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Un sommet d’enfumage pour Faure Gnassingbé
Publié le mardi 11 octobre 2016  |  Le Temps


© aLome.com par Edem Gadegbeku & Parfait
Ouverture du site des Side Events dans le cadre du Sommet extraordinaire de l`UA sur la sécurité maritime
Lomé, le 10 octobre 2016. L`esplanade du Palais des Congrès de Lomé transformé en site accueillant les Side Events (manifestations et activités parallèles) se déroulant dans le cadre du Sommet extraordinaire de l`UA sur la sécurité et la sûreté maritimes, et le développement en Afrique. L`inauguration de ces Side Events a été effectuée par le Premier ministre Klassou et Carlos Lopes de la CEA (Commission économique des Nations Unies pour l`Afrique).


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3000 invités, 25 à 30 chefs d’Etats et près de 13 milliards Cfa pour un sommet sur la Sécurité maritime au moment même ou la piraterie maritime a presque disparu du fait des mesures de sécurité prises au niveau des Etats de la CEDEAO et de la CEMAC. En réalité, il s’agit d’un sommet de l’enfumage pour ripoliner un régime illégitime.

Le Togo organise du 10 au 15 octobre un sommet sur la sécurité maritime. Lequel sommet, dit-on, est placé sous l’égide de l’Union Africaine. 3000 participants dont 25 à 30 chefs d’Etat et gouvernement sont attendus.


Un sommet faramineux

Depuis des années, le gouvernement togolais préparait ce sommet, reporté maintes fois sans raisons apparentes. Le sommet n’a pas bonne presse au sein de l’opinion togolaise, surtout dans la presse, très critique à l’égard du pouvoir accusé de gaspillage des ressources en vue de se refaire une santé diplomatique sur le plan international. Le sommet coûterait au bas mot plus de 13 milliards Cfa – sans compter les coûts indirects que sont les investissements dans les infrastructures aéroportuaires et la réfection de l’Hôtel Radisson Blu.

De toute façon, les autorités togolaises n’ont point lésiné sur les moyens pour organiser ce sommet. Alors que le pays n’est ni sorti de la crise socio-économique qu’il traverse depuis le 05 octobe 1990 ni de la situation économique guère rassurante, le ministre des Affaires étrangères, le téméraire et tout de même inénarrable Robert Dussey, a déclaré de but en blanc que «bâtir une bonne image du Togo sur le plan international n’a pas de prix».


Une confirmation logique des accusations de l’opposition politique et de la presse selon lesquelles il s’agit d’une conférence organisée pour des raisons de prestige, histoire de ripoliner l’image de son président arrivé au pouvoir à la faveur d’un double coup de force militaire et électoral sanglant ayant entraîné la mort de plus de 400 à 500 de civils- 1000 selon certaines organisations des droits de l’homme nationales. Et non d’une bonne intention objctive de régler une situation de piraterie maritime en phase résiduelle.

Une déclaration de l’Union des Forces de Changement (UFC)- parti allié de l’UNIR au pouvoir- rendue publique le 10 octobre vient en renfort au ministre Robert Dussey pour souligner le caractère somptuaire voire inutile d’un « sommet qui va graver le nom du Togo dans les archives de la communauté internationale en matière de sécurité maritime ».


La réalité de la piraterie maritime

Le Togo a -t-il réellement besoin d’organiser un sommet sur la sécurité maritime? Un rapide retour dans un passé récent révèle combien la piraterie maritime eut un temps menacé le commerce international et effrayé les grands pays industrialisés avec le retour de ces flibustiers des temps modernes. Dans les années 2000, dans l’Océan indien, aux larges de la Somalie, on dénombre plusieurs attaques de navires. Les pirates étaient pour la plupart d’origine somalienne, qui s’attaquaient non sans raisons à des navires opérant sans contrôle dans les eaux territoiriales de leur pays livré à la guerre civile et l’instabilité permanente depuis près de trois décennies.

Au début des années 2010 plus tard, la piraterie gagne les Côtes des pays du Golfe de Guinée, essentiellement le Nigeria d’abord, ensuite le Bénin, le Togo et dans une moindre mesure le Ghana et la Côte d’Ivoire, faisant peser réellement des menaces sérieuses sur la navigation internatonale sur la Côte Ouest de l’Afrique, de Dakar jusqu’aux côtes angolaises. Le phénomène, grave entrainait une saignée dans les finances des Etats. Le Nigeria par exemple perdait plus de 2 milliards de dollars par an.

