro-finance. Il s’avère aussi impérieux de retoucher la loi sur les assurances et rendre obligatoires les assurances sur les baux commerciaux. Cette nouvelle donne constituerait une source importante de sécurisation des produits commercialisés », analyse pour sa part Mockar Sow, Secrétaire général du patronat togolais. «Car, ajoute-t-il, les commerçantes togolaises ont le flair commercial d’une manière générale ; elles savent rebondir. A travers ces séries de réformes, on peut conférer une nouvelle réputation aux marchés togolais».

D’aucuns vont plus loin dans les perspectives prometteuses à même de s’offrir au monde commercial togolais, si les mutations souhaitées par les uns et les autres sont matérialisées. «Je ne lierais pas l’existence du secteur informel à l’étiquetage des prix sur les produits sur les marchés. Il suffit d’une volonté gouvernementale pour que l’étiquetage des prix devienne une pratique au Togo. Mais qui en a la réelle volonté? Ni la plupart des commerçants qui fixent encore les prix à la "tête du client", ni le gouvernement ne sont très pressés pour faire évoluer les choses dans ce sens », critique l’économiste Amaïzo. Tout en émettant au passage des appréhensions sur le sujet: « Les contrôles du respect des étiquetages risquent de poser d’autres problèmes compte tenu du niveau de corruption ou d’incivisme parmi ceux qui sont censés contrôler les mauvaises pratiques des commerçants et commerçantes. Mais une structure publique-privée dont la gestion est confiée aux responsables des marchés sur une base électorale pourrait parfaitement faire accepter de telles mesures qui vont dans le sens de la transparence des prix et de l’égalité de tous devant le prix affiché». «On doit sensibiliser ces commerçants du Togo autour de l’indispensable recours à l’épargne dans les IMF (Institutions de microfinance) et banques. C’est une question de culture à inculquer à ces opérateurs économiques. Des statistiques nous ont démontré que les marchés du Togo sont des zones de forte concentration de crédit et d’épargne dans les IMF, sur la base du million et demi de clients dont disposent nos institutions à l’échelle du Togo», soutient Ange Ketor (directeur de l’Association professionnelle des systèmes financiers décentralisés du Togo).

Les principaux concernés par la formalisation des services dans les marchés épousent ces conjectures économiques émises ici et là, mais émettent des craintes au sujet de l’unité d’action dans leur corporation.

Atadegnon-Nougblega, présidente de l’Act (Association des commerçants du Togo qui comprend aussi des étrangers) caricature ces appréhensions : « Figurez-vous qu’un grand nombre de commerçants se revendiquent de l’Act, mais n’ont pas formellement rempli les formalités d’adhésion» ! A demi-mot, la présidente de l’Act soulève en outre la question de la confiance des commerçants togolais dans le fisc de leur pays: «Durant les opérations de dédommagement des sinistrés de janvier 2013, plusieurs commerçants ne se sont pas faits enregistrer au service des impôts comme cela leur était demandé, par hantise d’être harcelés par la suite par les percepteurs fiscaux». « Il faut introduire et promouvoir dorénavant au Togo une certaine culture du risque: le risque est la conjonction d'un aléa (incendies, inondations, accidents...) et d'une fragilité (manque de prévisions, d'assurances, de matériels...). C'est le rôle de l'État de minimiser la fragilité à défaut de pouvoir contenir l'aléa... C'est ce que je demande au gouvernement togolais. À lui d'assurer la sécurité extérieure des marchés (…) C'est une des raisons pour lesquelles Sursaut-Togo (association à caractère politique) a toujours préconisé la sortie progressive de l'informel et la généralisation du formel. Cela améliorerait aussi la connaissance de l'état réel de notre économie, une meilleure gestion des recettes suivie d'une meilleure redistribution des richesses», propose de son côté le politique Kofi Yamgnane. «Une évidence est implacable: il y a du terrain à occuper en matière de produits d’assurances à offrir dans les marchés togolais mieux structurés», assure M. Simeynou, président de la Faîtière des assurances du Togo.

Un constat que partage Neguib Traore, responsable de la clientèle d’une Société de gestion et d’intermédiation à Lomé : «Compte tenu des énormes sommes d’argent qui circulent dans les marchés togolais, nous avons conçu des services adaptés aux commerçantes ; les sinistres de janvier 2013 ont tout remis en cause, mais nous gardons un œil attentif sur ce pan de l’économie togolaise».

(Par Edem Gadegbeku)

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