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Discours d’ouverture de Helen Clark lors de la Seconde Conférence Internationale sur l’Émergence de l’Afrique
Publié le mardi 28 mars 2017  |  PNUD AFRIQUE


© aLome.com par Marc-Innocent
CIEA 2017: le deuxième édition de la conférence ouverte par le Président Ouattara
Abidjan le 28 Mars 2017. La 2éme édition de la Conférence Internationale sur l’Emergence de l’Afrique (CIEA) s’est ouverte à Abidjan en présence de plusieurs personnalités parmi lesquelles les Chefs d’Etat du Libéria, Ellen Johnson Sirleaf, Sénégal, Macky Sall, de la Guinée Alpha Condé, de la Côte d’Ivoire, Alassane Ouattara, Helen Clark, Administrateur du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) et Akinwumi Adesina, président de la Banque Africaine de Développement (BAD).


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Discours d’ouverture de Helen Clark Administrateur du PNUD

2ème Conférence internationale sur l’émergence de l’Afrique

Abidjan, Côte d’Ivoire

Le 28 mars 2017



Je suis très heureuse de me joindre au Président de la Côte d’Ivoire, S.E. Alassane Ouattara, pour vous accueillir à l’occasion de cette seconde Conférence internationale sur l’émergence de l’Afrique.

Je tiens à adresser mes remerciements les plus sincères au Président Ouattara et à son Gouvernement pour avoir organisé cette importante conférence en collaboration avec le PNUD. Je voudrais remercier également la Banque africaine de développement et la Banque mondiale pour leur soutien à la tenue de la conférence.

Le nombre impressionnant de participants venus des pays d’Afrique et du monde entier souligne l’importance de l’émergence de l’Afrique. Je vous souhaite à tous la bienvenue et je remercie tout particulièrement les chefs d’État et de Gouvernement d’avoir fait le déplacement afin d’être présents aujourd’hui parmi nous à Abidjan.


Depuis la dernière fois que nous nous sommes réunis en 2015, la communauté internationale a convenu d’un Programme de développement durable à l’horizon 2030 ambitieux et universel et des objectifs de développement durable (ODD) qui lui sont associés. Les ODD aspirent à éradiquer la pauvreté et la faim, à lutter contre les inégalités et la discrimination, et à s’attaquer au changement climatique. Ils reconnaissent également l’importance de construire des sociétés pacifiques et ouvertes à tous pour la réalisation d’un développement durable.

L’émergence de l’Afrique contribuera grandement à la réalisation du Programme 2030 et de l’Agenda 2063, qui traduit l’approche visionnaire de l’Union africaine. L’émergence devrait non seulement accroître le PIB par habitant, mais promouvoir aussi le développement humain au sens le plus large. Ce constat est également celui de l’important programme des « Cinq grandes priorités » de la Banque africaine de développement (High-Five en anglais), qui met l’accent sur l’amélioration de la qualité de vie des populations africaines.

La Déclaration d’Abidjan de 2015 adoptée à l’issue de la première Conférence internationale sur l’émergence de l’Afrique avait reconnu les potentialités de l’émergence à l’échelle du continent et fait état des progrès déjà réalisés dans ce domaine. Elle avait également préconisé des recommandations sur la façon d’accélérer les progrès à cet égard. Cette deuxième conférence est une belle occasion de faire le point sur ce qui a été réalisé depuis, sur le plan de l’émergence en Afrique, et de partager les expériences qui y sont liées, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de la région. Cela nous permet également de réfléchir à la façon dont l’émergence pourrait contribuer au succès des programmes de développement mondiaux, régionaux et nationaux.

