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49è sommet des chefs d’Etat à Dakar/Alternance et limitation de mandat: Faure Gnassingbé et Yahya Jammeh, les deux brebis galeuses de la CEDEAO
Publié le mardi 7 juin 2016  |  L'Alternative


© AFP par SSOUF SANOGO
Mali : les Chefs d’Etats de la Cedeao réunis à Yamoussoukro
Mercredi 27 février 2013. Les Chefs d’Etats de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) sont réunis, en sommet, dans la capitale politique ivoirienne pour plancher sur la crise malienne.


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La 49è session ordinaire de la CEDEAO s’est tenue ce week-end à Dakar au Sénégal. Au menu de cette grande réunion régionale, les menaces de Boko Haram en Afrique de l’Ouest et la réflexion pour une riposte régionale, les questions économiques dans un environnement économique mondiale marqué par la chute des prix du baril de pétrole, entre autres. A l’issue des travaux, la Présidente du Liberia, Ellen Johnson Sirleaf a été portée à la tête de l’Institution régionale pour un mandat d’un an, succédant ainsi au président sénégalais Macky Sall.

Deux absents majeurs ont été notés. Faure Gnassingbé et son colistier gambien Yahya Jammeh. Pour rappel, il y a plus d’un an, ces deux présidents se sont illustrés par leur opposition au protocole additionnel de la CEDEAO qui prévoyait la limitation à deux des mandats présidentiels dans l’espace communautaire. On n’imaginait pas l’autocrate gambien fouler le sol sénégalais si on s’en tient à sa sortie fracassante dans «Jeune Afrique» N° 2890 du 29 mai au 4 juin. « Comment qualifierez-vous vos relations avec votre homologue sénégalais ?», lui a demandé le journaliste de l’hebdomadaire panafricain. Le Président marabout de Banjul n’est pas allé du dos de la cuillère : « Elles sont bien pires que du temps d’Abdoulaye Wade ! Comme Macky Sall, il était animé de mauvaises intentions, mais il était plus discret. Il n’a jamais laissé les dissidents gambiens s’exprimer librement, proférer leurs menaces dans les médias publics sénégalais. MackySall, lui, le fait sans vergogne. Son gouvernement protège tous ceux qui complotent contre mon pays, tous ceux qui commettent des délits en Gambie et qui fuient en prétendant que leurs droits sont bafoués. Je lui ai fait parvenir un message et j’ai été très clair : si ces personnes qu’il protège attaquent la Gambie, alors j’attaquerai le Sénégal. J’y suis prêt ». Avec ces sorties plus que belliqueuses, sa présence à Dakar relèverait du miracle.


Le cas Faure Gnassingbé même s’il n’est pas loin de son compère gambien suscite des interrogations. Le fils du général Eyadema qui régente le Togo d’une main de fer depuis 11ans est un habitué des grands sommets. Il en raffole au point de passer plus de temps à l’extérieur que dans son propre pays. Quelques jours avant, il était en grandes pompes en Chine pour quémander l’aumône.

Il était ensuite annoncé à Dakar, et dès son retour, en visite officielle en Allemagne, là aussi pour faire la manche tant ses sujets au Togo meurent de faim malgré les ressources minières du pays (sic). Finalement, il ne sera aperçu nulle part parmi ses pairs dans la capitale sénégalaise.


Faure Gnassingbé-CEDEAO : Je t’aime, moi non plus

Après l’intermède de la succession chaotique et sanglante, avec la complicité des officielles de la CEDEAO (Mamadou Tandja, Adrienne Diop, Aïchatou Mindaoudou, Olusegun Obasandjo, Mai Manga Boukar, etc.), les relations entre Faure Gnassingbé et l’institution dont le siège se trouve à Abuja n’ont jamais été un long fleuve tranquille. Il ne peut en être autrement pour un homme qui incarne un système vieux de 50 ans et qui s’oppose à toute réforme politique dans son pays.

En dépit du fait que Faure Gnassingbé (11 ans au pouvoir ) est aujourd’hui l’un des doyens des chefs d’Etat de la région, avec le GambienYahya Jammeh ( 22ans), il a de la peine à se faire désigner président de l’institution. Cela fait bientôt 4 ans qu’il cherche, en vain, à prendre la présidence de la CEDEAO. Il y a trois ans à Abidjan, il s’est fait dribbler par ses pairs au profit d’Alassane Dramane Ouattara.


