Le général Amadou Haya Sanogo, n’est pas n’importe qui au Mali. C’est lui qui a été l’auteur du coup d’État contre le président Amadou Toumani Touré en mars 2012.
C’est par lui que beaucoup de décisions politiques sont passées pendant plus d’un an avant l’élection d’Ibrahim Boubacar Keïta à la tête du Mali il y a juste trois mois.
D’aucuns disent même qu’il a fallu l’onction de Sanogo pour que IBK soit positionné puis élu à la tête du Mali.
Patron du camp de Kati, Hamadou Sanogo et ses troupes ont versé dans l’horreur en torturant et en assassinant froidement les bérets rouges proches Toumani Touré qui avaient tenté, 2012, un coup contre le nouvel homme fort du Mali et sa clique.
Ils avaient aussi exercé une violence inouïe sur des leaders politiques, des journalistes et défenseurs des droits de l’homme dans leur camp de Kati.
Trois mois seulement après l’élection du nouveau président malien, celui-ci a décidé de donner force à la loi.
La justice a donc voulu écouter le tout puissant général qui, à la vitesse supersonique, a grimpé les échelons de l’armée allant du grade de capitaine à celui de général en un an.
La convocation régulièrement émise par le juge d’instruction Yaya Karembe, faisant injonction à Sanogo de se présenter par devant lui pour être auditionné sur les causes et les conditions de ces meurtres et exactions, a été considérée par le zélé général et son entourage comme un affront.
Comptant naïvement sur son aura de général, sur la force des armes et la brutalité de sa garde, le général Sanogo a pris le risque de refuser de répondre à la convocation du juge. Quel acte incivique et antirépublicain !!!!
Ce serait au Togo de Faure Gnassingbé qu’une telle attitude aussi insolente pourrait très probablement passer inaperçue. Mais heureusement que c’est au Mali, pays à la tête duquel se trouve un certain IBK, fraichement élu Président de la République.
C’est donc sans ménagement qu’un contingent de forces de l’ordre et de sécurité, directement instruit par le sommet de l’Etat, a fait irruption au domicile du fameux général pour le conduire de force devant le juge d’instruction ce mercredi matin et ce en exécution d’un mandat d’amener dûment émis par ce dernier.
Il sera aussitôt auditionné avant d’être inculpé pour meurtres et assassinats, puis placé naturellement sous mandat de dépôt. Qui dit mieux ?
Voilà un exemple patent qui illustre fort bien l’indépendance des juges, la force de la loi dans une République, mais aussi l’audace politique d’un Président qui a de la vision et de l’ambition pour son pays.
Qui peut parier que le fils du général Eyadema serait capable d’un tel courage politique et d’une telle audace vis-à-vis d’un si puissant général au Togo ?
Plusieurs cas analogues se sont produits au Togo sans que cela n’émeuve personne. L’exemple des violences post-électorales de 2005 suffit.
Mais prenons la peine de passer sous silence cet épisode en considérant que le principal bénéficiaire de cette barbarie a été Faure Gnassingbé en personne et qu’à ce titre il pourrait avoir des retenues pour sévir spécialement dans ce cas.
Mais alors, que d’actes inciviques ont été posés par la suite par des officiers, sous-officers et soldats de rangs contre la République et ses citoyens et contre lesquels aucune action audacieuse n’a été menée ?
Des officiers qui se permettent d’intervenir directement dans des dossiers judiciaires pour demander expressément, par des coups de fils ou des menaces, la condamnation d’innocentes personnes.
D’autres qui se rendent coupables d’abus impardonnables et exercent sans retenue, des tortures et des violences inouïes sur des citoyens sans que personne ne lève le petit doigt pour les soumettre à la rigueur de la loi.
Ce n’est pas tout. Au-delà des corps habillés, que de gangstérisme d’Etat ne constatons-nous pas dans les rangs des ténors du régime actuel et qui reste impuni ?
Les détournements répétitifs des deniers publics, la prévarication, le laxisme, la corruption sont légion au Togo.
Des audits qui révèlent ces genres de pratiques sont soigneusement rangés dans les tiroirs à Lomé II comme ailleurs et les auteurs de ce banditisme d’Etat continuent de faire leur loi dans le pays.
Le cas de Togotelecom, de la caisse nationale de sécurité sociale, des impôts et d’autres sociétés d’Etat illustre sans contredit nos propos.
Pire, le Président de la République en presonne a pris le risque, lui aussi de dénoncer l’accaparement des richesses de l’Etat par une minorité, sans pour autant poser un seul acte pouvant dissuader les pilleurs de ces biens.
Davantage encore, il s’est empressé de dénoncer des surfacturations dans les sociétés d’Etat sans se donner les moyens d’y mettre fin.
Au final, qu’a-t-on fait pour donner force à loi au Togo ? Rien. Au contraire l’on promeut de façon éhontée les auteurs et commanditaires de ces actes ignobles.
Des élèves ont été froidement tués au Togo sans que les auteurs de ces tirs qui sont, en principe bien connus, n’aient été inquiétés par la loi.
Comment peut-on alors s’attendre à affirmer une quelconque vision pour un pays qui est gérée de façon aussi artisanale et primaire où des individus sont plus puissants que la loi et la République et où, les gens sont prêts à torpiller sans honte ni pudeur cette loi à satiété ?
Comment peut-on comprendre que dans un Etat qui se dit de droit, un procureur de la République dont la mission est de veiller à l’application juste et équitable de la loi puisse dire que des révélations faites par des personnes inculpées dans une affaire hautement criminelle ne l’engagent pas et qu’il veuille au même moment envoyer ces derniers aux assises ?
C’est tout simplement débile !!!!
Dans tous les cas, si Faure Gnassingbé avait besoin d’un exemple pour se donner le courage d’agir, il en a trouvé mercredi au Mali avec l’interpellation de Sanogo qui a même le statut d’ancien Président.
Si un tel exemple ne le détermine pas à agir c’est que, plus jamais, il n’agira et la fameuse République ou le fameux Etat de droit dont on nous rebat les oreilles au Togo, ne sera rien d’autre qu’un abus de langage.