Capharnaüm gouvernemental et « KLASSOUteries »

Politique

Publié le lundi 20 juillet 2015 | Liberté hebdo

© aLome.com par Parfait
Le PM Ahoomey-Zunu a passé la main à Selom Klassou en fin de matinée ce 10 juin. Le sortant s`est dit disposé à servir à nouveau le plus tôt possible l`Administration de son pays.
Lomé, le 10 juin 2015. Primature. Passation de service entre les sieurs Ahoomey-Zunu et Selom Klassou, en attendant la formation du nouveau Gouvernement.

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Edition de 20h du JT du jeudi 02 juillet 2015

- 3/7/2015

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Activités Gouvernementales 2015

Togo - Quand le premier ministre va représenter son ... ministre à une manifestation officielle

De par les bizarreries répétitives offertes au reste du monde, le Togo a acquis une triste réputation et est devenue une curiosité. Les différents gouvernements et la gestion même du pays mettent souvent en exergue certaines comédies à la togolaise. La célébration au Togo du 226e anniversaire de l’indépendance de la France a encore mis à jour le grand capharnaüm et la foire que constitue le gouvernement Selom Klassou, avec en prestation le Premier ministre himself qui va représenter…son ministre !

Le 14 juillet observé au Togo…
La France était en fête hier mardi. L’ancienne puissance colonisatrice célébrait le 226e anniversaire de la révolution de 1789 marquant officiellement son accession à la souveraineté internationale. Cette célébration a été marquée, comme chaque année, par l’imposant défilé militaire organisé sur les Champs Elysées. Mais la fête n’a pas eu lieu qu’à Paris. Elle a été observée au Togo aussi, à l’initiative de l’ambassadeur de France.

Comme de tradition, Marc Fonbaustier, le représentant diplomatique de la République française auprès du Togo a organisé une réception à laquelle ont été invités autorités administratives et politiques, responsables de formations politiques, de médias, entre autres. C’était l’occasion pour l’hôte français de faire l’état de la coopération entre les deux pays et de flasher notamment sur les actions dans le domaine de l’éducation. Le diplomate n’a pas manqué de peindre un Togo radieux, sous différents angles : un pays qui s’affirme dans la région ouest-africaine et sur le continent en général, en glosant sur la conférence internationale sur la piraterie maritime prévue à Lomé du 2 au 7 novembre prochain, s’ouvre au monde, se métamorphose sur bien de plans, le décrire comme un creuset des diversités. Marc Fonbaustier a évidemment fait une halte sur l’élection présidentielle et s’est extasié sur son déroulement.

…devant le PM qui représentait son ministre !
L’assistance, nous l’avons relevé tantôt, était composée des autorités et acteurs politiques, entre autres. Au premier rang, se trouvait le Premier ministre et chef du gouvernement Selom Komi Klassou. Une présence qui, dans l’absolu, n’a rien de dramatique. Il s’agit de la fête nationale de la (grande) France, l’ancienne puissance colonisatrice, et l’on se doit de l’honorer par une représentativité maximale du sommet de l’Etat. Mais seulement voilà, cette présence cache une bizarrerie, une « togolaiserie » : le Premier ministre qui suppléait son subalterne (sic), le ministre Robert Dussey !

« En l’absence du ministre des Affaires étrangères en mission à l’étranger, le Premier ministre Komi Selom Klassou a effectué mardi une visite spontanée à l’ambassade de France où se déroulait un cocktail à l’occasion de la fête nationale du 14 juillet », nous apprend republicoftogo. Même son de cloche sur la TVT au cours du journal de 20 heures. En clair, c’est le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération, Robert Dussey qui était au départ censé représenter officiellement l’exécutif. Mais finalement empêché, il n’a pas pu honorer le rendez-vous et s’est fait représenter par son…chef de gouvernement !

L’autre facette des « KLASSOUteries »
Le nouveau Premier ministre, c’est un secret de Polichinelle, se particularise par ses reflexes à se fondre de façon intempestive en gratitudes à l’endroit de Faure Gnassingbé sur toutes les tribunes qui s’offrent à lui et le louanger systématiquement pour sa nomination à la Primature. Ce qui le fait caricaturer légitimement du Balla Fasséké de Faure Gnassingbé et fait parler un confrère de « KLASSOUterie », pour qualifier ce penchant de courtisan du Premier ministre. Mais visiblement, les « KLASSOUteries » sont à multiples facettes.

