Un homme de 28 ans sera jugé à partir de mardi devant la cour d’assises de Bobigny pour des viols commis sur une adolescente, avec l’aval de sa mère, lors de séances d’exorcisme destinées à "chasser le mauvais esprit".
L’accusé, de nationalité togolaise mais installé en France depuis 14 ans, est poursuivi pour "viols sur mineure", "agressions sexuelles" et "violences avec usage d’une arme". Incarcéré depuis février 2011, il encourt une peine de 20 ans de réclusion.
La mère de l’adolescente, âgée de 41 ans, doit répondre de faits de "complicité". Elle est accusée d’avoir fourni des préservatifs au violeur présumé afin qu’il "désenvoûte" sa fille, alors âgée de 14 ans, lors de séances d’exorcisme.
A l’époque des faits, la victime vivait au domicile de sa tante, à Pierrefitte-sur-Seine (Seine-Saint-Denis), où elle avait emménagé à la demande de sa mère, pour suivre des études dans un établissement jugé plus strict après avoir redoublé sa classe de collège.
C’est dans une chambre de cet appartement, situé dans la Cité des Joncherolles, qu’elle aurait été violée par l’accusé, alors concubin de sa tante, à cinq ou six reprises entre 2010 et début 2011.
Dénoncé par son beau-frère, lui-même alerté par les sœurs de l’adolescente, l’accusé a finalement été interpellé le 24 février 2011, moins d’une heure après un dernier viol sur sa victime. Placé en garde à vue, il a reconnu les faits.
"Lors de son audition, il a lié ces viols à des pratiques vaudous", raconte une source proche du dossier. Il s’agissait pour lui de "réussir" sa vie et de "chasser le mauvais esprit", ajoute cette source.
Lors d’un voyage au Togo en 2007, des marabouts lui auraient ainsi prédit la mort de sa mère. Pour éviter ce décès, deux solutions lui auraient été proposées : couper le bras d’un albinos ou bien coucher avec une jeune femme mineure.
Des oeufs, du talc et des bougies
L’adolescente, lors des viols, était priée de se taire. "Il lui disait qu’il agissait pour son bien", "pour la libérer d’un esprit moitié-poisson moitié-femme qui habitait en elle", raconte la source proche du dossier, qui évoque une situation de "manipulation psychologique".
Une manipulation dont se serait également rendue coupable la mère de la victime, soupçonnée d’avoir encouragé le viol de sa fille, par superstition religieuse. La quadragénaire, qui nie les faits, aurait notamment fourni des préservatifs à l’accusé, qu’elle aurait par ailleurs rémunéré, afin qu’il chasse des "sorciers entrés en elle".
Cette mère de quatre enfants, actuellement libre sous contrôle judiciaire, participait régulièrement avec ses filles, à des cérémonies organisées par le violeur présumé, qui leur demandait de se dénuder et prétendait les "protéger" en leur passant un oeuf et du parfum sur le corps et sur le sexe.
A plusieurs reprises, lors de ces cérémonies, il leur aurait entaillé les mains et les pieds à l’aide d’une lame de rasoir, avant d’insérer dans les plaies une poudre noire considérée comme magique.
Plusieurs talismans et produits destinés à la pratique de rites vaudous avaient ainsi été retrouvés par les policiers chez l’accusé, rangés dans une valise. Parmi eux : des flacons et des bouteilles remplies de liquide brunâtre, des œufs, du talc et des bougies.
Ce procès intervient alors que l’exorcisme, visant à expulser les démons qui se seraient emparés d’une personne, se développe en France, à la faveur de la crise, selon plusieurs spécialistes.
Quatre personnes ont ainsi été récemment condamnées par la cour d’assises de l’Essonne, pour avoir séquestré et torturé une jeune femme qu’elles pensaient possédée par le diable. Le verdict du procès de Bobigny est attendu vendredi.