« J’étais seul, l’autre soir, au Théâtre Français,/Ou presque seul ; l’auteur n’avait pas grand succès./ Ce n’était que Molière … » (Alfred de Musset, Une soirée perdue)
Selon Wiktionnaire, le dictionnaire en ligne, une cérémonie d’investiture est une cérémonie formelle au cours de laquelle un individu endosse des fonctions ou une position d’autorité et de pouvoir. Le terme est généralement utilisé en référence aux devoirs d’un chef d’Etat ou chef de gouvernement. On parlera par exemple de l’investiture du président.
Et c’est ce qui a été fait vendredi dernier à Abuja où le tout nouveau président Muhammadu Buhari a officiellement pris fonction en prêtant serment devant un parterre d’invités parmi lesquels le président sud-africain Jacob Zuma, le Secrétaire d’Etat américain John Kerry et le ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius. C’était un événement grandiose dû surtout à la manière civilisée dont le dernier scrutin présidentiel a été organisé. Les règles du jeu ont été claires pour tous et le vaincu, le président sortant Goodluck Jonathan, ne s’est pas empêché de féliciter le vainqueur. Au-delà de l’investiture, c’était donc la démocratie qui était célébrée vendredi avec les hôtes de marque.
Devant Dieu et devant les hommes, l’ancien putschiste qui se présente dorénavant comme un « démocrate concerti » – il avait déjà passé plus d’un an aux affaires (31 décembre 1983 – 27 août 1985) en tant que président du Conseil militaire suprême de la République fédérale du Nigeria – s’est engagé à remplir loyalement les fonctions que le peuple nigérian lui a confiées, s’attaquer, comme il l’a promis lors de la campagne électorale, à la corruption, un mal qui gangrène l’économie de son pays et neutraliser le groupe terroriste Boko Haram qui sème la désolation au nord du pays et dans les pays voisins.
Autre pays, autres mœurs. Faure Gnassingbé qui a succédé à lui-même à la suite d’un nouveau braquage électoral et qui a déjà « endossé des fonctions » par le biais de la prestation de serment effectuée depuis le lundi 4 mai dernier, n’est pas satisfait. Rappelons-le, cette cérémonie s’est déroulée entre le manager et sa minorité qui ont accaparé les richesses du pays. Pas d’invité de marque. Tout était fade. Mais dans la soirée, la bourgeoisie locale s’est retrouvée autour de son chef lors d’un banquet. Du président de la Cour constitutionnelle au petit ministre de la République, tous ont dansé pour procurer un peu de joie au prince qui avait l’air triste en dépit de ce qu’on appelle ici « sa brillante victoire ». Eh bien, le fils d’Eyadema entend organiser une session de rattrapage à laquelle certains de ses « frères et amis » seront invités. Après moult reports pour déficience de convives de marque, la cérémonie pourrait finalement avoir lieu cette semaine. Peut-être qu’il a profité du voyage nigérian pour faire la cour à certains indécis. Mais in fine, ce sera juste un folklore qui ne connaîtra pas le même succès que ce que nous venons de voir à Abuja. A vaincre sans péril, on triomphe sans gloire.