En quinze ans, la croissance a permis de faire diminuer l’extrême pauvreté dans de nombreux pays. Mais l’un des défis de demain concerne la protection sociale des salariés comme des indépendants.
À l’échelle planétaire, seuls 28 % des travailleurs bénéficient d’une protection sociale minimum. Entretien avec Gilbert Houngbo, directeur général adjoint de l’Organisation internationale du travail (OIT).
LA CROIX : Depuis 2000, en matière de croissance et d’emploi, peut-on considérer que le verre est à moitié plein ou à moitié vide ?
Gilbert Houngbo : On a souvent tendance à rester sur le constat que, depuis la crise de 2008, le tableau s’est obscurci. La croissance patine et il faudrait créer 600 millions d’emplois d’ici à 2030 pour retrouver le niveau d’avant la crise.
Mais, il ne faut pas oublier qu’avant la crise, il y a eu pas mal d’avancées. La principale est la diminution de l’extrême pauvreté, en particulier en Chine, où la croissance a été très forte. Mais ce qui est remarquable, c’est que la croissance a été soutenue aussi dans les pays les moins avancés.
En Afrique, le PIB augmente de près de 5 % par an depuis dix ans. C’est une situation inédite d’autant plus notable que cette croissance, qui était jusque-là l’apanage des pays riches en matières premières, concerne désormais un grand nombre de pays du continent. L’un des aspects positifs de cette période, c’est que beaucoup de pays ont commencé à mettre en place des réformes et cela commence à donner des résultats.
Malgré ces avancées, le chômage concerne de plus en plus de personnes. Est-ce que ça veut dire que la croissance ne suffit plus à créer de l’emploi ?
G. H. : Oui, nous constatons que la croissance est de moins en moins riche en emplois. Tant que la population active croîtra plus vite que l’économie, nous aurons du mal à créer des emplois pour tout le monde et donc à résorber le chômage. Quand la population active augmente, c’est parfois un atout, il faut, par exemple, se féliciter du fait que les femmes participent de plus en plus au marché du travail, mais c’est aussi une contrainte.