Il est constant que ce sont les subalternes qui représentent souvent leurs supérieurs hiérarchiques. C’est ainsi que les Directeurs de cabinets ou autres Secrétaires généraux de ministères représentent leurs ministres à des manifestations officielles lorsque ces derniers se retrouvent empêchés. Il arrive aussi que des membres du gouvernement se fassent suppléer par des collègues. Mais Selom Klassou inaugure une nouvelle représentativité. Il peut représenter son ministre qui, dans l’ordre protocolaire, est sous ses ordres ! « Il ne lui manquait que de servir le refrain habituel : le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération aurait bien voulu personnellement être présent à cette réception. Mais empêché au dernier moment par une mission à l’étranger, il m’a fait l’insigne honneur de le représenter. C’est donc en son nom que je prends la parole », glose un concitoyen, relevant qu’ « on n’est pas à la dernière curiosité avec Klassou ».
Illustration du capharnaüm traditionnel et de l’oisiveté des membres du gouvernement

On l’évoquait tantôt, le Togo est devenu une curiosité à travers le monde. Il se singularise très souvent dans certaines choses, s’illustre comme un pays atypique, s’arrachant de ce fait le statut incontesté de pays gag où toutes les bizarreries ont droit de cité. La gestion même du pays s’en ressent très souvent. Ici, l’exécutif peut passer plusieurs mois sans tenir un seul conseil des ministres. Même s’il existe un organigramme, les différents gouvernements se sont illustrés comme des capharnaüms. Il existe des super ministres, plus puissants même plus que le chef du gouvernement et qui font preuve d’une insubordination ouverte à son égard, le snobent et ne rendent compte qu’au chef de l’Etat. Les démarches gouvernementales sont souvent entachées de vices de procédures et de forme. C’est dans cette moule qu’il faut placer cette représentation du ministre par le Premier ministre. Il y a même une confusion sur l’identité du ministre qui devrait représenter officiellement l’exécutif, entre Robert Dussey et Gilbert Bawara, simplement illustrative du grand bordel qu’il urge de relever.

A suivre republicoftogo et la télévision nationale, c’est Robert Dussey qui était au départ le faire. Ce qui est tout à fait logique, étant le ministre des Affaires étrangères. Mais le discours de l’ambassadeur français a donné une autre impression. « Monsieur le Ministre de la Fonction publique, du Travail et de la Réforme administrative ». Telle est la première personnalité dans l’ordre protocolaire évoquée par le diplomate français dans son allocution de circonstance. Tout porte à croire donc qu’entre-temps, à cause de l’absence Dussey, c’est son collègue Gilbert Bawara à qui a échu ce poste dans le gouvernement rendu public le 28 juin dernier, qui a été désigné pour le suppléer, et son nom communiqué à la représentation diplomatique française. Raison pour laquelle c’est son titre que Marc Fonbaustier a cité dans l’ordre protocolaire, malgré la présence du chef du gouvernement. Visiblement la venue du Premier ministre n’était pas prévue, ou peut-être cela a été décidé au dernier moment, mais le changement n’a pas été communiqué à la représentation diplomatique française par le protocole. « Ici c’est Togo ! », dira l’autre.

Par ailleurs, cette comédie offerte n’est que la résultante de l’oisiveté ambiante dans laquelle baignent le chef du gouvernement et ses ministres depuis la formation du gouvernement. Depuis l’officialisation au forceps de la nouvelle équipe – il s’était visiblement plus agi de l’annoncer pour couper l’herbe sous les pieds des rumeurs sur la santé de Faure Gnassingbé qu’autre chose - et leur prise de fonction dans les différents départements, Selom Komi Klassou et ses ministres ne savent en effet que faire de leurs journées, surtout en l’absence du tout premier conseil des ministres censé permettre de les situer dans leurs attributions, avec des ministères créés au forceps et dont les champs de compétences s’imbriquent. De ce fait, ils passent leur temps à se ronger les pouces au bureau. L’ouverture et la fermeture des séminaires sont des aubaines pour eux de se rendre utiles, et ils sautent là-dessus. Dans cette galère (sic), ce sont les anciens préposés reconduits qui s’en sortent le mieux, au contraire des nouveaux qui débarquent dans un monde qui leur est étranger et ne sont pas encore moulés aux habitudes de la maison. Klassou aussi est embarqué dans cette galère. Ne sachant sans doute pas quoi faire pour remplir sa journée, il n’a trouvé mieux que de suppléer son ministre empêché au dernier moment par une mission à l’étranger. Le site-vuvuzela du pouvoir parle utilement de « visite spontanée à l’ambassade de France où se déroulait un cocktail à l’occasion de la fête nationale du 14 juillet ». Le Premier ministre a préféré se donner cette peine, pour un simple cocktail, fût-il pour célébrer nos ancêtres les Gaullois ! Les Togolais qui attendent impatiemment le gouvernement sur d’autres terrains plus utiles devront apprécier. En attendant la prochaine « KLASSOUterie »…

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