Accueil    MonKiosk.com    Sports    Business    News    Femmes    Pratique    Le Togo    Publicité
NEWS
Comment

Accueil
News
Économie
Article



 Titrologie



Liberté N° 1954 du 1/6/2015

Voir la Titrologie

  Sondage


 Nous suivre

Nos réseaux sociaux



 Autres articles


Comment

Économie

Rapport 2015 du FMI et gouvernance économique inquiétante :Un endettement continu sans croissance, des préfinancements « mortels », un risque de retour au cercle vicieux de la dette… l’économie va mal
Publié le mercredi 3 juin 2015  |  Liberté


© aLome.com par Atapointe
Conférence Africa Rising: table ronde de clôture
Vendredi 30 mai 2014. Maputo. Table ronde de clôture sur le thème "prochaines étapes et actions communes". Photo : Christine Lagarde, directrice générale du FMI


 Vos outils




 Vidéos

 Dans le dossier

Togo - . « A ce jour, des estimations font état de ce que le total des préfinancements atteindrait déjà les 240 milliards » cari lib 1954 du 1er juin 2015Depuis février-mars dernier, le Représentant résidant du Fonds monétaire international (FMI), Werner Keller, a quitté le Togo. Le dernier rapport du FMI sorti en avril 2015 et qui pointe du doigt la mauvaise gestion des finances publiques, vient justifier ce départ. Si le ministre de l’Economie et des Finances semble se complaire dans la capacité du pays à s’endetter parce qu’ayant encore des marges de manœuvre par rapport au taux d’endettement, le FMI recommande dans son rapport de « considérer le ratio dette/PIB de 70 % comme un plafond et non comme le niveau optimal vers lequel converger; et de fonder la gestion de la dette sur des analyses régulières de la viabilité de la dette et non sur le critère d’endettement ». Mais de par les investissements dans les infrastructures qui se passent actuellement par le biais des préfinancements, on se demande si ce taux « cher » à Ayassor n’est pas déjà atteint et si le pays ne roule pas encore sa bosse vers un retour au cercle vicieux de la dette.

Du 12 au 23 janvier 2015, une équipe des services du FMI était en mission à Abidjan, Lomé, Ouagadougou et Dakar, les quatre capitales qui hébergeaient les représentations des services du FMI au sein de l’Uémoa. En avril dernier, le rapport N° 15/100 a été rendu public sur la situation économique des huit pays de l’Uémoa et la vérité est que l’économie togolaise va mal, très mal. Sans prétendre exploiter tout le rapport, on s’est attardé sur le tableau de la matrice d’évaluation des risques, au regard des investissements dans les infrastructures qui se font voir dans le pays, ainsi que sur la dette publique dont beaucoup en savent trop peu sur les moyens par lesquels ces investissements sont financés.

« L’assainissement des finances publiques et les réformes stratégiques nécessiteront une forte volonté politique. L’insuffisance de la capacité d’exécution et les obstacles administratifs compromettent l’application efficace des réformes. Comme de nombreux pays envisagent d’importants investissements dans l’infrastructure, un retard des réformes de la gestion des finances publiques et des investissements inefficients pourrait créer des problèmes en termes de viabilité budgétaire, extérieure et de la dette, ce qui aurait des retombées négatives sur la croissance et la lutte contre la pauvreté. Le report des réformes de la surveillance pourrait présenter des risques pour la stabilité financière », indique par exemple la matrice d’évaluation des risques. Depuis 2010, le Togo n’est plus en programme avec le FMI alors que les responsables de la finance du pays avaient fait des pieds et des mains pour être éligibles à l’initiative des Pays pauvres très endettés (PPTE), synonyme d’effacement d’une grande partie de la dette du pays. Mais si le FMI recommande dans son dernier rapport de « considérer le ratio dette/PIB de 70 % comme un plafond et non comme le niveau optimal vers lequel converger; et de fonder la gestion de la dette sur des analyses régulières de la viabilité de la dette et non sur le critère d’endettement », c’est qu’il existe un réel problème au sein de l’Uémoa en général et du Togo en particulier.

Lorsqu’on consulte le budget exercice 2015, un jeu de calcul montre que le service de la dette, c’est-à-dire la part du budget allouée au remboursement de la dette du Togo, représente près de 16%. Ce qui veut dire qu’il ne reste que 84% du budget pour financer les dépenses. Mais alors, où est-ce que les autorités en charge des finances trouvent-elles les fonds pour financer tous les travaux d’infrastructures qui sont en cours tant dans la capitale qu’à l’intérieur du pays ? « Par un système de préfinancement, avec ses conséquences », répondent des spécialistes.