Faibles structures de contrôle maritime

Les attaques perpétrées en golfe de Guinée prenaient de plus en plus la forme de raids et détournements de bateaux, impliquant un niveau élevé de violence, avec des dizaines de prises d’otages. Les tankers chargés de pétrole brut ou raffiné sont particulièrement visés. Les attaques se produisent généralement au mouillage, durant les opérations de transfert de bateau à bateau, et visent les cargaisons de pétrole ou d’autres biens de valeur. La surveillance des côtes par les autorités nigériances ont déplacé le phénomène vers les pays voisins à l’ouest, c’est à dire le Bénin et le Togo.

Ce qui prouve à suffisance que les pays menacés étaient structurellement faibles sur le plan des moyens militaires et policiers et techniques pour surveiller les côtes. Et selon l’Organisation maritime internationale (OMI), les actes de banditisme opérés sur dans le Golfe de Guinée ne peuvent pas être qualifiés normalement de piraterie car se déroulant dans les eaux territoriales des Etats concernés. La piraterie maritime sur le plan juridique concerne des actes se déroulant dans les eaux internationales.

Les attaques perpétrées en golfe de Guinée ne relèvent pas de la piraterie telle que définie par les conventions internationales. La piraterie se définit en effet comme un acte pratiqué « dans un lieu ne relevant de la juridiction d’aucun État, soit au-delà de 12 miles marins de la côte. En deçà de ces 12 miles, il s’agit de vols à main armée à l’encontre des navires ».


Et sur la côte du Golfe de Guinée, il s’agit plus des phénomènes de banditisme, de problèmes de sécurité intérieure liés souvent à des causes plus profondes de mauvaise gestion et de distribution de ressources comme c’est le cas au Nigéria, dont les Etats de la CEDEAO et de la CEMAC peuvent régler par des coordinations de leurs forces de sécurité.

Sur les attaques signalées à l’OMI au cours de la décennie, seules 108 ont eu lieu dans les eaux internationales, tandis que 170 se sont déroulées dans les eaux territoriales et 270 à l’intérieur même des ports . La majorité des actes commis en golfe de Guinée relèvent ainsi des juridictions nationales, donc de la compétence des États côtiers d’Afrique de l’Ouest, en vertu du droit international.

Sous l’impulsion du président Yayi Boni et de l’Union Africaine, la CEDEAO et la CEMAC ont eu des rencontres à plusieurs reprises en vue de régler le problème. De leurs côtés, plusieurs Etats dont le Togo se sont renforcés en matériels d’équipement de surveillance des côtes, en navires et autres matériels.

L’ampleur du phénomène a beaucoup baissé. Et l’on signale depuis très peu d’attaques. D’où quelque peu l’agacement au niveau international de voir la diplomatie togolaise s’emparer d’un phénomène certes dangereux pour les économies fragiles de la côte, mais en phase résiduelle compte tenu de la riposte au niveau international et régional.

En ramenant le sujet à Lomé au cours d’une conférence internationale, les autorités togolaises ne font qu’enfoncer une porte déjà ouverte. Selon l’OMI, seules le manque de coordination entre les législations des différents pays empêchent. Les travaux de Lomé ne seront pas plus avancés que ce qui avait déjà été fait au niveau de la CEDEAO et de la CEMAC.

Vaine opération de légitimation

Grosso modo, Faure Gnassingbé a donc organisé la plus grande opération d’enfumage destinée à rehausser l’image du Togo devant une Communauté internationale nullement dupe, mais aussi à assurer sa propre légimation sur le plan intérieur.


Car sur le plan international, le chef de l’Etat du Togo a un lourd handicap : quoique passablement mieux éduqué, Faure Gnassingbé n’a ni l’envergure ni l’aura de son père qui en imposait à ces homologues depuis la mort d’Houphouët. Et oubliant que la situation internationale a quelque peu évolué, la Françafrique de son père a disparu avec un Jacques Chirac moribond et frappé de la maladie d’Alzheimer, tout un symbole. Sur le plan africain, de nouveaux acteurs, souvent démocratiquement élus sont apparus alors que lui s’empêtre dans une république monarchique ne pouvant tenir la comparaison qu’avec un Ali Bongo Ondimba tout autant que lui considéré comme un pestiféré.
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Togo: les enjeux du sommet sur la sécurité maritime
Publié le: 4/10/2016  | 


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