Pour ouvrir la voie aux débats qui auront lieu durant la conférence, permettez-moi de faire le point sur les questions suivantes :

expliquer comment l’émergence est déjà en cours sur le continent ;
prendre note de certains des défis qu’elle suscite ;
suggérer des actions stratégiques qui seraient propices à de nouvelles avancées.
Émergence de l’Afrique : progrès réalisés à ce jour
Nous pouvons voir des progrès se profiler dans les domaines suivants :

La croissance substantielle des investissements dans les infrastructures, que ce soit dans les secteurs de l’électricité, des transports, des technologies de l’information et de la communication (TIC) ou de l’eau et de l’assainissement - Il s’agit notamment d’améliorations significatives concernant respectivement les TIC au Mali, au Ghana et au Nigéria, les systèmes de transport au Kenya et à Maurice, et l’approvisionnement en eau et en assainissement en Gambie, au Sénégal, à Madagascar et en Tanzanie. Le renforcement des infrastructures se traduit par un meilleur accès des citoyens africains aux services et par une amélioration de l’environnement propice aux investissements de qualité pour les entreprises.

L’accroissement soutenu de la production manufacturière sur le continent - En 2015, la production manufacturière totale de l’Afrique était estimée à environ 500 milliards de dollars US, l’Afrique du Sud, l’Égypte, le Maroc, le Nigéria et la Tunisie faisant figure de chefs de file en la matière. McKinsey and Company estime que l’amélioration constante de l’environnement des affaires sur le continent pourrait propulser la production manufacturière jusqu’à 930 milliards de dollars d’ici 2025.

La transformation rapide des économies, impliquant le glissement des emplois de l’agriculture traditionnelle vers l’agriculture modernisée et les secteurs non agricoles - Des pays comme l’Éthiopie, le Ghana et le Rwanda se diversifient à un rythme accéléré, tandis que la productivité et la valeur ajoutée à l’agriculture progressent au Burkina Faso, en Éthiopie, au Mali, au Mozambique, au Nigéria et au Rwanda.
L’impact combiné de l’ensemble de ces progrès ainsi que d’autres avancées sur le front du développement économique et social est clair:

Les économies africaines demeurent au nombre de celles dont la croissance est la plus rapide au monde. Les dix économies à plus forte croissance sur le continent ont vu leur revenu national croître de 5 % à 8,5 % en 2016, contre une moyenne mondiale de 3,2 %;

Dix-huit pays du continent ont désormais atteint un niveau de développement humain intermédiaire ou élevé, ce qui reflète une amélioration de la santé, de l’éducation et du niveau de vie global de leurs populations. Selon le Rapport sur le développement humain 2016 du PNUD, l’Éthiopie, le Mali, le Niger, la RDC, le Sénégal et le Zimbabwe ont été parmi les pays qui ont enregistré la progression la plus rapide sur l’échelle de l’indice mondial du développement humain.

Des progrès considérables ont également été accomplis dans la réduction de la pauvreté multidimensionnelle, celle-ci ayant diminué, depuis 2005, dans 30 des 35 pays africains répertoriés au titre de l’indice mondial de pauvreté multidimensionnelle.
Quelque soixante-dix pour cent des citoyens africains vivent actuellement dans un pays où la gouvernance s’est améliorée entre 2006 et 2015. Ces résultats sont très encourageants dans la perspective d’un développement inclusif et durable.

L’émergence est à l’origine de la transformation des perspectives de notre pays hôte, la Côte d’Ivoire, qui serait, selon les estimations préliminaires, l’économie ayant connu la croissance la plus forte en Afrique l’année dernière. En 2016, le PIB de la Côte d’Ivoire a progressé d’environ 8 %, un taux nettement supérieur à la moyenne continentale de l’Afrique subsaharienne établie à 2 %. La Côte d’Ivoire réalise des avancées constantes en matière de santé et d’éducation, alors que son infrastructure s’est considérablement améliorée, et que la productivité agricole et l’accès à l’électricité et aux TIC y ont notablement progressé. L’indice de développement humain du pays s’est accru de 1,4 % par an depuis 2010, un résultat de 38 % supérieur à celui de la moyenne régionale.