A la fin du mandat de ce dernier, il a cru à son heure, mais la surprise a été de taille. Ce fut le tour de John Mahama du Ghana. En 2015 au sommet d’Accra, Faure Gnassingbé et son colistier Yahya Jammeh s’opposent à l’adoption du protocole additionnel de la CEDEAO sur la bonne gouvernance et la limitation du mandat présidentiel en Afrique de l’Ouest. Visiblement, le Prince a du mal à s’imposer à ses pairs. Après cette série de revers, et sachant de quoi devait accoucher le sommet de Dakar, il a préféré ne pas s’y rendre. Et pourtant deux jours avant le sommet, on a pu voir Faure Gnassingbé en Chine donner aux étudiants chinois des cours sur la genèse de la CEDEAO en mettant en exergue les rôles joués par son défunt père et Yakoubu Gowon. Curieux n’est-ce pas que deux jours après, il boycotte le sommet de la CEDEAO à Dakar? Trop de coïncidences tue le hasard.

L’absence de Faure Gnassingbé et de Yahya Jammeh au sommet de Dakar ne relève pas du hasard. Il s’agit d’une attitude de deux personnalités devenues des curiosités dans l’espace CEDEAO où plusieurs pays ont fait un bond en avant sur le plan politique. Le marabout de la Gambie n’est pas près de lâcher du lest. Pour lui, les opposants sont des cafards à écraser, Ban Ki-Moon et Amnesty International peuvent aller en enfer.

Quant à sa conception de la limitation du mandat présidentiel, elle est aussi anachronique et sulfureuse que l’individu et se résume à ce ceci : « Je serai président aussi longtemps que Dieu et mon peuple le voudront. Je travaillerai tant que je pourrai, au développement de ce pays. (…) Non. Il y a une limite d’âge dans la constitution gambienne, qui m’empêchera un jour de me représenter. C’est 65 ou 70 ans, je ne sais plus (sic).

Quand j’aurai cet âge-là, je dirai bye-bye. Je respecterai la Constitution. En revanche, nous n’avons pas de limitation du nombre de mandats », a-t-il pesté dans «Jeune Afrique» avant d’ajouter : « Parce que si les gens veulent limiter le nombre de vos mandats, ils n’ont qu’à cesser de voter pour vous, c’est aussi simple que cela. Et puis, soyons sérieux : En Afrique, lorsque vous démarrez un projet, il vous faut au moins un an pour trouver les financements, six mois pour réaliser les études de faisabilité, etc. Il est à peine lancé que votre mandat est terminé. Voilà pourquoi tant de projets n’aboutissent jamais. Prôner la limitation des mandats en Afrique, c’est prôner l’instabilité. Cela n’arrivera pas en Gambie ». Sacramento ! Drôle de conception. Faure Gnassingbé est malheureusement de la même école. N’a-t-il pas dit à ses proches que tant qu’il sera au pouvoir, il n’existera pas au Togo ni limitation de mandat présidentiel, ni un scrutin à deux tours?

Depuis 11 ans, il ne cesse de manifester sa mauvaise foi en refusant de matérialiser les réformes constitutionnelles et institutionnelles contenues dans l’APG, cet accord qui a légitimé son pouvoir sanglant et macabre de 2005. Les exigences de la classe politique, la pression des ambassadeurs, les exhortations des personnalités morales notamment les évêques le lui disent absolument rien. Pendant que dans la sous-région, ses collèges à peine élus lancent les reformes (Patrice Talon au Bénin, Macky Sall au Sénégal, Alassane Ouattara en Côte d’Ivoire, Marc Christian Kaboré au Burkina Faso), qui pour mettre en place une commission pour une nouvelle constitution, qui pour ouvrir un dialogue avec ses opposants, le rejeton d’Eyadema, lui, n’a pas fini en jet privé de parcourir le monde entier à la recherche du Saint Graal.

Les régimes de Lomé et de Banjul constituent à nos jours les points noirs de l’espace CEDEAO où la plupart des pays ont connu une alternance au pouvoir. Il est plus qu’évident que dans un effort accru pour le nivellement des systèmes politiques en Afrique de l’Ouest, un processus soutenu par les partenaires au développement qui sont d’ailleurs les financiers de la CEDEAO, de l’UEMOA, Faure Gnassingbé et son ami Yahya Jammeh relégués au banc des pestiférés de la région n’ont pas d’avenir. Qu’ils le veuillent ou pas, la dynamique en cours en Afrique de l’Ouest finira par emporter d’une manière ou d’une autre les systèmes anachroniques dont ils sont l’incarnation.

Le Togo et la Gambie sont devenus un vrai danger pour la stabilité en Afrique de l’Ouest. Le premier s’est d’ailleurs opposé à l’intervention militaire de l’UA au Burundi où un autre sanguinaire n’en finit pas de décimer son peuple pendant que le second menace clairement d’attaquer le Sénégal. La dynamique du jeu démocratique qui semble s’installer dans la durée en Afrique de l’Ouest ne saurait être remise en cause par des individus qui traine des mentalités des années 1970. C’est justement pour cette raison que les systèmes incarnés par Faure Gnassingbé et Yahya Jammeh n’ont aucun avenir dans l’espace CEDEAO.

Ferdi-Nando (L’ALTERNATIVE)

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