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Législatives : Interview exclusive de Gilbert Bawara, ministre de l’administration territoriale
Publié le lundi 22 juillet 2013  |  Savoir News


© Autre presse par DR
Le ministre de l’Administration territoriale, Gilbert Bawara


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Les togolais iront aux urnes le 25 juillet pour renouveler pour la quatrième fois leur Parlement depuis le début du processus démocratique en 1990. La campagne électorale qui a démarré depuis le 6 juillet, prendra fin le 23 juillet à minuit. Une mission de la Cédéao conduite par les présidents Alassane Ouattara de la Côte d’Ivoire et Jonathan Goodluck du Nigeria a rencontré vendredi dernier les principaux acteurs politiques en vue d’un scrutin "apaisé". Quel est le sens de cette mission ? N’aurait-elle pas venu plus tôt ? Quels sont les enjeux de ces législatives ? Autant de questions posées à Gilbert Bawara, ministre de l’administration territoriale, dans une Interview exclusive à l’Agence Savoir News.

Savoir News : Quel sens donné à cette mission ?

Gilbert Bawara : La mission des présidents ivoirien et nigérian fait suite au dernier sommet ordinaire de la Cédéao, tenue à Abuja les 17 et 18 juillet. Au cours de ce sommet, les participants ont exprimé leur satisfaction par rapport à l’évolution de la situation politique au Togo et aux conditions de sérénité et de sécurité dans lesquelles le processus électoral est en train de se dérouler. Les chefs d’Etat et de gouvernement de la Cédéao, particulièrement les présidents ivoiriens (président en exercice de la Cédéao) et nigérian Goodluck (président hôte du sommet) tiennent à ce que la paix, la sécurité et la stabilité soient préservées au Togo et dans l’ensemble de la sous-région. Nous avons déjà énormément des foyers de tensions, d’agitations, de violences et de conflits notamment dans la zone Sahélo-sahélienne. Nous sommes mobilisés autour du Mali pour aider ce pays à retrouver la voie de la cohésion et de l’harmonie. Donc, il est important d’attirer l’attention des partis politiques, des candidats, de la société civile, des médias sur le fait que la mise en péril de la paix et de la stabilité au Togo, serait également une mise en péril de la stabilité dans la sous-région. Surtout quand on attend parfois un certain nombre de discours incendiaires et des menaces sans aucun fondement de certains secteurs de la société civile.

Tout cela, les a amenés à venir à Lomé. Trois messages sont à retenir de cette mission.

Le premier message : cette mission vise à encourager et féliciter les acteurs togolais notamment le gouvernement, le CST, la Coalition "Arc-en-ciel", les autres partis qui, tout en n’ayant pas pris part au dernier dialogue, ont soutenu les discussions par leurs prières et ont adhéré aux résultats de ce dialogue. Ces discussions ont permis de décrisper le climat politique, de prendre des mesures d’apaisement et de dégager un consensus majeur sur les conditions d’organisation des élections.

Le deuxième message : A travers cette mission, la communauté ouest-africaine nous dit ceci : nous nous réjouissons de constater que le processus électoral et la campagne électorale s’opèrent dans un esprit d’apaisement, de tolérance et de respect mutuel. Il n’y a pas d’incidents, pas de violences. Nous encourageons toutes les parties prenantes à agir pour que l’ensemble du processus soit également caractérisé par un climat d’apaisement et de sérénité.

Le troisième message : Cette mission a séjourné à Lomé pour exhorter les uns et les autres à recourir aux voies légales, en cas de contestations. La communauté ouest-africaine veut nous dire exactement ceci : nous n’avons plus besoin de violences et de morts d’hommes. Bref, nous n’avons plus besoin de foyers de tensions et de violences dans la sous-région.

Voilà un peu le contexte ayant présidé à cette visite des deux chefs de l’Etat. C’est également un signal qui démontre que toute la sous-région nous regarde, la communauté internationale nous observe. Ceux qui sont tentés de mettre en péril l’ordre public et la sécurité des biens et des personnes, doivent savoir que non seulement le gouvernement togolais ne le permettra pas, mais que l’ensemble de la sous-région ne va pas le tolérer.

Q : Tout le monde attendait une telle mission au moment où la tension était vive. N’est-ce pas le médecin qui se pointe après la mort de son patient ?

R : , non, pas du tout. C’est comme si vous apprenez qu’un parent, un ami ou un frère est dans une situation périlleuse et finalement, vous découvrez qu’il n’en est rien. ......Et que cela relève d’affabulations, que les appréhensions ne sont nullement fondées. Mais, vous vous réjouissez, vous l’appeler pour lui dire : ah, j’avais des appréhensions, il y a des gens qui m’ont fait peur, mais je constate que vous êtes saint et sauf.

