L’homélie du Ministre-Evangéliste Koffi Esaw aux acteurs de la justice et aux propriétaires fonciers : « Comme le sang d’Abel, le sang de ces victimes crie vengeance »
Publié le samedi 30 novembre 2013 | Le Télégramme 228
Il n’y a pas de jours où le litige foncier ne fait pas de victimes en Afrique, et plus particulièrement au Togo. Hémiplégie, crises cardiaques, folie…Voilà ce à quoi doivent s’attendre les victimes, qui la plupart du temps, se retrouvent dans l’au-delà.
Dans son discours lors de l’ouverture du 25ème Congrès des Notaires d’Afrique, le Garde des Sceaux, ministre de la Justice, Koffi Esaw, sans détour, a pointé son doigt accusateur vers les propriétaires fonciers et les acteurs de la justice pour soulever « l’ampleur du drame que vivent nos populations victimes de ces actes iniques et combien nauséeux, hideux et répréhensibles, n’a d’égal que le nombre effroyable de personnes que ces propriétaires véreux et ces acteurs cyniques, précipitent dans l’au-delà chaque année ». D’après ce dernier, « près de 90%, probablement plus, de litiges en Afrique sont ceux touchant le foncier. Ces litiges sont crées par les propriétaires fonciers et les acteurs de justice ». Le ministre-Evangéliste, Koffi Esaw a prévenu ces acteurs qui font la misère des paisibles citoyens dans les litiges fonciers de la punition divine :
« Comme le sang d’Abel, le sang de ces victimes crie vengeance. Ne soyez pas de ceux-là sur qui le justicier suprême enverra, assurément la foudre de sa colère et sur leur descendance jusqu’à la 4ème génération ». Toutefois, il les a rassurés : « heureusement, il y a la place pour la miséricorde divine pour le cœur repentant ! ». Pour l’intérêt que nous portons aux questions foncières à cause des drames avec des conséquences incommensurables et des victimes collatérales, nous jugeons impérieux de passer l’intégralité du discours du ministre, afin de situer chacun des acteurs devant sa responsabilité. Lisez plutôt
« Dans un peu plus d’un mois seulement, l’année 2013 aura vécu. Comme pour lui souhaiter son adieu sur un timbre professionnellement particulier, le 25ème Congrès des notaires d’Afrique a décidé de clôturer cette année en beauté en tenant ses assises dans la capitale togolaise Lomé, sous le thème : « Le Notariat Africain face aux mutations économiques et sociales du continent ».Il s’agit là d’une thématique fort significative et expressive à plusieurs égards si l’on considère l’évolution de nos sociétés africaines et les nombreux défis et enjeux sociaux, économiques, juridiques et politiques qui confrontent.
Messieurs les notaires,
Tout comme vos confrères les huissiers qui vous ont précédés il y a quelques semaines dans notre capitale, vous êtes méconnus.
Qui êtes-vous ?
N’êtes-vous pas ces scribes à la plume habile et experte dont la qualité d’officier public, témoin des accords contractuels ou d’affaires, vous oblige à assurer la sécurité aux actes et contrats !
Or cette aspiration à la sécurité est en effet devenue un impératif de notre civilisation et les individus étant désormais à la recherche du service infaillible, se tournent vers vous, dont les connaissances et compétences doivent être sans cesse renouvelées.
C’est pour cela qu’il faut reconnaître que vous exercez une profession complexe, étant les seuls authentificateurs du droit commun. Votre rôle dans la société moderne est capital, votre fonction d’intérêt général est d’assurer la sécurité des contrats et des relations d’affaires tout en restant conseillers avertis de vos clients.
Mesdames, messieurs, chers congressistes,
C’est encore un très grand privilège pour notre pays le Togo d’avoir été choisi après le congrès de la CAAF en 2001 par votre organisation pour la tenue de la présente rencontre importante qui s’inscrit dans la droite ligne de ses activités de formation de ses membres.
Je suis personnellement fier de savoir que le choix du Togo a été dicté d’une part par le dynamisme du Notariat Togolais au sein de l’Union Internationale du Notariat Latin (UINL) et de sa Commission des Affaires Africaines (CAAF) (je tiens à rendre ici publiquement un hommage mérité à tous les notaires togolais pour leur détermination, leur sens du travail bien fait et leur rôle fort appréciés par leurs paires des autres pays ici représentés).
Par ailleurs, il m’est revenu que ce choix est l’expression de leur reconnaissance par les organisateurs à notre pays pour les efforts entrepris et les actions menées avec succès par les autorités politiques togolaises afin d’engager et de mettre en œuvre un vaste programme de modernisation de la justice togolaise dont les résultats seront profitables à tout le peuple. J’en suis fort et je vous remercie, chers organisateurs, pour cette marque de confiance.
Vos assises qui s’inscrivent déjà dans une tradition, viennent une fois de plus renforcer et perpétuer la noblesse de votre profession, une des composantes du pouvoir judiciaire, un outil incontournable de la promotion et de l’édification d’un véritable Etat de droit et de la démocratie dont il est le socle.
Elles auront par conséquent pour mission, j’en suis convaincu, au travers des diverses approches thématiques inscrites à l’ordre du jour, de démontrer, en dehors des objectifs ordinaires qu’elles poursuivent, l’éclat d’un métier dont le rôle et l’impact dans la cité sont incontournables, même si pour certains.
Tout le plaisir est donc pour moi en ce jour solennel de prendre la parole en ma qualité de Garde des sceaux, ministre de l’Institution dont relève le corps notarial, pour vous apporter le soutien et les chaleureuses salutations du Chef de l’Etat, son Excellence monsieur Faure Essozimna GNASSINGBE, du peuple et du Gouvernement togolais, dans le cadre de votre Congrès auquel ils souhaitent d’ores et déjà un plein succès.
