L'homme politique franco-togolais Kofi Yamgnane publie "Afrique, introuvable démocratie". L'occasion de dénoncer ce qui mine le continent. Interview-choc.
L'homme politique franco-togolais Kofi Yamgnane, "Breton d'après la marée noire", qui n'a pas pu se présenter aux présidentielles du Togo en 2005 et 2010, annonce sa candidature pour celle de 2015. Il annonce dans un livre (1) son entrée en campagne et analyse les freins à une véritable démocratie dans certains pays africains.
Le Point.fr : Pensez-vous avoir la moindre chance, cette fois, de pouvoir vous présenter ? Et de gagner ?
Kofi Yamgnane : Non, mais je veux les bousculer. Il faudra qu'ils trouvent une autre excuse que la dernière fois puisque j'ai réglé le problème de ma date de naissance en donnant des preuves [sa candidature à la présidentielle a été invalidée au motif qu'un doute subsistait sur sa date de naissance, NDLR]. C'est simple, mes parents m'ont déclaré du temps colonial, le 16 mars 1946. Je suis né le 11 octobre 1945 et pas le 31 décembre 1945 comme on l'a prétendu. Quand le missionnaire a demandé à mon oncle et mon père quand j'étais né, ils ont répondu que c'était au début de la saison sèche. Mon père, ce jour-là, était à la corvée de débroussaillage, qui se faisait toujours le 11 octobre. Soixante ans plus tard, quand je demande un renouvellement de passeport, on me donne un passeport togolais avec la date du 31 décembre 1945. Je suis allé à Bassar, lieu de ma naissance où on m'avait inscrit, aux archives. Il manquait juste cette page-là ! J'ai parlé au maire, puis au préfet qui m'a dit "Ce n'est pas moi, ce sont les termites !" Elles avaient trouvé le registre et grignoté une page, une seule ! À qui voulait-il faire croire cela ?
Lors de la précédente campagne, vous avez craint un empoisonnement. Est-ce toujours le cas ? Avez-vous peur ?
Bien sûr que j'ai peur ! Ce que je ne souhaite pas, c'est mourir bêtement. Qu'on puisse croire que je suis mort de maladie ou d'un accident de la route alors qu'on m'aura cisaillé les freins dans la nuit. Je voudrais que s'ils me tuent, ils me tirent dessus et que tout le monde puisse savoir qu'ils m'ont assassiné. Mais ils n'oseront pas parce qu'ils savent que je ne suis pas un Togolais ordinaire. Ce que je crains le plus, c'est donc l'empoisonnement. Cela m'oblige à ne jamais manger ou boire nulle part. Quand je pars en campagne, à Lomé, je prends une bouteille d'eau pour la journée et, le soir, je rentre chez moi. Et dans l'intérieur, je ne descends jamais dans un hôtel. Je vais chez les missionnaires catholiques et mes collaborateurs sont logés en ville. Ils trouvent toujours quelqu'un, c'est la sécurité sociale africaine.... suite de l'article sur Autre presse