Q : Que voulez-vous dire par là ?

R : C’est pour dire qu’il n’y a pas de péril en la demeure. Donc, il n’y pas un médecin après la mort. Les togolais font preuve d’une grande maturité. Nous avons connu des épisodes douloureux, notamment à l’occasion des élections qui ont parfois culminé avec des tensions et des violences qui se sont soldées par des morts, des mouvements des populations à l’intérieur et à l’extérieur du pays. Mais depuis 2007, toutes les élections organisées sous l’autorité et l’impulsion du chef de l’Etat Faure Gnassingbé, ont été des élections apaisées, pacifiques et dans la sécurité. Ces élections ont été transparentes, crédibles, fiables et généralement incontestables pour tous les togolais de bonne foi. Sauf, ceux pour qui la démocratie n’est valable que quand ils gagnent.

Q : Mais les résultats de la présidentielle de 2010 ont été constatés ?

R : s c’est contesté jusqu’aujourd’hui. Et je constate aussi que ceux qui les contestent n’ont aucun argument sérieux. Et je ne crois même pas qu’ils soient pris au sérieux par une grande majorité des togolais, encore moins par la Communauté internationale. Nous avons tiré des leçons des dysfonctionnements et faiblesses du passé et cela a conduit à renforcer les mesures de sécurisation du processus électoral et à améliorer le cadre électoral et les conditions d’organisation des élections. J’en veux pour preuve, toutes les mesures qui ont été prises : les modifications apportées au cadre électoral, le réaménagement du découpage électoral, la volonté d’écoute du gouvernement. En réalité, qu’est-ce que les togolais constatent ? Il y a une partie de l’opposition politique au Togo qui ne croit pas au dialogue politique, qui ne croit pas à la démocratie et à l’Etat de droit. Quand il y a dialogue, ils sont dans une posture autoritariste et dans un esprit manichéen. Si ce qu’ils veulent n’est pas obtenu, le dialogue n’est pas bon. Ils vont à des élections, compétissent et souscrivent aux conditions d’organisation du scrutin. Une fois défaits dans les urnes, les élections ne sont pas bonnes. En 2007, personne n’a contesté le scrutin. Ces élections ont permis de dégager une majorité et une minorité. Dans un Etat de droit, dans une démocratie, quand on respecte les principes et les valeurs républicains, on doit à la fois respecter les droits de la minorité, mais surtout respecter la majorité dans ces prérogatives. Ce n’est pas ce que nous avons constaté. Il y a certains qui ont continué à vouloir bloquer la majorité dans ses initiatives, à bloquer même l’Etat dans son fonctionnement.

Dernièrement, on nous a demandé un dialogue, nous y avons souscrit de bonne foi. Toutes les préoccupations ont été débattues : l’amélioration du cadre électoral et des conditions d’organisation des élections, les mesures d’apaisement consistant à régler en partie le sort de ceux qui sont détenus dans le cadre d’une enquête liée à des incendies d’une gravité extrême, le contentieux politico-judiciaire lié à la question des 9 députés ANC (définitivement réglé), la date du dépôt des candidatures a été reportée, la date de la fin de la campagne électorale et celle du scrutin ont été réaménagées, l’Etat a décaissé rapidement les moyens pour créer les conditions d’équité et d’égalité dans cette compétition électorale. La CENI a briefé ceux qui dialoguaient sur les mesures prises concernant la transmission et la remontée des résultats etc…

Mais au lendemain de ce dialogue, on nous parle toujours du report des élections. Ce qui signifie quoi ? C’est la dénégation de la démocratie, C’est la dénégation de l’Etat de droit, c’est la dénégation des valeurs et des principes républicains. C’est une manière d’avoir du dialogue une conception unilatéraliste : si vous ne faites pas tout ce que je veux, le dialogue n’est pas bon. Si les résultats n’aboutissent pas aux résultats que je veux, c’est que les élections n’ont pas été bonnes. Je suis certain que les togolais tireront les conclusions. Qui sont ceux qui parlent de démocratie, mais ne sont pas des démocrates, qui sont ceux qui parlent de liberté et n’acceptent pas la liberté des autres, qui sont qui parlent d’Etat de droit et refusent de se soumettre aux règles de l’Etat de droit ?

