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Grand frère Gerry Taama, faisons la politique, ou faisons autre chose !
Publié le vendredi 24 juillet 2015  |  icilome


© aLome.com par Parfait
Gerry Taama, candidat malheureux à la présidentielle d`avril 2015 au Togo


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Togo - Grand frère Gerry, Il serait bon, pour commencer, que je rappelle comment nous nous sommes connus, vous et moi. C’était en 2009, et vous aviez posté un commentaire sous un article sur mon premier blog que, disiez-vous, vous veniez de découvrir. En ce temps, nous étions très peu de blogueurs au Togo. Et à travers votre commentaire j’étais allé sur votre blog « Terres togolaises ». Vous y postiez, régulièrement, de belles analyses sur l’actualité togolaise et africaine. J’étais ainsi devenu un de vos lecteurs. Une année après, nous nous sommes rencontrés à l’Institut français de Lomé, dans le cadre de la remise du Prix littéraire France-Togo 2010 dont nous étions, vous et moi, finalistes : moi avec mon roman-manuscrit « L’Ange retrouvé », vous avec votre roman «Parcours de combattants».




Grand frère Gerry, nous étions ainsi devenus des connaissances. Nous échangions de temps à autre par mail ou Facebook, surtout sur nos projets littéraires. Il y a eu, grand frère, ce moment où nous nous étions brouillés, vous m’accusiez d’avoir fait un article où j’insultais les militaires togolais. Mais nous avions fini par nous comprendre. Je reconnais en vous ce grand-frère qui sait se mettre au niveau de ses petits frères pour les écouter. L’année passée, en mars 2014, durant un passage à Lomé, vous m’aviez même fait l’honneur de m’inviter chez vous au bureau, pour qu’on parle littérature, notre passion commune. Le temps ne nous avait pas permis de nous voir.

Grand frère Gerry, parlons maintenant politique, puisque c’est à ce propos que je vous écris. J’ai eu l’honneur d’être l’un des premiers Togolais à savoir que vous alliez entrer en politique avec la création de votre parti politique, le Nouvel Engagement Togolais, bien longtemps avant votre déclaration officielle sur le sujet. Vous m’aviez envoyé le programme du parti. Je l’ai aimé, le programme, parce que vous y aviez étalé des idées précises et des projets de société allant dans l’intérêt du peuple… Vous y aviez, surtout, adopté un ton rassembleur. J’ai commencé à parler de vous à mes amis et connaissances. Mais ils ne vous croyaient pas, parce que, disons-le, vous avez un profil qui, dans notre pays, ne colle pas très bien au statut d’opposant.

Pourquoi le cacherions-nous ? Nous savons tous que le pays est ainsi, et nous en sommes tous responsables, chacun à un degré. Votre profil donc : Originaire du Nord considéré, nous le savons tous, comme la partie du pays qui est propice à la dictature. Militaire : l’armée, le plus grand allié de la dictature. Vous étiez très mal parti pour être un opposant charismatique au Togo.

Mais, grand frère Gerry, vous aviez l’occasion de déjouer les pronostics, de montrer à ceux-là qui vous ont tué avant même que vous ne naissiez en politique, vous aviez l’occasion de leur montrer que vous êtes sincère, que vous n’êtes pas l’espion du pouvoir qu’ils ont fait de vous sans vous connaître. Renaître, comme l’oiseau phénix, des cendres de ce bûcher de procès d’intentions sur lequel vous avaient brûlé beaucoup de compatriotes. Hélas, grand frère Gerry, vous vous êtes, au fil du temps, avec vos contradictions, vos dires et « dédires », vos oui-non non-oui, grand frère, vous vous êtes, avec vos choix très critiquables pour un opposant sincère, vous vous êtes, avec vos décisions incompréhensibles pour tous ceux qui veulent de tout cœur un changement dans notre pays, grand frère Gerry, vous vous êtes, avec vos posts sur Facebook où vous critiquez plus cette opposition dont vous vous dites un maillon que le régime même auquel vous déclarez vous opposer, vous vous êtes, grand frère, donc, avec vos je-suis-ici-je-suis-là, vous vous êtes enlisé dans une position où on n’est plus loin de vous traiter d’un énième faux opposant à la solde du régime.

