. Grâce à l’alternance politique, les pays limitrophes se développent et les corps habillés bénéficient des avancées sociales »
A l’approche de l’élection présidentielle du 25 avril 2015, le président de l’Association des victimes de la torture au Togo (Asvitto), le Commandant Olivier Amah en exil en Europe, vient d’adresser un courrier à l’armée togolaise. Dans le courrier dont nous vous proposons lecture, il appelle ses camarades à la neutralité et au refus des votes multiples. Il dresse aussi le tableau comparatif des conditions de vie des forces de l’ordre et de sécurité des pays limitrophes.
Lire son courrier
Camarades officiers, sous-officiers, hommes de rang, gendarmes, policiers, gardiens de sécurité du territoire, douaniers, agents de sécurité des prisons du Togo,
Soyez dignes et observez une neutralité absolue dans ce processus électoral.
J’invite les gendarmes à avoir les yeux sur leur salle de conférence et sur d’autres salles dans la nouvelle caserne à Adidoadin (en face du domicile de Pascal Bodjona), car comme vous le savez, la gendarmerie s’est impliquée activement dans la fraude au cours des présidentielles précédentes en désignant certains gendarmes pour pré-voter des milliers de bulletins avant le jour J. Ces bulletins sont ensuite distribués discrètement aux gens acquis au régime et aux personnes d’origine Ahoussa dans le quartier de Doulassamé qui vont les glisser dans les urnes le jour J. Signalez aux commissaires de la CENI membres de l’opposition ou aux journalistes, ces actes que certains de vos chefs continuent de poser.
Vous, forces de défense à Lomé, Témédja, Sokodé, Kara, Mango, Dapaong, abstenez-vous de voter deux fois voire trois fois car en le faisant, vous participez à faire reculer votre pays.
Prenez l’exemple des pays limitrophes du Togo. Grâce à l’alternance politique, ces pays se développent et les corps habillés bénéficient des avancées sociales. Aujourd’hui, les militaires Burkinabé gagnent mieux que vous. Un Lieutenant burkinabé gagne au moins 250 000 francs CFA alors que son homologue togolais, non logé, touche 168 000 francs CFA. Pour les missions à l’étranger, un Caporal béninois en stage en Allemagne perçoit 1 000 euros (mille euros) par mois à titre d’indemnités de stage alors qu’un Colonel togolais perçoit à peine 300 euros (trois cents euros) par mois.
Sur le plan de la reconnaissance internationale, il y a quelques jours, le Ghana a reçu un milliard de dollars du Fonds Monétaire International, soit cinq cent milliards de francs CFA pour ses avancées démocratiques notables. Notre pays, le Togo n’a jamais reçu d’un seul coup, une somme avoisinant cinquante milliards CFA, parce qu’il est le mauvais élève de la sous-région, mais aussi parce qu’on vous utilise pour voler les suffrages des citoyens.
Camarades, si vous ne changez pas d’attitude, si vous n’aidez pas le Togo à changer, vous serez toujours les derniers, la risée de vos collègues de la sous-région.
OLIVIER AMAH
Campagne électorale des corps habillés à Dankpen
Le Cpt Amadou Bachirou, le Lt Sapadja et une policière intimident les populations
En violation de leur vœu de neutralité, le Capitaine Amadou Bachirou, le Lieutenant Sapadja de la Gendarmerie et une policière organisent des rencontres à Dankpen pour appeler à voter Faure Gnassingbé. Ils font planer le spectre de la violence si leur candidat n’est pas élu.
Depuis vendredi 10 avril 2015, les différents candidats à l’élection présidentielle ont été officiellement autorisés à battre campagne et leurs affiches envahissent peu à peu les différentes localités du pays. Pour le candidat du Combat pour l’alternance politique en 2015 (CAP 2015), la mobilisation a commencé dans le nord du pays et tout est mis en œuvre pour conquérir le cœur des Togolais. Mais si d’un côté, on prône les voies légales pour conquérir le fauteuil présidentiel, chez les tenants du pouvoir, l’on semble toujours se fier aux anciennes méthodes : acheter le vote des électeurs, faire planer le spectre de la violence, opérer un forcing et se maintenir au pouvoir.
La technique est tellement ancrée dans les habitudes que les partisans du régime Rpt/Unir ont du mal à s’en défaire – si tant est qu’ils en ont eu l’intention. Dans plusieurs localités, outre les menaces du ministre de l’Administration territoriale Gilbert Bawara qui chante la non-violence sans la transparence, un plan d’intimidation des populations est mis en branle.
C’est le cas, entre autres, de Dankpen où règne en véritable bourreau le préfet Dadja Maganawé. Depuis quelques jours, il est appuyé dans sa mission d’intimidation par un trio de corps habillés originaires du milieu. « Voter UNIR, car c’est la seule condition pour qu’il y ait la paix dans le pays ». Tel est le message que véhiculent dans leur tournée le mécanicien militaire Capitaine Amadou Bachirou, le Lieutenant Sapadja de la Gendarmerie et une policière.
Alors que les forces de sécurité et de défense ont un devoir de neutralité et d’impartialité sur les questions politiques, ces trois militants de l’Union pour la République (Unir) continuent de sillonner Dankpen, organisent des rencontres avec les populations et appellent ouvertement à voter Faure Gnassingbé. Soit dit en passant, cet appel à voter pour le candidat du pouvoir met en péril la mission des forces de l’ordre et de sécurité en cette période sensible de l’histoire du pays. Elle soulève aussi la question du vote anticipé des corps habillés dont les résultats sont souvent proches du plébiscite.
Pour convaincre les populations, ces « émissaires » de Faure Gnassingbé dans le Dankpen évoquent l’origine ethnique des candidats et mettent un accent particulier sur le porte-flambeau du CAP 2015, Jean-Pierre Fabre. « Fabre est un éwé. Il est du Sud alors que Faure est notre frère », argumentent-ils. Un raisonnement qui ne trouve pourtant pas échos favorables auprès des populations. Et pour preuve, il leur a été demandé lors d’une rencontre de démontrer que Faure est vraiment leur frère, car plusieurs faits démontrent à suffisance le contraire. « Vous dites que Faure est notre frère, pourtant, ce n’est pas Fabre qui a enfermé Pascal Bodjona et Kpatcha. Ce n’est pas Fabre qui a interdit à notre député de venir au village », a rappelé une dame.
En effet, l’inculpation, la détention et l’interdiction faite à Targone Sambiri NWakin de se rendre dans sa circonscription électorale a été la forfaiture de trop du régime Rpt/Unir dans cette localité du nord du pays. Depuis le début de cette affaire, les populations se sont montrées intraitables face aux dérapages du pouvoir.
On se rappelle la mobilisation des populations suite à l’arrestation en début de soirée du dimanche 22 mars des leaders du CAP 2015 dans le canton de Nandouta. Elles ont pu faire libérer les détenus et ont même exigé la levée de l’interdiction qui planait sur le député Targone. Ce dernier a pu rejoindre Dankpen vendredi dernier.
Il nous revient que malgré ce refus des populations de céder à la panique et de suivre les ordres des émissaires du pouvoir, la graine de la violence semble germer chez les militants de l’Unir. Dans le village de Kidjaboun, ils ont demandé de faire interdire par le gouvernement tout meeting de l’opposition.