Q : Le CST a demandé vendredi - devant les deux chefs d’Etat - le report des élections

R : On a passé trois ans à manifester à la plage et on voudrait sacrifier les intérêts du Togo et des togolais sur l’hôtel de considérations purement partisane ! Les masques sont tombés. Les togolais savent désormais que le CST n’est pas un mouvement citoyen. C’est un mouvement qui défend et poursuit des intérêts partisans, politiques. On a toujours usé de manœuvres dilatoires et on continue à user de ces manœuvres. Je ne crois pas qu’il y ait beaucoup de togolais, encore moins les chefs d’Etat qui sont venus, qui aient cru qu’il y aurait des raisons et des motifs sérieux qui pourraient justifier le report des élections aux calendes grecques.... Il faut attendre jusqu’à ce que le CST ait le sentiment de pouvoir gagner. Ce n’est pas la conception du gouvernement d’une compétition électorale loyale. Nous avons créé toutes les conditions légales, techniques et opérationnelles pour permettre aux et aux autres de mener la campagne électorale à travers tout le territoire national, sans entraves, sans difficultés. Tout se passe bien et de manière pacifique.

Q : Récemment, un groupe d’organisations de la société civile a appelé à l’arrêt du processus, évoquant des risques de violences

R : Ces organisations de la société civile sont installées confortablement dans leur salon à Lomé. Ces organisations défendent des intérêts partisans, elles ont pris fait et cause pour le CST. Elles ont toujours demandé la mise en place d’un gouvernement d’union nationale où leurs responsables joueraient des rôles.

Quels sont les enjeux de ces élections ?

R : Les enjeux sont simples. C’est ce que nous dicte l’intérêt supérieur de notre pays. Le Togo a besoin de stabilité et de paix. Notre pays a besoin de continuer à raffermir l’Etat de droit, à enraciner et approfondir l’Etat de droit, la démocratie. Notre pays a besoin de réformes politiques pour renforcer et améliorer la gouvernance institutionnelle. Le Togo a surtout besoin d’un coup d’accélérateur dans son élan de développement économique, il a besoin de prospérité pour satisfaire pleinement les besoins et attentes de tous les togolais. Pour cela, il faut de bonnes élections. Il faut des élections libres, démocratiques, ouvertes, compétitives dont les résultats soient fiables, transparents et crédibles. Le gouvernement ne se préoccupe pas de celui qui va gagner. Mais, en même temps, nous sommes à l’écoute des Togolais et nous connaissons leurs aspirations. Ce que les togolais demandent, ce n’est pas de faire table rase de tout ce qui a été réalisé ces dernières années. Ils ne demandent pas un éternel recommencement. Ils sont insatisfaits sans doute, ils ont besoin qu’on aille plus loin, plus vite et qu’on améliore ce qui a été déjà fait. Les togolais savent qu’il y a des acquis et que c’est sur ces acquis là qu’on peut bâtir le progrès.

Q : Etes-vous confiant d’une majorité absolue du parti au pouvoir ?

R : Il faut à la fois être confiant et humble. Je suis confiant, parce que les togolais sont extrêmement lucides. Ils regardent, ils ne sont pas dans le sensationnel. Ils savent de quel côté se trouvent les capacités et les compétences pour tirer le Togo vers plus de progrès politique, institutionnel, économique et social. Ils savent qu’il y a certains qui mettront du temps à apprendre et qui risqueraient de mettre en péril l’élan de développement économique que nous avons entamé, grâce à l’implication des uns et des autres. Le choix est à mon avis, simplifié pour les togolais. Ils vont choisir d’améliorer ce qui a déjà été fait et non chercher à le détruire ; ils vont chercher à avancer plutôt qu’à remettre en cause les fruits des efforts collectifs. Ils refuseront l’incertitude et l’imprévisibilité, parce que personne ne sait exactement quel est le projet et le programme de ceux qui ont passé des années dans les manifestations de rues.

Q : Pourquoi vous n’êtes pas candidat. Vous avez sûrement peur. Vrai ou faux ?

R : Je disais tantôt que nous avons beaucoup d’humilité, parce que nous respectons les togolais. Nous ne pouvons pas dire ou prétendre que les togolais auraient déjà fait leur choix. Nous pouvons comptez sur leur lucidité et leur clairvoyance. Ils feront des choix éclairés.

Q : Vous ne répondez pas à la question. Vous avez peur ?

R : Si je vous dis qu’en me présentant, j’aurais été, ce serait trop prétentieux. Si je vous dis que si je me présente, je ne serai pas été élu, c’est aussi une injure envers les électeurs, parce que cela signifie qu’à l’avance, je sais ce qu’ils auraient fait. Moi, je ne suis pas dans cette posture là. Je respecte profondément les togolais dans la diversité de leurs opinions. Peut être qu’il y a des togolais qui n’apprécient pas Gilbert Bawara en tant que personne, en tant qu’acteur politique, en tant que ministre. C’est leur droit et je les respecte. Mais, je suis certain, qu’il y a aussi d’autres qui ont de l’estime pour ma modeste personne et pour la petite contribution que j’essaie d’apporter aux côtés du Président Faure. FIN

Propos recueillis par Junior AUREL

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