Mesdames, Messieurs, chers congressistes,
L’objectif de vos différents congrès depuis 25 ans a toujours été d’assurer la formation des notaires en aiguisant leur savoir-faire à partir des thèmes liés à la profession, et qui, de ce fait leur permettent de renouveler leurs connaissances et d’accroître leurs compétences, dans l’optique d’éclairer au mieux leurs clients dans l’observation stricte des principes de l’éthique et des règles déontologiques, soubassement de la bonne santé de cette profession.
Je trouve que c’est une bonne chose que de toujours chercher à se former et à rechercher l’excellence, car comme un proverbe togolais le dit si bien « le savoir est comme un baobab qu’on ne saurait seul cerner par un simple tour de bras ».
Ce défi de renouvellement des connaissances est une obligation permanente que tous vos congrès aident à relever, et cela fait 25 ans aujourd’hui que vous l’avez entamé sous l’égide de la Commission des Affaires Africaines à qui j’adresse pour la circonstance mes bons vœux pour ses 25 années d’existence au sein de l’Union Internationale du Notariat Latin (UINL). Bon anniversaire CAAF.
C’est le lieu de dire que le gouvernement togolais, conscient de la nécessité de former les acteurs judiciaires (magistrats, avocats, notaires, huissiers, commissaires-priseurs, greffiers) pour une meilleure administration de la justice capable de donner une pleine satisfaction aux justiciables a, dans le cadre de sa politique de modernisation de la justice démarrée en 2005, mis à la disposition de ces professionnels du droit, un institut judiciaire où ils seront utilement formés : il s’agit du Centre de Formation des Professions de Justice (CFPJ).
Mesdames, Messieurs,
Distingués invités,
Je tiens à saluer l’expertise avérée des organisateurs de ce congrès qui ont su choisir minutieusement les différents sujets se rapportant au thème central et dont les développements promettent des débats fort enrichissants.
Je trouve vraiment évocateurs des sujets tels que :
- la pertinence du notaire dans le monde des affaires,
- l’intensification du rôle du notaire auprès de l’Etat,
- l’adaptation du notariat à l’évolution technologique,
- l’adaptation du notaire aux changements sociaux,
- le notaire et le rapport à la terre
Parmi ces sujets, l’un est très préoccupant de nos jours dans nos communautés africaines ; il s’agit du problème récurrent lié à la sécurité foncière.
Beaucoup d’observateurs s’accordent, non sans ironie, à dire que le problème de la terre dans nos milieux est une bombe à retardement. Vrai ou faux ? La réalité est là, incontestable. C’est un « casse-tête chinois plutôt africain, s’il vous plait ! » auquel il faudra nécessairement tôt ou tard trouver un début de solution acceptable pour tous.
Refusons d’être complices des meurtriers en col blanc, qui déguerpissent de leur terre, les honnêtes citoyens de nos pays qui ont acquis, en toute légalité leur parcelle de terre et titulaires de titres fonciers créés en toute légalité.
Et lorsque la même terre est cédée à plusieurs acquéreurs, tous se prévalant d’un titre de propriété obtenu frauduleusement avec la complicité des acteurs de justice, nous ne sommes pas seulement face au surréalisme se jouant en pleine jungle, c’est la paix sociale qui est dangereusement mise en péril.
Près de 90%, probablement plus, de litiges en Afrique sont ceux touchant le foncier. Ces litiges sont crées par les propriétaires fonciers et les acteurs de justice. L’ampleur du drame que vivent nos populations victimes de ces actes iniques et combien nauséeux, hideux et répréhensibles, n’a d’égal que le nombre effroyable de personnes que ces propriétaires véreux et ces acteurs cyniques, précipitent dans l’au-delà chaque année : les victimes meurent d’hémiplégie, de crises cardiaques et la liste est longue.
Mesdames, messieurs les notaires,
Comme le sang d’Abel, le sang de ces victimes crie vengeance. Ne soyez pas de ceux-là sur qui le justicier suprême enverra, assurément la foudre de sa colère et sur leur descendance jusqu’à la 4ème génération. Heureusement, il y a place pour la miséricorde divine pour le cœur repentant !
Mesdames, messieurs,
Nous ne le dirons jamais assez, il en est qui n’ont jamais fait usage du glaive et pourtant ont les mains tâchées de sang. Comment ? Du fait d’actes juridiques iniques. Sous d’autres cieux, les acteurs de tels actes se voient retirer leur charge pour rejoindre les criminels dans les prisons.
Dans nos pays africains, heureusement pas dans tous les pays africains, à titre de récompense du cynisme et du sadisme de ces malfrats en toge, nous les faisons, « en vertu des pouvoirs qui nous sont conférés » chevaliers, officiers, commandeurs de nos ordres nationaux. Imposture, avez-vous dit ! Et vous avez raison.
Fort heureusement, l’Afrique compte de nombreux notaires, intègres à la toge blanche bien que noire. Ils font honneur à leur profession.
En tout état de cause, je suis persuadé que votre congrès apportera des lumières sur toutes les problématiques listées et que la réussite sanctionnera l’ensemble de vos travaux.
Sur cette note d’espoir, je déclare ouvert le 25ème Congrès des Notaires d’Afrique et souhaite une fois de plus pleins succès à vos assises.
Je vous souhaite à tous la chaleureuse bienvenue.
Je vous souhaite à tous un agréable séjour au Togo.