La transparence, l’obligation de rendre compte et l’efficacité des services publics améliorent également la prestation des services sociaux et contribuent au développement humain dans ce pays. L’indice Ibrahim de la gouvernance africaine (IIAG) suggère que ce pays est, à l’échelle du continent, celui qui a marqué le plus de progrès en faveur de la sécurité de ses citoyens et du respect de l’état de droit.


L’expérience de la Côte d’Ivoire démontre l’importance des politiques prospectives, des réformes structurelles et des investissements clés dans la stimulation de l’émergence. Le nouveau Plan national de développement pour 2016-2020 privilégie la transformation économique structurelle par le biais de l’industrialisation, du développement des infrastructures et de la croissance inclusive.

Le PNUD est fier d’avoir appuyé le Gouvernement de la Côte d’Ivoire dans la préparation de son Plan de développement national et son alignement sur les résultats de la Conférence internationale sur l’émergence de l’Afrique de 2015 et sur le Programme 2030.

Nous œuvrons à présent de concert avec le Gouvernement afin de mettre en place un cadre de suivi et d’évaluation pour surveiller la mise en œuvre du plan, et pour établir également un dialogue national sur les politiques publiques inclusives et les processus budgétaires efficaces. À l’avenir, nous sommes prêts à mettre à contribution notre présence dans le monde en vue de faciliter l’échange d’expériences en matière de développement dans des domaines dignes d’intérêt pour le Gouvernement de la Côte d’Ivoire.

Défis de l’émergence de l’Afrique


Dans l’ensemble du continent, on constate encore une dépendance excessive à l’égard des produits de base alors que la baisse des prix de certains d’entre eux durant ces dernières années a eu comme effet de freiner la croissance économique. L’accroissement de la résilience face aux chocs provoqués par les fluctuations des cours des produits de base nécessite une plus grande diversification de l’économie et des exportations, ainsi que l’industrialisation.


Les restrictions commerciales restent plus élevées en Afrique subsaharienne que partout ailleurs dans le monde. Ce constat conjugué à une prolifération des accords commerciaux bilatéraux et régionaux risque d’avoir un impact négatif sur l’espace politique dont les pays africains ont besoin pour promouvoir l’émergence. La réussite du Cycle de négociations de Doha pour le développement de l’OMC constituera une étape décisive pour mettre le commerce au service du développement de l’Afrique.

Les capacités institutionnelles doivent être renforcées pour soutenir l’analyse prospective, la mise en œuvre et le suivi des stratégies et des politiques visant à réaliser l’émergence.
Les gains de l’émergence à ce jour ne sont pas équitablement partagés. En moyenne, les 20 % des travailleurs les mieux payés en Afrique ont des revenus de dix fois supérieurs à ceux des 20 % de travailleurs les moins bien rémunérés. La répartition inégale des ressources, du pouvoir et de la richesse, couplée à des normes sociales inéquitables, conforte les inégalités persistantes. Les inégalités hommes femmes coûtent à l’Afrique subsaharienne 95 milliards de dollars en moyenne par an, soit 6 % du PIB de la région. L’objectif de ne laisser personne de côté est un élément clé du Programme 2030, qui sera essentiel à l’émergence complète de l’Afrique.

Accélérer l’émergence de l’Afrique


La Déclaration d’Abidjan de 2015 a mis en évidence trois piliers liés à l’émergence de l’Afrique : la transformation économique structurelle, la mise en place d’un État développementiste et la promotion du développement humain. Au PNUD, nous considérons qu’il est nécessaire, pour faire progresser ces piliers, de prendre des mesures effectives dans cinq domaines stratégiques :


Premièrement, l’industrialisation de l’Afrique devrait s’articuler autour des domaines où le continent bénéficie du meilleur avantage comparatif, en s’appuyant notamment sur l’agriculture et les industries extractives. Cela aiderait les pays africains à gravir les échelons des chaînes de valeur et à faciliter le développement de groupes industriels et la croissance des PME comme piliers de l’économie. Un exemple réussi à cet égard est celui de l’Éthiopie, qui a fait la démonstration du potentiel des parcs industriels et des zones économiques spéciales pour transformer le secteur manufacturier et stimuler l’industrialisation.