En langage moins technique, des sociétés de travaux publics (dans lesquelles les autorités sont bizarrement actionnaires) obtiennent des banques commerciales des facilités de financement des travaux contre des taux d’intérêts souvent élevés, mais l’Etat, par l’intermédiaire de l’argentier du pays, se porte garant de payer dès que le compte séquestre du trésor public auprès de la BCEAO sera pourvu. Sans parler des retro-commissions et des dessous de table. La conséquence du système de préfinancement par l’utilisation du compte séquestre du trésor auprès de la BCEAO est que ce compte est automatiquement débité chaque mois au profit des sociétés qui sont préfinancées par les banques. A ce jour, des estimations font état de ce que le total des préfinancements atteindrait déjà les 240 milliards de francs CFA. Et lorsqu’on intègre ces préfinancements dont on ignore les taux d’intérêt à la dette et qu’on refait le ratio dette /PIB, on se demande si le plafond de 70% n’est pas déjà atteint. Des indiscrétions au sein d’une société de BTP font état de ce que le débit automatique du compte séquestre du trésor auprès de la BCEAO serait suspendu afin que le Togo ne soit pas en cessation de payement des salaires des fonctionnaires. Qui donnerait l’ordre de cette suspension ? Cherchez bien au sein de la BCEAO et vous trouverez.

L’endettement du Togo est de moins en moins soutenable par rapport aux autres pays de l’Uémoa. Dans l’étymologie de l’économie, qu’un pays s’endette ne pose pas de problème a priori, du moment que l’investissement réalisé par l’endettement permet de soutenir la croissance. Mais ce n’est pas le cas du Togo. Dans le rapport du FMI, la dette intérieure des pays de l’Uémoa entre 2011 et 2019 se présente comme suit :

Dette intérieure 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019
Bénin 14,0 12,6 11,4 11,7 12 12,7 13,4 13,7 13,3
Burkina Faso 5,9 5,8 7,4 7,6 5,9 7,1 9 10,4 10,7
Côte d’Ivoire 17,6 16,5 17,3 14,3 12,7 12,6 12,5 12,4 12,2
Guinée Bissau 23,8 26,5 29,7 30,4 28 25,8 24,7 22,7 21
Mali 4,7 4,3 5,8 3,9 3,6 3,3 3,1 2,9 2,7
Niger 6,1 4,4 3,5 5,1 7,1 6,9 5,4 3,8 2,4
Sénégal 11,3 12,4 14,4 14,7 15,1 15,3 15,4 15,7 15,3
Togo 28,4

28,6 29,9 31,6 31,1 29,5 29 28,2 26,8
UEMOA 12,6

12,2 13,1 12,2 11,6 11,7 11,8 11,8 11,4
Le tableau de la dette intérieure indique que le Togo reste le pays où cette dette est et sera la plus élevée, du moins jusqu’en 2019 d’une part et que par rapport à la moyenne au sein de l’union, le Togo contracte plus du double de la dette. Mais si l’endettement à outrance n’a pas d’impact sur la croissance du pays, la gouvernance économique est alors à remettre en question. Des analyses indiquent que les autorités engagent beaucoup de dépenses improductives sans impact réel sur la croissance économique du pays. En plus, il semble de plus en plus qu’au Togo, on s’endette pour rembourser des dettes passées au lieu de générer de nouvelles activités génératrices de croissance. Raison pour laquelle le FMI recommande, pour la politique budgétaire et l’endettement, de « relever progressivement le solde primaire pour stabiliser le niveau d’endettement ; d’améliorer le suivi des financements de l’investissement public et la gestion de la dette publique ». S’agissant des réformes financières structurelles, l’institution recommande de « définir des mesures ciblées pour favoriser une croissance solidaire et résorber la pauvreté ».

La semaine dernière, le ministre de l’Economie et des Finances qui cumule déjà huit ans à ce poste, était en Côte d’Ivoire pour l’élection du nouveau directeur de la Banque Africaine de Développement (BAD). Tout porte à croire qu’il sera à Washington le 5 juin prochain pour une autre réunion. Apparemment, l’évacuation des affaires courantes pour cause de démission du gouvernement est très fructueuse pour lui. Huit années à ce poste pour quel bilan ? Les Togolais veulent croire qu’il n’a plus rien à prouver, n’ayant pas réussi à capitaliser l’adhésion du Togo à l’initiative PPTE. Mais la future équipe confirmera-t-elle l’assertion de Voltaire qui déclare : « Le meilleur gouvernement est celui où il y a le moins d’hommes inutiles » ?

Abbé Faria

 Commentaires