Par Christophe Boisbouvier et Vincent Duhem - envoyés spéciaux à Addis-Abeba
Plus de trente-deux ans après en avoir claqué la porte, le royaume chérifien a réintégré l’organisation continentale. Plongée dans les coulisses d’un sommet historique venu couronner l’offensive diplomatique lancée par Mohammed VI en juin dernier.
Sur l’esplanade du siège de l’Union africaine (UA), à Addis-Abeba, zébrée par l’ombre des 54 drapeaux des États membres, la Mercedes noire aux vitres teintées de Mohammed VI (M6) file sous bonne escorte en direction de l’Africa Hall. Il est 14 h 20, ce 31 janvier, jour de clôture du 28e sommet de l’organisation continentale. Un 55e fanion, rouge frappé d’une étoile verte à cinq branches, aurait dû être levé quelques heures plus tôt, mais le huis clos des chefs d’État a pris du retard.
Parmi les résolutions soumises à l’approbation des chefs de délégation, vers 13 heures, celui portant admission du Maroc. Le nouveau président en exercice de l’UA, Alpha Condé, demande, comme après la présentation de chaque projet : « Y a-t-il des objections ? » Il regarde en direction du tableau électronique où apparaissent les demandes d’intervention, pays par pays. Rien ne s’affiche. Alors il déclare : « Adopté ! » Le coup de marteau libératoire retentit dans la salle.
Trente-deux ans d’absence
Le chef de la diplomatie marocaine, Salaheddine Mezouar, sort de l’assemblée, emprunte l’un des ascenseurs et se dirige vers le bureau juridique de l’institution, où il dépose les instruments de ratification que lui avait remis, la veille, l’ancienne présidente de la Commission, Nkosazana Dlamini-Zuma. Le Maroc devient officiellement le 55e membre de l’UA. Le roi est prévenu, il peut quitter le Sheraton, où il séjourne depuis le 27 janvier, et venir siéger aux côtés de ses pairs.
Le royaume retrouve la grande famille africaine, plus de trente-deux ans après en avoir claqué la porte, le 12 novembre 1984, après que l’Organisation de l’unité africaine (OUA) eut accepté en son sein un 51e membre, la République arabe sahraouie démocratique (RASD), État autoproclamé par le Front Polisario – sur une bande de sable dont le royaume chérifien revendique la souveraineté depuis le départ des colons espagnols, en 1975. La RASD est notamment soutenue par l’Algérie, mais aussi par l’Afrique du Sud, l’Angola et plusieurs pays d’Afrique australe.... suite de l'article sur Jeune Afrique