Le 30 mai 2016, la Commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures (LIBE) du Parlement européen discutera les amendements proposés au projet de règlement proposé par la Commission européenne en septembre 2015 pour établir une liste commune de « pays d’origine sûrs ». Cette dénomination signifie qu’aucun risque de persécution n’existerait a priori pour les demandeurs d’asile et que l’état de droit serait respecté dans ces pays.
L’AEDH, EuroMed Droits et la FIDH alertent sur les dangers de l’utilisation de la notion de sûreté pour traiter les demandes d’asile. Aucun pays ne peut être présumé « sûr ». En adoptant une telle liste, l’Union européenne (UE) et ses États membres institutionnaliseraient au niveau européen une pratique consistant pour les États à refuser d’assumer pleinement leurs responsabilités envers les demandeurs d’asile, en violation de leurs obligations internationales.
A ce jour, 12 Etats membres sur 28 possèdent une liste nationale de « pays sûrs », mais ces listes sont loin d’être homogènes. Le projet de la Commission vise à pallier ces disparités. Les sept pays considérés comme « sûrs » par le projet sont : l’Albanie, la Bosnie-Herzégovine, la Macédoine, le Kosovo, le Monténégro, la Serbie et la Turquie.
La Commission envisage de suivre la même démarche pour faire adopter une liste commune de « pays tiers sûrs » afin de pouvoir renvoyer les demandeurs d’asile vers les pays par lesquels ils ont transité avant leur arrivée dans l’UE où ils pourraient « légitimement » déposer leur demande d’asile.
Par souci de rationalisation et d’harmonisation du système européen, l’UE donne ainsi une légitimité institutionnelle à un détournement de la demande d’asile à des fins de contrôle migratoire. L’usage de la notion de « sûreté » induit en effet des conséquences graves sur les droits des demandeurs d’asile : examen accéléré des demandes, appels non suspensifs, rejet probable de la demande, irrecevabilité dans le cas des « pays tiers sûrs », et renvoi dans le pays de provenance. En dépit de ces enjeux essentiels, alors que de nombreuses personnes tentent d’accéder à la protection internationale au sein de l’UE, nos organisations déplorent que la société civile n’ait, à aucun moment, été associée à une discussion sur ce projet de texte.... suite de l'article sur Autre presse