Deuxièmement, il est primordial de promouvoir l’esprit d’entreprise et de tirer parti de la vitalité du secteur privé. Pour ce faire, il importe de renforcer les compétences grâce à l’éducation, à la formation technique et à la formation professionnelle en vue d’améliorer l’employabilité et de donner libre cours au pouvoir créateur des jeunes et des femmes. En exploitant le potentiel de leurs populations jeunes, les pays émergents d’Asie ont réussi à développer leur main-d’œuvre et à gagner en compétitivité et en productivité.

Troisièmement, les investissements continus et à grande échelle dans des infrastructures de qualité sont essentiels. La Banque mondiale et la Banque africaine de développement ont estimé que pour surmonter les graves déficits d’infrastructure, l’Afrique subsaharienne devrait investir 93 milliards de dollars supplémentaires par an dans ses infrastructures jusqu’en 2020. L’approvisionnement en électricité stable, le maintien des réseaux routiers et ferroviaires en bon état de fonctionnement, et la nécessité de disposer d’un secteur portuaire fort et de systèmes de communications aériens et maritimes efficaces sont indispensables pour stimuler l’émergence.

Quatrièmement, des politiques sociales saines sont essentielles pour traduire la croissance économique en autant de gains sur le front du développement humain. Il existe de nombreux exemples de la façon dont les politiques sociales ont permis d’induire une croissance plus inclusive, au sein de l’Afrique et au-delà. Les expériences de pays tels que Cabo Verde, Maurice, le Rwanda, le Sénégal et la Tanzanie peuvent être reproduites et mises à l’échelle.

Enfin et surtout, il est essentiel de construire un État développementiste porteur d’une vision claire et partagée, caractérisé par une gouvernance responsable et transparente et détenteur d’une forte capacité institutionnelle. Accélérer l’émergence n’est qu’un seul élément de l’équation ; soutenir l’émergence en est l’autre. Un État qui promeut un développement tenant compte des risques et résilient face aux problèmes, notamment par le biais de la réduction des risques de catastrophe, de la lutte contre le changement climatique, de la protection sociale et de la cohésion sociale, est mieux préparé à stimuler et à maintenir le programme de l’émergence.

Le PNUD travaille activement avec les partenaires africains pour documenter et partager les leçons et les expériences tirées des initiatives transformatrices en faveur de l’émergence. L’étude de cas portant sur les réussites et les défis associés à la mise en œuvre de l’émergence dans treize pays, qui devrait être présentée à l’occasion de cette conférence, est un exemple édifiant de cet effort. En collaboration avec la Banque africaine de développement et la Banque mondiale, le PNUD envisage également d’étendre le partenariat pour l’émergence à d’autres partenaires multilatéraux et bilatéraux, ce qui pourrait contribuer à accélérer les progrès de l’émergence en Afrique.

Au niveau des pays, le PNUD est déterminé à soutenir l’intégration des trois piliers de l’émergence dans les plans de développement nationaux et à aligner ses propres programmes sur ces piliers, sur les ODD et sur les plans de développement nationaux.

Conclusion

En conclusion, je voudrais souligner que la poursuite et la promotion de l’émergence agissent comme des accélérateurs du développement humain en Afrique et sont, à ce titre, essentielles pour réaliser le programme 2030 et l’Agenda 2063 sur le continent.

Soyez assurés de l’engagement indéfectible du PNUD à travailler avec tous les partenaires pour faire en sorte que l’émergence et ses avantages deviennent une réalité à l’échelle du continent.

Je vous souhaite une conférence très fructueuse.
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