Les dirigeants des grands partis d’opposition ne sont pas rassembleurs et vous écartent trop souvent, vous défendez-vous. Oui, on peut vous le concéder. La soif du pouvoir et son abus, reconnaissons-le, ne sont pas que du côté du régime. Mais, grand frère, depuis quand un souriceau s’en va se réfugier dans une assemblée de chats parce qu’il a été chassé par ses grands-frères souris ? Vous préférez vous coller au pouvoir que vous dites combattre parce que l’opposition dont vous vous réclamez vous méprise ? Les opposants des grands partis politiques n’adoptent pas les meilleures méthodes pour venir à bout du régime. D’accord. Mais quelle est cette méthode-là qui consiste à un opposant de reconnaître la victoire du parti auquel il prétend s’opposer, après avoir déclaré lui-même que les élections ont été entachées d’irrégularités ? Quelle est cette méthode-là qui consiste à un opposant de déclarer, même avant la proclamation des résultats d’une élection à laquelle il a participé, que « l’ère de la contestation est révolue » cherchant ainsi à discréditer les autres partis d’opposition au cas où ils contesteraient les résultats ?

Fairplay ? Oui. Mais fairplay devant quel régime ? Ce n’est pas parce qu’au Sénégal, en 2012, Abdoulaye Wade avait félicité son adversaire même avant la proclamation de la totalité des résultats, ce n’est pas parce qu’en 2015 Mahamadou Buhari a été félicité par celui qu’il avait battu, Goodluck Jonathan… qu’il faut, pour faire l’opposant glamour, féliciter Faure Gnassingbé après une élection que nous savons tous frauduleuse, au moment où tous les autres candidats-opposants criaient au vol.

Quelle preuve ai-je qu’elle a été frauduleuse ? Eh bien, cette preuve est que toutes les élections déjà organisées par ce régime violent et de mauvaise foi ont été frauduleuses, et c’est pour cette raison que, pour faire propre, Dieu seul savait devant qui, le dictateur-fils parlant des centaines de victimes d’une élection passée qu’il avait volée, avait hurlé, un jour, à qui voulait l’entendre, plutôt à qui ne voulait pas l’entendre, puisque personne ne voulait l’entendre, que : « Plus jamais ça au Togo. » Donnez-moi alors, vous, grand-frère, la preuve que ce régime qui a toujours volé les élections en le niant sur-le-champ mais en le reconnaissant après, donnez-moi la preuve qu’il n’a pas volé ces dernières élections, et ne le reconnaîtra que quand il y aura une nouvelle élection où elle voudra donner des garanties de crédibilité. Le Togo n’est pas le Nigeria, encore moins le Sénégal. Vous êtes militaire et vous le savez mieux que moi, n’importe quelle stratégie ne marche pas sur n’importe quel champ !

Cher grand frère, vous savez, vous avez pris une décision très courageuse d’entrer en politique, surtout dans un pays comme le Togo. Vous avez décidé de passer à l’action, au lieu de vous plaire tranquillement dans la confortable (mais un peu lâche) posture du blogueur qui se contente d’observer et critiquer.

Et, croyez-moi, je vous aurais, personnellement, mieux compris si vous aviez clairement déclaré que vous entriez en politique pour servir la dictature, parce que, toute émotion mise de côté, je partage l’avis de ce personnage de notre aîné écrivain Sami Tchak qui déclare dans le roman Al Capone le Malien : «… Même sous les pires dictatures, il faut des femmes et des hommes pour gérer les affaires de leur patrie. » Oui, je vous aurais peut-être mieux compris si vous vous étiez déclaré, à visage ouvert, politicien du parti au pouvoir. Mais, l’avant-goût de ce que vous êtes en train de nous faire voir, cher grand-frère, nous n’en voulons pas, parce que nous avons déjà connu trop d’hommes politiques nous ayant, sous l’étiquette d’opposant, roulés dans la farine. Et nous n’en voulons plus, n’en supporterons plus un seul ! Donc, pour paraphraser ce commentaire posté par notre jeune frère blogueur Aphtal Cissé sous un de vos posts Facebook : cher grand frère, faisons la politique, ou faisons autre chose !

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